Christophe Galtier est de retour à Nice. Il aimerait sûrement être ailleurs. La dernière fois qu’il est descendu sur la Côte, il a été placé en garde à vue par la police judiciaire à la caserne Auvare. C’était le 30 juin dernier. Ce vendredi, il comparaît "des chefs de harcèlement moral et discrimination à raison de l’appartenance ou non-appartenance vraie ou supposée à une ethnie, une nation, une prétendue race ou une religion déterminée." Une première dans le foot français.
Selon son avocat, Me Olivier Martin, l’ancien entraîneur de l’OGCN sera présent ce vendredi matin au tribunal correctionnel de Nice, où il compte bien se défendre. Fait singulier: il arrive du Qatar, où il est le coach de l’équipe d’Al-Duhail.
Sur le banc des prévenus, Galtier joue gros. Il risque une peine de 3 années de prison et une amende de 45.000 euros. Mais le procès pourrait tout aussi bien faire "pschitt", car si le dossier à charge contient de lourdes accusations de racisme, il semblerait plutôt maigrelet en preuves matérielles.
Tension croissante
Seuls Julien Fournier, ex-directeur du football Ineos et auteur du mail qui a déclenché toute l’histoire, et un autre membre du club, auraient réellement mis en cause Christophe Galtier. Les perquisitions n’ont rien donné, et les joueurs pas beaucoup plus. Julien Fournier, en revanche, lui reproche des réflexions inadmissibles sorties par le journal L’équipe, qui a pu se procurer les PV d’audition: "Julien, tu n’as toujours pas compris. Moi je ne veux plus de Noirs ou d’Arabes", "Digard, il va gangrener l’équipe réserve avec sa religion", "les Algériens, c’est les pires", "Todibo, c’est un extrémiste, un salafiste".
La tension entre les deux hommes atteindra son maximum en avril 2022 pendant le ramadan, Fournier accusant Galtier de mettre la pression aux joueurs pour rompre le jeûne. Le coach nie tout en bloc, les propos racistes comme le comportement inapproprié: "Sur le ramadan, en tant qu’entraîneur, je n’ai qu’une obsession: la santé des joueurs, la performance de mon équipe. Les joueurs ont géré le ramadan comme ils l’ont souhaité, et ils ont tous joué."
Le mail qui allait tout déclencher
Après le ramadan, Julien Fournier s’est mis à table. Mais savait-il, en rédigeant ce mail destiné à Dave Brailsford, le directeur du sport d’Ineos, qu’il provoquerait une tempête qui allait tout emporter, même lui? "J’ai écrit ce mail à une seule personne en mai 2022, donc bien avant sa divulgation dans les médias [en avril 2023, Ndlr]. Et je ne suis pas à l’origine de sa fuite, que je trouve dégueulasse. Certaines personnes au club m’avaient reproché d’avoir couvert les choses. De ne pas les avoir dénoncées. Pour moi, c’était double peine. J’ai donc fait ce mail pour qu’on ne dise pas que j’avais mis un mouchoir sur les agissements de Christophe Galtier. Ce n’est pas de la délation, mais une façon de me protéger", expliquait l’ancien directeur du football d’Ineos dans les colonnes de Nice-Matin, le 8 août dernier, après de longs mois de silence.
Parole contre parole
Si Julien Fournier n’a jamais déposé plainte, Xavier Bonhomme, le procureur de la République à Nice, s’est chargé d’ouvrir une enquête et de saisir la justice deux jours après la publication du mail.
Christophe Galtier, lui, rejette toutes les accusations. "Je n’accepte pas que l’on puisse dire que je suis un raciste", a-t-il affirmé, le 17 septembre dernier, sur Canal+. Depuis, c’est le silence. Au tribunal, ce sera parole contre parole.
En attendant le jugement, tous ceux qui ont approché l’histoire de trop près ne sont plus aux affaires. Galtier et Fournier ont quitté le club, et Digard s’occupe de l’équipe Elite avec Gioria. L’OGCN version Ineos a fait le ménage. Il en sera de même pour Youcef Atal qui, après sa comparution devant le tribunal correctionnel lundi pour " provocation à la haine raciale à raison d’une religion", fera ses valises. Les clubs de foot n’apprécient guère passer des pages sports aux méfaits divers.
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