"C’est impressionnant d’être avec tous les ensembles": ces 4 militaires varois et azuréens défilent à Paris pour le 14-Juillet, nous les avons rencontrés

Parmi les 7.000 soldats, policiers, gendarmes et pompiers qui défilent ce lundi matin à Paris, coups de projecteur sur deux Maralpins et deux Varois.

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Vincent Wattecamps, Olivier Bouisson, Estelle Solari, Alexandre Ori Publié le 14/07/2025 à 04:14, mis à jour le 14/07/2025 à 16:08
Tout devait donc être sous contrôle ce matin pour lancer le grand défilé qu’ouvrira la nation invitée: l’Indonésie. Dans la foulée, soldats, policiers, gendarmes et pompiers incarneront les défilés à pied, aériens (63 avions et 34hélicoptères à travers 19 tableaux), motorisés et montés. Photo: AFP

C’est un rituel immuable depuis 1880. Pour commémorer la prise de la Bastille de 1789 et la première Fête de la Fédération de 1790, les Français voient la vie en bleu, blanc, rouge tous les 14 juillet.

Et pour glorifier le sentiment d’appartenance à la Nation, les militaires paradent à Paris, sur l’avenue des Champs-Élysées, saluant le chef des Armées et accessoirement de l’État. Ils seront près de 7.000 cette année à défiler devant Emmanuel Macron de 10 à 12 heures.

La plus belle avenue du monde sera, comme d’habitude, sous haute surveillance. Cette année, elle l’a été plus tôt que prévu.

Les quelque 11.500 effectifs des forces de l’ordre mobilisés à Paris ont été activés dès hier soir à partir de 19 heures dans le cadre de la finale PSG-Chelsea du Mondial des clubs de foot.

Policiers, gendarmes et pompiers ont été déployés "spécifiquement autour de l’avenue des Champs-Élysées, sur laquelle les équipements nécessaires à la cérémonie nationale du 14-Juillet ont été installés" et où aucun rassemblement n’était toléré, a prévenu la préfecture de police.

Tout devait donc être sous contrôle ce matin pour lancer le grand défilé qu’ouvrira la nation invitée: l’Indonésie. Dans la foulée, soldats, policiers, gendarmes et pompiers incarneront les défilés à pied, aériens (63 avions et 34hélicoptères à travers 19 tableaux), motorisés et montés.

Parmi eux, deux Maralpins et deux Varois auront l’honneur de défiler pour la première fois: le douanier à moto Émilien, basé à Fréjus, l’ingénieure en chef Stéphanie de la direction générale de l’Armement, à Toulon.

Stéphanie, ingénieure en chef à la DGA Techniques navales à Toulon, samedi, lors des répétitions générales du 14-Juillet, à Versailles (Yvelines). Photo ministère des Armées.

Stéphanie, ingénieure en chef de l’armement

Elle a marché au pas toute la semaine du côté de Satory, un quartier de Versailles (Yvelines) où tous les détachements ont inlassablement répété le défilé du 14-Juillet.

L’ingénieure en chef Stéphanie, basée depuis sept ans à Toulon sur le site "Techniques navales" de la direction générale de l’Armement (DGA), va vivre son premier défilé.

Une étape importante dans la vie de cette militaire de carrière, originaire d’Annecy (Haute-Savoie): "C’est un moment emblématique pour la Nation. C’est une grande fierté pour moi et ma famille ", avouait-elle samedi par téléphone.

Et pour que la fierté ne soit entachée d’aucun court-circuit, il a fallu travailler d’arrache-pied. "Défiler avec une épée, c’est complètement nouveau pour moi ": Stéphanie a donc eu droit à deux semaines d’entraînement dans le Var. Pour apprendre à marcher au pas, en ordre serré. Puis une semaine complète à Versailles, qui a la particularité de proposer une longue ligne droite.

C’est là que toutes les unités défilantes ont été réunies toute la semaine dernière. En tout, 5.613 femmes et hommes venus de toutes les composantes de l’Armée. Leur journée type? Quartier libre le matin, repas vers 11 heures, transfert d’une heure en bus vers Satory et à partir de 13 heures, répétitions jusqu’en fin d’après-midi.

Répétition à l’aube sur les Champs-Élysées

Vendredi, à l’aube, les militaires ont aussi investi les Champs-Élysées à l’abri des regards des Parisiens encore endormis. Un passage à blanc entamé dès 5h30 pour la seule répétition grandeur nature.

"La pression monte. C’est impressionnant d’être avec tous les ensembles. On a bien travaillé, on peaufine les détails ", se félicite l’ingénieure toulonnaise. 78 militaires de la DGA défileront (1), représentant les dix-huit sites répartis dans le pays. À leur tête, Claire, une collègue de Toulon, ingénieure en chef de l’armement, qui aura le privilège de mener le détachement.

