Jeu des 7 familles: qui sont vraiment les Français non-vaccinés que Macron compte "emmerder"?
Est-il juste de mettre tous les Français non vaccinés dans le même panier? Qu'ils soient "antivax" depuis plusieurs années, hostiles au gouvernement, négligents ou qu'ils aient des contre-indications médicales, les raisons sont variées.
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F Cassan fcassan@nicematin.frPublié le 06/01/2022 à 07:03, mis à jour le 06/01/2022 à 18:31
Le jeu des 7 familles des non-vaccinésCréation RawPixel
"Les non-vaccinés, j'ai très envie de les emmerder. Et donc on va continuer de le faire, jusqu’au bout. C’est ça la stratégie." C'est avec ses mots durs qu'Emmanuel Macron a renoué, mardi 4 janvier, avec ses accents provocateurs, en pleine vague d'épidémie de Covid-19 et à trois mois de l'élection présidentielle. Ces propos ont évidemment causé une vive polémique.
Cependant, au-delà des petites phrases, est-il juste de mettre tous les Français non vaccinés dans le même panier? Qu'ils soient "antivax" depuis plusieurs années, devenus hostiles au gouvernement (comme le suggère implicitement le chef de l'Etat), simplement négligents, ou qu'ils aient des contre-indications médicales, les raisons de n'être toujours pas vacciné à ce jour sont variées. On a identifié les 7 principales familles.
"La quasi-totalité des gens, plus de 90%, ont adhéré" à la vaccination contre la Covid-19, "c’est une toute petite minorité qui est réfractaire", estimait Emmanuel Macron mardi soir. En vérité, 21,5% de la population française n'avait reçu aucune dose à la date du 3 janvier 2022 (si l'on inclut les enfants de 0 à 11 ans), selon le site CovidTracker.
Cependant, s'il est envisageable de pouvoir convaincre les "antis" de circonstance, qui considèrent notamment le sérum actuel comme "trop expérimental", "trop soudain" ou ont peur de l'ARN messager, il sera difficile "d'aller chercher" les réfractaires à toute forme de vaccination.
Géographie politique (le sud-est du pays y est, par exemple, historiquement plus hostile que le nord-est), méfiance sur les effets secondaires, insistance sur les échecs et les maladies... 5% des Français adultes sont considérés comme "antivax" par les chercheurs. Problème: ils entraînent parfois leurs enfants, ados ou vieux parents dans leurs convictions.
Dans la famille des non-vaccinés anti-Macron, je demande... le père! Ancien gilet jaune, fan de l'agitateur niçois Oliv Oliv, parfois affilié à La France insoumise ou au Rassemblement national (dont les leaders multiplient les déclarations anxiogènes ces derniers temps), ce dernier a tous les traits de l'antivax "de circonstance".
C'est souvent la déception politique qui lie en fait ces aréopages de contestataires qui n'auraient jamais dû militer ensemble, et sont désormais bien décidés à jouer le rôle du caillou dans la chaussure de Macron.
On retrouve d'ailleurs cette hétérogénéité dans les cortèges qui défilent chaque week-end dans les rues des villes depuis presque deux ans. Certains, vaccinés, sont authentiquement et exclusivement "anti-pass" et se battent pour les libertés publiques (à Nice, la place Masséna a été rebaptisée "place des Libertés"). De l'autre côté de ce spectre de la colère, des complotistes persuadés que les gouvernements ont fomenté la pandémie. Ils seront sans doute les plus difficiles à convaincre.
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La famille des négligents
Qui n'a pas reçu, à l'approche des fêtes de fin d'année, d'étonnants messages de la part de proches, alors que chacun s'apprêtait à recevoir de la famille ou des amis en comité restreint: "Au fait, je ne suis pas vacciné, je peux me faire tester si vous voulez!"
Après deux ans d'épidémie mondiale et un an de disponibilité du vaccin, on avait grand peine à imaginer soudainement tonton battant le pavé, la bave aux lèvres, à refuser de se faire vacciner pour des raisons éthiques. "Non, je ne suis pas du tout antivax ou anti-pass, mais je suis encore jeune, j'ai attendu, je vais y aller en janvier. Là je n'avais juste pas envie, ça m'emmerdait", s'est-on entendu répondre, comme un écho à la phrase de Macron, face aux questionnements éberlués, et alors que les huîtres de Noël étaient déjà ouvertes. Que faire?
Là aussi, les enfants peuvent devenir des victimes collatérales de cette négligence. Selon une étude (2015) de Pierre Begué, président de l’Académie nationale de médecine, "si les parents d'enfants sans aucune vaccination s’y opposent intentionnellement, les parents des enfants insuffisamment vaccinés font surtout preuve de négligence et d’oubli".
