La Principauté de Monaco lance un Plan national pour l’inclusion des personnes en situation de handicap

Le gouvernement princier a annoncé, ce mardi, le lancement d’une politique nationale pour l’inclusion des personnes en situation de handicap à Monaco. Voici la feuille de route.

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Thibaut Parat Publié le 06/12/2023 à 21:00, mis à jour le 07/12/2023 à 13:46
En Principauté de Monaco, 400 résidents ont le statut officiel et reconnu de personne handicapée. (Photos Jean-François Ottonello)

Un pacte national pour "être prêt". Prêt à recevoir, accueillir, comprendre, recruter, éduquer, former, travailler avec des personnes en situation de handicap. Aux côtés de toutes les strates de la société monégasque, le gouvernement princier aspire à changer les mentalités sur ce sujet, longtemps tabou et encore méconnu.

"Il faut faire connaître le handicap, lutter contre les clichés, faire tomber les préjugés, mener une politique pragmatique en lien avec l’ensemble des associations œuvrant dans ce domaine. Les nombreuses actions existantes ne suffisent pas. Il est temps de passer une nouvelle étape", a expliqué, ce mardi au Yacht-club, Christophe Robino, conseiller de gouvernenement-ministre des Affaires sociales et de la Santé, devant le Tout-Monaco.

Un vaste chantier qui nécessitait une politique publique d’inclusion s’appuyant sur deux textes législatifs fondateurs: la loi 1.410 de 2014 sur la protection, l’autonomie et la promotion des droits et libertés des personnes handicapées et la loi 1.441 de 2016 relative à l’accessibilité du cadre bâti.

Devenir "une terre d’excellence"

Autour de neuf thématiques (*), l’exécutif a dressé sa feuille de route sur cinq années et égrené diverses initiatives déjà lancées, comme la constitution d’un solide réseau en Principauté, l’utilisation de testeurs pour valider les travaux d’accessibilité, une campagne dans les commerces et restaurants, la mise en œuvre d’un GPS piéton collaboratif adapté aux principaux concernés. "C’est une action qui se veut volontaire, concertée, avec tous et pour tous", plaide Lionel Galfré, conseiller technique en charge des personnes en situation de handicap.

Fer de lance de ce Plan national depuis sa prise de fonctions en juin dernier, l’ancien directeur de l’IMSEE puis de MonacoTech est lui-même en situation de handicap. "J’y ai toujours été sensible mais ma vie n’était pas concernée, alors je passais à autre chose. Quand on comprend, on accepte…"

D’où l’importance capitale, à ses yeux, de l’éducation et de la formation ainsi que de la sensibilisation à la population. " L’objectif est de faire de Monaco une terre d’excellence en matière d’inclusion des handicaps, visibles ou invisibles. On a les moyens pour devenir une référence, martèle celui qui, à Sienne ou encore New York, a constaté à quel point la prise en compte du handicap est ancrée dans les mœurs. Monaco est un haut lieu de résidence, de travail et de tourisme. Tous ces gens vont parler de la Principauté…"

L’enjeu dépasse donc les simples frontières du pays.

"Penser à la société de demain"

En Principauté, 400 personnes ont le statut officiel et reconnu de personne handicapée. Mais la réalité est autre (lire ci-contre). "Il faut aussi penser à ce que sera la société de demain. Dans 20 ans, un quart de la population monégasque aura plus de 70 ans. Plus on vieillit, plus on a de difficultés et plus le handicap augmente", ajoute Lionel Galfré.

Outre l’étroit rapprochement en cours entre les personnes handicapées, les institutions, le tissu associatif et le milieu du travail, un nouveau logo "handicap" a été créé pour incarner cet élan collectif. Plus coloré, plus moderne. La nouvelle carte priorité handicapés a, elle aussi, été changée en Principauté. "Chacun d’entre nous doit être prêt", conclut Lionel Galfré.


* Sensibilisation de la population; Éducation et formation; Emploi et travail; Logement et construction; Mobilité et accessibilité; Accompagnement et prise en charge; Accès au sport, à la culture et aux loisirs; faire savoir ce qui existe et ce qui est fait; reconnaissance internationale.

Christophe Robino, conseiller de gouvernement-ministre des Affaires sociales et de la Santé. Photo Jean-François Ottonello.

