"Une fois au sommet, il y a des larmes de joie": rencontre avec ce retraité qui a vaincu le col 342 fois le col de la Bonette

En 1975, Guy Moron tombe amoureux de l'Ubaye en regardant le Tour de France. Depuis, le cycliste amateur a fait sa vie à Jausiers. Histoire de gravir "le plus beau de tous les cols."

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Alexandre Ori Publié le 18/07/2024 à 20:45, mis à jour le 19/07/2024 à 15:32
Guy Moron au sommet de la boucle de la Bonette, toit du Tour de France 2024. Photo DR

La Bonette, mon amour. Amour passionnel, obsessionnel. Fou. Guy Moron l’est certainement. Mais c’est "sa vie", sa source de "bonheur".

En trente-huit ans, le cycliste amateur a vaincu le col à 342 reprises. Record certainement imbattu. Peut-être imbattable au vu de l’avance qu’il entretient encore et encore: "Cette année, j’ai décidé que j’allais y monter trente-huit fois, une ascension pour chaque année passée à Jausiers."

La résolution peut sembler démente. Surtout quand on entame ses 68 ans. Pas pour l’infatigable "Monsieur Bonette", comme l’appelle le petit village des Alpes-de-Haute-Provence. Là où il a fait construire sa maison, histoire de "s’échapper plus régulièrement" sur la plus "belle route du monde". Et bientôt le toit du Tour de France.

"La souffrance dans la beauté"

Culminant à 2.803mètres d’altitude, la boucle du col de la Bonette sera le toit de la compétition. "Son apothéose, là où le Tour peut se jouer", souffle Guy Moron, qui vibre déjà à l’idée d’assister à cette "étape maison", entre Embrun et Isola 2000, ce vendredi 19 juillet.

Avec ses 1.582mètres de dénivelé sur 24 kilomètres, l’ascension offre de beaux combats en perspective. "Comme à chaque fois que le Tour passe ici", frémit le passionné, submergé par les souvenirs.

Le voilà redevenu gamin, en 1975, 19 ans à peine, les yeux hallucinés face au franchissement du col d’Allos. Les paysages grandioses de l’Ubaye, les légendes Eddy Merckx et Bernard Thévenet en train de mordre leur guidon. "La souffrance dans la beauté."

Contraste bouleversant qui va changer la vie du jeune homme. Déjà acharné de vélo, il vient en vacances sur les traces de ses héros, découvre la Bonette et promet: "Un jour, je viendrai vivre ici."

Le Tour et la Bonette

Quand le Tour repasse en 1993, le rêve s’est réalisé. Guy Moron est aux premières loges pour assister au défi qu’impose la Bonette. L’épreuve sera la dernière de Laurent Fignon, déjà double vainqueur de la compétition. Il abandonnera dans la descente du col.

La route alpine verra aussi la France au sommet de sa forme. En 2008, Cyril Dessel et Sandy Casar triomphent du col et franchissent en premier la ligne d’arrivée à Jausiers.

"Chauvin et fier de l’être", Monsieur Bonette est aux anges. La victoire prend des accents personnels: le même jour, il célébrait la crémaillère de sa maison, fraîchement bâtie sur les pentes de la montagne sacrée.

Où une sacrée histoire attend encore l’édition 2024. Guy Moron va prendre sous son aile huit Mexicains pour s’attaquer aux cols de la vallée de l’Ubaye, en guise d’entraînement.

Ainsi, ceux qui ont été invités par l’Association des Cultures Franco-Mexicaines (ACFM) de Barcelonnette, seront-ils fin prêts à ouvrir la parade dans la ville, une heure avant le passage du Tour.

Commencera ensuite l’ascension, son lot d’incertitudes, "bien que Tadej Pogacar [coureur Slovène de 25 ans, numéro 1 mondial et deux fois vainqueur du tour, Ndlr] soit hors de danger", analyse le fan.

Pour qui "le véritable enjeu" réside dans l’altitude, "le manque d’oxygène" pouvant chambouler le classement. Au risque de finir la journée à bout de souffle. Idem côté spectateurs.

"Au sommet, il y a des larmes de joie"

Puis la course et sa fête fileront sur Nice pour une grande arrivée historique sur la promenade des Anglais dimanche.

Guy Moron retrouvera la quiétude de ses alpages, où bruissent les torrents et chantent les marmottes. Bien vite, il renfilera une autre de ses casquettes. Celle du fondateur et de l’instructeur du Club cycliste Ubaye. Le jeune espoir Calixte Laé, désormais coureur à Antibes, y a été formé. Trois cadets y sont aussi en plein rodage.

Au final, ce désir de former et de transmettre est peut-être le moteur d’une routine si extraordinaire. Familier défi un brin changé "par tous les nouveaux cyclistes qui auront vu la Bonette à la télé".

Le retraité ne manquera pas de les coacher, comme à son habitude: "Si je refais sans cesse ce col, c’est aussi pour aider des gens à le terminer une première fois. Souvent, ils sont sur le point d’arrêter. Mais une fois au sommet, il y a des larmes de joie."

Sur les traces du Tour, avec une vue imprenable sur les Alpes, en étant allé au bout de soi, tout là-haut, aux côtés de Monsieur Bonette, comment pourrait-il en être autrement?

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