"Cela ne fait que trois ans que la DGA participe au défilé militaire du 14-Juillet à Paris. Aucun de nous n’est habitué à défiler. Toute la difficulté consiste donc à créer de la cohésion pour que notre passage sur les Champs-Élysées soit réussi", disait-elle le 28 juin dans Var-matin. " Un esprit collectif et de franche camaraderie s’est formé entre nous, toute la semaine ", confirme Stéphanie.

Dans son domaine, l’ingénieure en chef amène les systèmes de défense à leur plus haut degré d’excellence. Ce lundi, elle devra en faire de même avec sa foulée et son épée. "L’émotion sera là, c’est sûr…"

(1) Les personnels sélectionnés sont des ingénieurs de l’armement, des études et techniques de l’armement et des commissaires d’ancrage armement.

 

Émilien, motard de la douane, en poste à Fréjus. Photo direction générale des douanes et droits indirects.

Émilien, motocycliste des douanes

Le sang-froid est la principale qualité requise chez un motocycliste des douanes. Pourtant, Émilien le sait déjà: son cœur battra la chamade ce lundi matin au moment de défiler sur les Champs-Élysées au guidon de sa Yamaha FJR 1.300. Le moment sera "historique" à plus d’un titre. Pour lui mais aussi pour l’institution.

Depuis 2016 et après une absence de presque un siècle (alors que ses agents se sont particulièrement illustrés en temps de guerre depuis l’époque napoléonienne), la douane fera défiler un bataillon sur la plus belle avenue du monde. Mais ce sera la première fois qu’une unité motocycliste y participera. "Il ne faudra donc pas se rater si on veut que nos camarades puissent revenir les années suivantes, sourit le Bourguignon de 31 ans, en poste à Fréjus depuis 2020. Notre copie doit être irréprochable."

C’est pourquoi, depuis le 30 juin, la trentaine de douaniers retenus après une sélection nationale s’est entraînée en Charente-Maritime, à l’École nationale des douanes, à La Rochelle, et sur la base aérienne de Rochefort avant de "monter" à Paris pour les derniers réglages.

"Le plus important et le plus difficile est de garder l’alignement, confie le motard fréjusien. Il faut rester dans sa colonne et dans sa ligne, y compris dans les virages. Le but est qu’on ne voit qu’une seule tête au moment du passage." Et à toute petite vitesse, "15km/h environ", avec une machine pesant près de 300kg. "Mais la moto est maniable, même à cette allure. Elle reste droite. Ça devrait aller."

En mémoire d’un camarade

Émilien défilera également au nom de son ami et collègue Nicolas Voinson, décédé à 37 ans dans l’exercice de ses fonctions en juillet 2024 sur une autoroute entre Lille et Dunkerque (Nord). "J’ai fait mes premières armes avec lui, se souvient Émilien. Nous avions passé notre premier stage motard ensemble en 2019 et on s’entendait très bien. Il attendait la possibilité de défiler à moto avec impatience et aurait aimé en être. L’émotion de l’unité dans son ensemble, qui portera son nom à cette occasion, sera intense."

Cet accident rappelle les dangers du métier d’Émilien. Il a pour mission de procéder au rabattage des véhicules ciblés par un contrôle. "Et parfois, les conducteurs ne veulent pas, souligne le douanier. Donc il y a des courses-poursuites au milieu du flux de circulation avec des décisions à prendre dans un laps de temps très court."

Un sentiment de "liberté"

Ces shoots d’adrénaline côtoient un fort sentiment de "liberté". "Quand on aime faire de la moto, ce métier est idéal. On est en mouvement en permanence, il faut être véloce sur sa machine et avoir du flair." Car le motard des douanes peut procéder à des contrôles. Et ce n’est pas le boulot qui manque aux abords du péage du Capitou, sur l’A8, à hauteur de Fréjus. "C’est un axe très passant, avec des véhicules venant de toute l’Europe. Nous avons souvent de belles saisies entre les stupéfiants, le tabac et le blanchiment d’argent."

"Aussi loin que je me souvienne j’ai toujours voulu faire douanier. Petit, mes amis étaient des fils de gendarmes. Leurs parents évoquaient les douanes et l’idée est restée." Après un master 1 en droit, l’appel du terrain, Émilien passe et réussi le concours en 2016. Et c’est à l’intérieur de l’institution qu’il va développer "une passion" pour la moto. "Alors que je n’avais pas le permis et que personne dans ma famille n’est motard", rigole-t-il. Il se spécialise et intègre l’unité en 2019. À toute vitesse. Sauf, bien sûr, sur les Champs-Élysées ce lundi matin.

Alexis pilote d’hélicoptère originaire de Touët-sur-Var (Alpes-Maritimes). Photo A. B. A. B..