Christophe Robino: "On veut changer le regard que l'on porte sur le handicap

Christophe Robino, conseiller de gouvernement-ministre des Affaires sociales et de la Santé, développe l’ambition, la philosophie et la stratégie portées par l’exécutif avec ce Plan.

À quelle échéance envisagez-vous l’aboutissement de ce plan?

Avec une certaine humilité, nous nous sommes donnés 5 ans pour réaliser tous les objectifs mais nous n’attendrons pas autant pour les mettre en œuvre. Ce plan nous a permis d’identifier un certain nombre de points devant conduire nos politiques, devant nous permettre d’améliorer la prise en charge du handicap, l’inclusion dans la vie de tous les jours. Les personnes handicapées sont des gens comme tout le monde et ils doivent pouvoir vivre normalement sans se poser la question de ce qu’ils peuvent faire, comment le faire et comment y aller. C’est notre plus grosse ambition.

Lionel Galfré était la personne idéale pour le porter?

Oui, c’est la personne idéale car il est enthousiaste et a une connaissance du handicap qui permet d’appréhender les conséquences de textes législatifs sur la vie de tous les jours, d’avoir un regard nouveau sur la question.

Quel budget sera alloué à ce plan?

Le budget est déjà très important. Plusieurs millions d’euros sont consacrés au handicap dans le cadre des différents dispositifs législatifs. Il faut apprendre à mieux les utiliser. Un exemple simple: avec le vote des lois 1.410 en 2014 et 1.441 de 2016, une aide financière avait été mise en place pour les chefs d’entreprise désireux d’aménager le poste de travail d’une personne handicapée. Aucune demande ne nous est parvenue car personne ne le sait, personne n’est allé relire la loi. Un grand travail doit être fait pour expliquer et communiquer sur tous les dispositifs déjà existants et financés.

Le Conseil national a annoncé élaborer une proposition de loi. Le gouvernement travaille-t-il sur un projet de loi en parallèle?

Non, car nous estimons que les deux lois et textes réglementaires couvrent l’ensemble des problématiques. Aujourd’hui, on porte une politique de rapprochement des gens, de vulgarisation de ce qu’est le handicap, d’accompagnement des gens. On veut changer le regard que l’on porte sur le handicap. Le Conseil national, en tant que colégislateur, a la possibilité de déposer des propositions de loi. Nous étudierons son contenu. S’il y a des choses à prendre, nous les prendrons.

Seriez-vous favorable à une politique d’obligation d’emplois de travailleurs handicapés dans le privé?

La politique des quotas est coercitive. Pour susciter l’adhésion des gens, il faut plutôt les convaincre que c’est une bonne chose et pas simplement leur dire : "Vous devez le faire".

Certains quartiers sont difficiles d’accès, notamment à l’Annonciade. Des aménagements vont-ils être réalisés?

Lionel Galfré a effectué un travail de rapprochement avec les services de Céline Caron-Dagioni, notamment de la DPUM. Un certain nombre de chantiers sont déjà en cours. Nous verrons ce qu’il faut faire pour apporter notre contribution à l’amélioration des plans d’accessibilité, au travers d’applications mais aussi d’aménagements. Des choses très simples peuvent être mises en place, comme ces passerelles que l’on déploie à l’entrée d’un magasin pour franchir des marches.

Que dit la loi pour l’accessibilité dans les commerces et restaurants?

Dans la loi 1.441 de 2016, il y a l’obligation de se mettre en conformité sauf impossibilité technique évidente. Je le redis, des solutions simples peuvent se substituer à de gros travaux pour améliorer cette accessibilité. Tout ce qui permettra de faciliter cet accès sera étudié et promu par le gouvernement.

Le chiffre

400

C’est le nombre de résidents de Monaco avec le statut officiel et reconnu de personne handicapée. Un chiffre plus conséquent, en réalité. "Énormément de personnes, qui ont des difficultés au quotidien, n’ont pas ce statut car leur handicap est insuffisant. Certaines personnes, par pudeur ou par peur des conséquences dans la vie de tous les jours, se refusent à se déclarer. C’est aussi vers eux que l’on doit se tourner", insiste Christophe Robino, conseiller de gouvernement-ministre des Affaires sociales et de la Santé.

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