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La famille "médecine naturelle"
Une mère de famille a été placée en garde à vue, mercredi 5 janvier dans le sud de l'Espagne, pour avoir enlevé ses enfants afin d'empêcher son ex-mari de les vacciner contre la Covid-19, rapporte l'AFP. Ce fait divers on ne peut plus symptomatique de notre époque met en lumière une autre branche des non-vaccinés: ceux qui ne jurent que par les produits "naturels" et ont chimie et labos pharmaceutiques en horreur... au moins en théorie.
Depuis le début de la pandémie, réseaux sociaux et sites web regorgent ainsi de fake news concernant, entre autres, les faux remèdes pour lutter contre ce coronavirus, des vertus de l'huile de sésame (démenti par l'OMS), à celles du sport (démenti par le grand nombre de sportifs de haut niveau tombés malades), en passant par l'aromathérapie, les énergies cosmiques ou encore les pierres...
Un engouement pour les méthodes dites "naturelles", paradoxalement décuplé en France par l'interdiction rapide, en mai 2020, de l'hydroxychloroquine et la mise au ban du professeur Raoult, un temps considéré comme un "sauveur" par la galaxie antivax, Donald Trump en tête. La chambre disciplinaire de l'Ordre des médecins a finalement infligé en décembre un blâme au médiatique infectiologue marseillais, pour avoir "enfreint le code de déontologie médicale en promouvant la chloroquine" afin de lutter contre la Covid-19.
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La famille des contre-indications médicales
Certaines personnes ne sont pas en mesure d'accéder à la vaccination contre la Covid-19, principalement pour des raisons médicales. Naufragés involontaires de la campagne vaccinale, ils sont laissés "à la porte des centres de vaccination et des pharmacies", selon leur formule.
"Je suis allergique à des produits médicamenteux, notamment certains antibiotiques et anti-inflammatoires", expliquait récemment à Nice-Matin Bernard, un Varois de 68 ans rencontré dans le cadre d'un appel à témoins. "J’ai toujours été favorable à la vaccination, mais en vieillissant j’ai commencé à développer des réactions anaphylactiques diverses et totalement inattendues", confirmait Bérénice, une habitante de Toulon âgée de 57 ans.
"Cela fait deux ans que je suis 'puni', je vivote", nous a également écrit Georges cette semaine, condamné selon lui, soit à "crever à cause des intolérances au produit, soit à attraper la Covid". Face à des conséquences inconnues, certains médecins préfèrent ne pas se mouiller et éviter de recommander le vaccin, y compris, dans certains cas, chez les femmes enceintes. "Ce qui est réel, c'est que pas de pass = plus de vie sociale, liberté tronquée!", conclut Georges, amer.
Ne pas être en mesure de se faire vacciner, ce n'est pas simplement avoir vaguement "peur des aiguilles" ou présenter des risques de complication liés à ses défenses immunitaires ou son état de santé général. Comme l'expliquait fin septembre dans The Conversation la chercheuse Geneviève Beaulieu-Pelletier, psychologue à l'Université du Québec à Montréal (UQAM), "l’appréhension de l’aiguille ou de la douleur est parfois si anxiogène que cela peut mener à éviter toute situation impliquant de près ou de loin la vaccination". Un vrai handicap.
Selon une étude de l'Université de Cambridge (2021), 26,2% des Britanniques "souffrent d'une phobie du sang, des injections ou d'une blessure" ("blood-injection-injury" en anglais, communément regroupés sous la même pathologie par les scientifiques). "Les individus phobiques ont davantage tendance à partager leur hésitation au sujet du vaccin anti-Covid que les non-phobiques", précisent les chercheurs. Toutefois, cette peur irrationnelle peut se soigner.
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La famille des "durs à cuire"
Souvent très âgés ou très jeunes, ces grands-pères, grands-mères, frères ou petites nièces "invincibles" ont toujours refusé de voir la Covid-19 comme autre chose qu'une "grosse grippe". Soit parce qu'ils ont "connu la guerre et les famines", soit parce qu'ils sont "en pleine forme" et ne craignent pas de l'attraper, ou encore parce qu’ils affirment vivre suffisamment isolés pour s’en prémunir.
"Seules les personnes avec des comorbidités peuvent en mourir, je ne suis ni obèse ni diabétique, c'est bon...", martèlent-ils à qui veut les entendre, allant parfois jusqu'à affirmer ne pas avoir peur de faire un séjour à l'hôpital...
Pour rappel, l’épidémie de grippe hivernale touche tout de même 2,5 millions de personnes chaque année en France selon l'Insee, et elle tue entre 1.500 à 2.000 malades. De plus, personne n’ignore aujourd'hui que le nerf de la guerre de cette pandémie de Covid-19 est le taux d’occupation des lits d’hôpital. Avec la multiplication des Covid longs dans les familles, le gouvernement ne devrait pas avoir trop de mal à convaincre cette catégorie de non-vaccinés.
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