"Allô, c’est la gendarmerie": commerçants depuis 40 ans, ils se font arnaquer par de faux gendarmes à Andon

Commerçants dans ce village du haut pays grassois quatre décennies, Jean-Bernard et Yveline Salmon ont été victimes d’une escroquerie aux cartes prépayées, via de faux gendarmes.

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Alexandre Carini Publié le 01/08/2025 à 06:30, mis à jour le 01/08/2025 à 06:30
Jean-Bernard et Yveline, dépités, avec les tickets émetteurs, devant leur établissement à Andon. Photo A. Carini

Dès potron-minet. Ce jour-là encore, Jean-Bernard et Yveline Salmon se sont levés très tôt, pour ouvrir leur commerce d’Andon. Mais le cœur n’y est pas vraiment. Parce qu’après tant de dévouement pour ce village et de travail pour le faire vivre, ce couple a été abusé par des escrocs.

Délinquants "sans foi, ni loi", qui n’ont pas hésité à se faire passer pour des gendarmes. Tout est parti d’un appel téléphonique, mercredi 23 juillet. "Allô, c’est la gendarmerie de Séranon. Nous avons arrêté un suspect avec un pied-de-biche dans sa voiture et des photos de votre établissement. Pour l’enquête, nous devons vous entendre dans nos locaux, demandez l’adjudant Julien."

Pendant que chat n’est pas là…

Les exploitants du Phénix s’exécutent aussitôt, et laissent leur fils gérer le négoce. Mais à leur arrivée devant la brigade, ils trouvent porte fermée. Et l’interphone renvoie au standard de Nice. Pire, un militaire leur explique que plus personne n’est là pour l’accueil. Et surtout qu’il n’existe aucun adjudant Julien à Séranon!

Jean-Bernard et Yveline comprennent alors qu’il y a anguille sous roche. Mais trop tard. En leur absence, leur fils a reçu un nouvel appel de "la gendarmerie". L’interlocuteur lui a dit que, pour vérifier les dépositions des parents, il devait éditer les codes de quatre cartes transcash prépayées. Pensant avoir affaire aux forces de l’ordre, le malheureux a obéi.

À leur retour, Jean-Bernard et Yveline ont eu beau appeler la société Logista qui gère ces opérations, impossible d’annuler la transaction. D’autant plus qu’en deux minutes, de 18h52à 18h54, les malfrats ont utilisé les codes pour débiter 107 euros, puis deux fois 250 euros et trois fois 263 euros.

"On sait qu’on va devoir débourser la somme totale de notre poche, se désole le couple, qui a déposé une main courante auprès des vrais gendarmes. On n’a pas vraiment espoir que ça aboutisse, mais on veut alerter nos confrères sur cette arnaque et dénoncer notre système actuel, qui va trop loin. Si, au moins, les progrès technologiques servaient à quelque chose de bien!"

Eux proposaient ces cartes de crédit prépayées, anonymes et hors de tout circuit bancaire traditionnel, pour rester à la page. Ils en ont été bien mal récompensés. "En plus, on ne soupçonne personne en particulier, mais on se dit que c’est peut-être quelqu’un du coin, guettant notre départ à la gendarmerie, qui a orchestré l’arnaque…".

Situé au cœur du village aux quelque "cinquante habitants à l’année, une centaine alentour", leur établissement est pourtant essentiel à sa survie. Tous les jours, sauf le mardi, de 7h30 à 12h30, puis de 15h30 à 19h, le Phénix fait office de bureau de poste, épicerie où se côtoient miels locaux, denrées alimentaires et produits d’hygiène, maison de presse (dont Nice-Matin), tabac, dépôt de pain…

"Tout ça, ça ne fait pas 35 heures, mais on se bat pour survivre car, dans les villages de l’arrière-pays, plus rien ne tient…", pointent Jean-Bernard et Yveline. Eux y ont pourtant cru, il y a 40 ans. Lorsque ce pâtissier cannois et cette Grassoise ont repris l’hôtel des sports d’hiver. "On ne connaissait même pas Andon, mais on était jeunes, on voulait quelque chose pour nous et en bas, c’était trop cher pour nous…"

"C’étaient les belles années"

Misant sur la diversification, avec l’ajout d’un tabac, réputés pour son "bien manger", leur établissement a plutôt bien tourné. Jean-Bernard dégaine un album photos, avec ses réalisations sucrées, au goût du passé: pièces montées pour mariage, porte-avions en chocolat pour les marins de Saint-Mandrier, tracteur en nougatine pour un élu du cru...

"Ça, c’était les belles années. Avant, on avait une clientèle de commerçants et artisans cannois qui montaient se détendre, et ne rechignaient pas à la dépense. Aujourd’hui, ce sont plutôt des ouvriers du coin qui travaillent et achètent en bas, et ne sortent plus. La voiture et les supermarchés nous ont aussi fait du mal…"

Malgré un cambriolage et des tentatives, Jean-Bernard et Yveline font néanmoins exister leur Phénix, créé il y a 25 ans. Mais après ce coup du sort, eux qui habitent juste au-dessus, sont décidés à vendre leur commerce. Et tous leurs souvenirs avec…

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