Noir c’est noir... Thierry Ardisson icône de la télévision s’en est allé

Le publiciste de talent, devenu un homme des médias sans filtre, s’est éteint à l’âge de 76 ans, laissant derrière lui un héritage hors norme et, peut-être, une émission posthume dans laquelle il va se raconter à sa femme, Audrey Crespo-Mara.

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Mathieu Faure Publié le 14/07/2025 à 10:10, mis à jour le 14/07/2025 à 14:22
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Thierry Ardisson avait toujours la bonne formule. Pour tout. Tout le temps. "Le secret d’un come-back réussi c’est de ne jamais revenir là où on t’attend" nous avait-il confié avant de se lancer dans un nouveau projet, Hôtel du temps, qui consistait à interviewer, grâce à l’intelligence artificielle, des célébrités décédées comme Dalida, Jean Gabin ou Coluche.

Thierry Ardisson s’est éteint des suites d’un cancer du foie, il avait 76 ans. Il est difficile de résumer la vie de celui que le "PAF", paysage audiovisuel français, surnommait l’homme en noir. Gouaille incroyable, érudit, bavard, intervieweur tonitruant, nightclubber, libertin et monarchiste assumé, Ardisson avait déjà devancé sa mort dans son dernier livre L’Homme en noir (Plon), dans lequel il imaginait sa fin, par balles, sur le plateau de Tout le monde en parle. "Je veux voir la mort arriver en face" lançait-il. Ardisson, c’est un pionnier de la télévision mais aussi une figure niçoise. Son blase, déjà, lui sied parfaitement au CV puisqu’Ardisson, en latin Ardus Sonus, se traduisait par "voix forte". Ce qu’Ardisson aimait traduire en "grande gueule ".

Les Ardisson sont très liés à Nice. Le père, Victor, est né à Saint-Laurent-du-Var. Quant à la mère, Renée, elle a vu le jour à Nice. Le couple se rencontre à Golfe-Juan, là où le jeune Thierry posera les premières pierres de son rapport à la nuit, lui qui sera disc-jockey, à 16 ans, au Whisky-à-Gogo, temple légendaire de la nuit azuréenne.

Avant d’être une figure du petit écran dans des émissions cultes comme Lunettes noires pour nuits blanches, Paris Dernière, Rive Droite, Rive Gauche, Tout le monde en parle, Salut les Terriens ou 93 Faubourg Saint-Honoré, Thierry Ardisson se fait les dents dans le monde de la publicité. à la fin des années soixante-dix, l’argent coule à flots et la publicité rentre dans une époque où tout est possible.

Homme de slogans

"Pour séduire le public, il faut des choses simples: la musique, les gimmicks et l’humour sont un moyen parfait pour attraper les gens. On était très en avance à l’époque, c’était presque de l’avant-gardisme. Il fallait être créatif aussi, c’est pour ça que j’ai fait des spots de huit secondes, comiques, avec Lapeyre, Ovomaltine, Tropico, Chaussée aux moines, Waza, c’était innovant. Et il fallait tabasser les gens, ça passait près de cinquante fois par jour. On marquait les esprits. La vraie force de la pub, c’est la répétition " nous confiait-il en 2023. Le slogan "Lapeyre, y’en a pas deux", encore d’actualité, est une des nombreuses créations d’Ardisson. "La publicité, c’est de la création sur commande", poursuit-il.

Ce sens de la formule va lui permettre de s’installer durablement à la télévision pendant deux décennies, vingt ans durant lesquels son style n’épargne personne, bien aidé par son complice au verbe haut, Laurent Baffie. Deux snipers qui font des passages sur les talk-shows d’Ardisson des moments à la fois cultes (Jean-Luc Lahaye) ou gênants (Lio en pleine affaire Bertrand Cantat).

Oui, Ardisson n’est pas là pour brosser dans le sens du poil. "Thierry Ardisson, qui est un copain, disait même que j’étais un cire pompes, et parlait de connivence", nous racontait en rigolant Michel Drucker en début d’année, une manière de trancher les deux styles.

Thierry Ardisson partageait sa vie avec la journaliste de TF1 Audrey Crespo-Mara depuis 15 ans. Elle devrait réaliser, pour 2026, un documentaire intime sur les derniers moments de vie de son compagnon. Photo F.C..

Un documentaire posthume?

Mais ce style, très direct, très marqué, très "Ardisson", va connaître des limites et, petit à petit, lasser les chaînes qui vont lui préférer des Cyril Hanouna ou Camille Combal. Malgré plusieurs tentatives de retour comme récemment les 30 ans de Paris dernière, Thierry Ardisson ne semblait plus vraiment en phase avec la télévision de 2025 qu’il ne se privait pas de dézinguer. À juste titre pour certains, par aigreur pour d’autres.

La télévision, c’est pourtant le sanctuaire qui va le canoniser puisque sa femme, la journaliste de TF1 Audrey Crespo-Mara, prépare un documentaire posthume. "Vous le connaissez, mais vous ne le connaissez pas. Ardisson, tout le monde en a parlé sans jamais approcher sa vérité. Mon ambition: vous faire découvrir celui qui se cache derrière le costume de L’Homme en noir, écrit-elle dans le résumé du documentaire. Je me suis dit: s’il est quelqu’un qui doit pouvoir le percer à jour, c’est moi qui suis journaliste, portraitiste, et qui vis avec lui depuis 15 ans".

Une manière de raconter un homme à part, celle d’un personnage qui a profité de la vie comme personne et qui s’était promis de respecter dix commandements personnels dont, avec le recul de sa mort, certains prennent une autre tournure aujourd’hui: "De ton métier, tu feras une fête", "La mort en face, tu regarderas", ou encore "La postérité, tu chercheras". Le sens de la formule. Jusqu’au bout.

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