Attentat du 14 juillet à Nice: "J’ai l’impression d’assister à un oubli national", le témoignage des victimes après l'hommage de ce dimanche

C’est le premier jour du reste de leur vie. Tous les jours, comme un premier. Sans elles, sans eux. Sans ces maris, ces femmes, ces parents, ces grands-parents, ces amis, ces enfants. Ces innocents assassinés il y a huit ans sur la promenade des Anglais qui, ce dimanche, s’est recueillie, sous la protection de L’Ange de la baie de l’artiste Jean-Marie Fondacaro.

Des premiers jours, toujours, encore, comme si l’attentat avait eu lieu hier: la morsure du manque continue de grignoter leurs cœurs meurtris...

Un moment "important"

14 juillet 2016 - 14 juillet 2024, ils sont là, les parents et amis des victimes de l’attentat, et les victimes elles-mêmes, pour rendre hommage aux 86 morts, emportés par la folie d’un homme, un doux soir de fête nationale. Un moment "important" pour tous ceux qui ont pris une peine de souffrance à perpétuité. Mais, "trop expéditif", ont amèrement regretté plusieurs victimes.

"Le présent et l’avenir sont faits de passé"

Sur l’une des chaises installées chaussées Sud de la Prom devant l’œuvre mémorielle, alors que la commémoration vient tout juste de s’achever, Anne Murris se recueille. La maman de Camille Murris, 27 ans pour l’éternité, a le douloureux sentiment que l’hommage n’a duré qu’un souffle. "Nous avons à peine eu le temps de nous installer qu’ils disaient le nom des 86 victimes, pas un mot d’introduction, pas un égard, c’est troublant", se désole la présidente de Mémorial des Anges. "On ne fait pas cette cérémonie parce que l’on est obligé de la faire, on est là pour porter un message. Le présent et l’avenir sont faits de passé aussi... En fait, là, je me sens un peu triste", chuchote Anne Murris, les yeux vers L’Ange de la baie qui fend le ciel bleu.

"On va finir par mal le prendre"

Célia Viale, coprésidente de Promenade des Anges, est à fleur de peau: "On vient à peine de terminer qu’ils ont déjà rouvert, et on se retrouve à se recueillir avec les joggeurs et les vélos qui passent". La jeune femme qui pleure sa maman depuis l’attentat renchérit: "Pourquoi est-ce aussi expéditif? Déjà l’année dernière c’était très court, on va finir par mal le prendre! Une fois de plus, personne n’est venu de Paris. Et Emmanuel Macron n’a même pas eu un mot pour nos victimes sur les réseaux sociaux".

"Nous ne sommes pas des sous-victimes"

Alain Dariste, le grand-père de Léana, 2 ans et demi, la plus petite victime du drame de la promenade des Anglais, reste debout, un peu hagard, alors que de mini-engins roulants enlèvent, une à une, les barrières qui délimitaient le périmètre de sécurité de la cérémonie. "On sombre dans l’oubli", bredouille-t-il, ému. "J’ai l’impression d’assister à un oubli national. Nous ne sommes pas des sous-victimes", poursuit Alain Dariste. Rendre hommage aux victimes du 14 juillet 2016, comme à toutes les autres victimes d’attentat, dit-il, est "un devoir de la nation entière".