Les universités tirent la sonnette d’alarme. Si l’État, dans son projet de loi de finances 2025, ne rogne pas sur leur budget, leurs besoins comme leurs charges augmentent. Depuis des années elles font le maximum pour remplir leur mission avec des moyens de plus en plus réduits. D’autant qu’elles ne peuvent pas emprunter, s’endetter.
En chiffres, à l’université de Toulon, cela se traduit par un budget de 110 millions d’euros et, pour la première fois, un déficit de 180.000 euros en 2023. Il sera d’un million en 2024 et le budget 2025 est construit avec un déficit de deux millions.
L’État se désengage
"Nous avons la charge de l’entretien de nos bâtiments, qui coûte cher en investissement, de même que les équipements en recherche. On a subi comme tout le monde les tarifs de l’énergie qui ont explosé", explique Yusuf Kocoglu, vice-président du conseil d’administration en charge des moyens et du pilotage. "Par ailleurs, on nous annonce une subvention à hauteur de l’année précédente, et dans le même temps, on continue d’assumer des décisions du gouvernement, qui sort du principe décideur payeur, et qui ne sont plus, ou seulement partiellement, compensées, comme le glissement vieillesse technicité, l’augmentation du point d’indice (mesures Guerini), souligne Xavier Leroux, président de l’université de Toulon. On nous annonce que l’augmentation du CAS pensions (qui finance les retraites des fonctionnaires) ne sera pas compensée non plus. En 2025, la somme de ces mesures causera un déficit de 2,5 millions de masse salariale, soit l’équivalent de 25 postes d’enseignants-chercheurs".
Avec une dotation moyenne par étudiant de 6.500 euros, inchangée depuis 2013 et un nombre d’étudiants en hausse (de 10.500 à 12.000 ces dernières années), la présidence joue à l’équilibriste. "La dotation pour un élève en prépa c’est plus de 9.000 euros, compare Xavier Leroux. Dans les 6.500 euros par étudiant, il y a les actions d’enseignement, de recherche et de vie étudiante, car depuis la crise Covid, le gouvernement a basculé beaucoup de domaines (culture, santé…) sur les universités pour une dotation qui ne bouge pas".
Le recours grandissant aux contractuels
Avec responsabilité, l’institution fait tous les efforts possibles, économies d’énergie, rationalisation des dépenses, pour garantir des rentrées "dans des conditions plus que satisfaisantes, mais qui ne cessent de se dégrader". Cela va jusqu’au recours à des contractuels au détriment des titulaires, dans tous les métiers, y compris les enseignants.
"Mais cela a des limites, notamment avec la part consacrée à la recherche qui diminue progressivement alors que le gouvernement, à juste titre, nous rappelle que nous ne sommes pas assez compétitifs dans le domaine de la recherche au niveau mondial. Il y a une vraie incohérence aujourd’hui dans la situation à laquelle nous sommes confrontés" souligne le président.
La dynamique est forte aussi pour développer l’alternance, avec 710 étudiants alternants en 2023, 820 cette année. "Le résultat ce sont de meilleures conditions de travail et plus de chances d’aller vers l’emploi. C’est bénéfique pour la jeunesse et les employeurs. Mais on a besoin d’une continuité dans la politique publique voulue par l’État" ajoute Xavier Leroux.
Sans noircir le tableau, les deux hommes estiment que la situation des universités va se rapprocher de celle des urgences: "On ne sera plus en capacité d’assumer la formation intellectuelle et personnelle de toute une jeunesse qui, en plus, a vécu les années Covid. C’est grave, s’inquiète le président de l’université. Il y a d’autres choix politiques à faire. La formation de la jeunesse est prioritaire".
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