Depuis vendredi, trois attaques ciblant des infrastructures électriques ont été recensées entre le Var et les Alpes-Maritimes: un poste électrique incendié dans l’usine RTE de Tanneron, un pylône scié à Villeneuve-Loubet, et un transformateur réduit en cendres à Nice. Action coordonnée ou acte de malveillance isolée? L’enquête se poursuit.
Alain Bauer, professeur de criminologie au Conservatoire National des Arts et Métiers et auteur - entre autres - des ouvrages Opération Zelensky et Menace sur Taïwan parus en mai, livre son analyse sur ces événements inquiétants.
Qui pourraient être les auteurs de ce type de sabotage? Un groupe organisé ou des profils isolés?
En général, les profils de ceux qui attaquent des infrastructures électriques ou de communication sont essentiellement "politiques", avec des revendications spécifiques contre l’État, les entreprises ou l’écologisme dit "radical". Plus récemment, la guerre menée par la Russie en Ukraine a permis de constater une multiplication d’opérations contre les câbles ou les réseaux de communication, les usines d’armements ou les dépôts de munitions et des infrastructures importantes. Je raconte les dessous de ses sujets dans mes derniers livres.
Ces groupes peuvent-ils être instrumentalisés par d’autres pays?
Bien sûr. Il y a de plus en plus de sous-traitance par des États, mais aussi des groupes criminels. L’ubérisation se développe massivement.
Ces attaques peuvent-elles s’inscrire dans une logique de protestation écologique, en lien avec des événements décriés comme le Festival de Cannes ou le Grand Prix de Monaco?
C’est une possibilité. Les actions de ce type sont nombreuses contre des projets nouveaux. En revanche, c’est plus rare quand il s’agit d’infrastructures anciennes, et moins ciblées.
Peut-on parler de terrorisme dans ce cas?
Il n’y a pas de diction du terrorisme, et le terme est galvaudé. Pour ce qui me concerne, tant qu’il n’y a pas une volonté d’attenter à la vie humaine, il s’agit d’un acte criminel, mais rien de plus.
Les pouvoirs publics ont-ils pris la mesure de ce type de menace?
Faiblement. Comme pour le terrorisme, le risque de conflit militaire, le narcotrafic ou encore les ingérences étrangères, l’État écoute peu et réagit lentement, alors même que les agents de terrain et les experts multiplient les alertes.
Doit-on craindre une montée en puissance de ces attaques?
Oui. Il y a des effets d’organisation (une même équipe qui a prévu une série d’attaques) ou de copie (la relative facilité de commission crée des vocations).
Comment mieux sécuriser ces infrastructures?
Il faut repenser la sécurité en intégrant trois niveaux: la périphérie (des alarmes pour détecter les menaces à distance), le périmètre (sécurisation directe autour de la cible), et le compartimentage (limiter les dégâts en isolant les parties du réseau). Cela impose une réflexion approfondie sur la redondance et la résilience du système.
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