Alexis, chef de patrouille aérienne

Tout ce que Touët-sur-Var (Alpes-Maritimes) compte de paires d’yeux sera rivé sur les Champs-Élysées ce lundi matin. Plus précisément, sur le haut de l’écran, dans l’espoir d’apercevoir Alexis. L’enfant du pays défile pour la troisième fois. Mais dans les airs, cette année. Une ascension méritée autant que durement acquise.

La vie d’Alexis n’est pas un long fleuve tranquille. Après le décès de son père en 1998, sa mère l’élève seule, avec ses deux frères. Pour la rendre fière, il se surpasse. Bachelier, il rejoint l’école militaire d’Aix-en-Provence. Son premier défilé du 14-Juillet, Alexis y participe en 2011 comme élève du lycée militaire aixois. En 2018, il réitère sous la bannière de Saint-Cyr, école des officiers de l’Armée de terre basée dans le Morbihan. Comme une promesse, "Alexis parade tous les sept ans", raconte sa mère, pas peu fière.

Mais cette année, le Touëtois prend de la hauteur. Après une formation au pilotage à Dax (Landes), en 2019, Alexis se spécialise dans la conduite d’appareils d’armes au Cannet-des-Maures. Muté en 2022 à Pau (Pyrénées-Atlantiques), il enchaîne les missions au Sahel (Niger) et à Chypre (en Méditerranée orientale) avant de rejoindre l’aviation légère de l’armée de terre. Aujourd’hui capitaine, il est chef de patrouille sur hélicoptère NH-90 au 5e régiment d’hélicoptères de combat de Pau.

Ce lundi matin, il survolera Paris en NH-90. Un privilège qu’il partage avec trois autres pilotes seulement.

Humble, il ne recherche pas la lumière mais incite les jeunes du haut pays à rejoindre l’armée et servir la France. Comme lui qui a inspiré ses deux frères, l’un devenu gendarme, l’autre pompier. Pour le plus grand bonheur de leur mère, Touëtoise jusqu’au bout des ongles et qui leur répète souvent: "Aimer son pays, c’est d’abord aimer son village et son clocher."

Imane Ait el Himeur, ancienne policière municipale de Nice, défilera avec sa promotion de l’École nationale de police. Photo DGPN-SICoP/S. Sarfati.

Imane, élève gardien de la paix

Un cœur niçois, le 14 juillet, portera toujours le deuil des 86 victimes de l’attentat de la promenade des Anglais. Mais pourra-t-il, un jour, ressentir à nouveau toute cette joie, cette fierté qui accompagnent aussi cette Fête nationale? Imane l’espère. Ce matin, la Niçoise de 39 ans, élève gardien de la paix à Nîmes, défilera aux côtés de sa promotion de l’École nationale de police. Une vocation embrassée après avoir vu l’injustice et la violence "briser des gens qui n’aspiraient qu’à vivre paisiblement".

Il y a d’abord eu les "galères de Pasteur", son quartier d’enfance. "On s’y lève tôt pour aller travailler dur, pour aller étudier et s’offrir un meilleur lendemain. Mais sur le chemin, on voit des dealers qui terrorisent tout le monde et qui dégagent un salaire bien plus important." Au sein de l’association Paje (Pasteur avenir jeunesse), elle s’oppose à la fatalité, assure de la médiation de nuit avant de créer sa propre structure: Jeunesse en mouvement. "On a accompagné des gamins qui risquaient de plonger et des femmes violentées." Jusqu’à un 31 décembre et "des cocktails molotov sur la police", malgré la fête de quartier organisée pour canaliser tout le monde. "Premier déclic."

Le second viendra le 14 juillet 2016. Après avoir profité du feu d’artifice avec sa fille de 7 ans, la jeune femme est confrontée à l’innommable. De son impuissance face à l’horreur, elle puisera la volonté de rejoindre la police municipale de Nice, en 2019. "Avec l’uniforme, sous le drapeau, je pouvais mieux protéger mes concitoyens", estime celle qui patrouilla cinq ans dans le quartier de la gare. Méticuleuse et perspicace, elle se destine désormais à une carrière dans la police d’investigation. Mais avant, c’est dans un cantonnement de CRS à Chevilly-Larue (Val-de-Marne) qu’elle s’entraîne, depuis deux semaines, à marcher au pas, supervisée par des CRS. "J’emporte un bout de Nice à Paris. Alors je veux que tout soit parfait." Une façon de rendre hommage? "Chaque 14 juillet, je n’ai jamais réussi à rester sur la Côte. Mais je ne veux plus fuir. Si je ne célèbre pas ma Fête nationale, les terroristes auront gagné. Je m’y refuse. Alors sans rien oublier, je veux aller de l’avant après l’attentat, en marchant la tête haute."

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