Bijouterie Turk: la bataille des témoins fait rage
Témoins à charge ou décharge, ils étaient censés hier aider la cour et les jurés à juger Ramzi Khachroub, accusé du braquage de la bijouterie Turk. La vérité surgira-t-elle de certains mensonges ?
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Christophe PerrinPublié le 27/04/2016 à 05:16, mis à jour le 27/04/2016 à 05:16
Lors de la reconstitution du braquage de la bijouterie La Turquoise, rue d’Angleterre
Photo Jean-François Ottonello
Où se trouvait Ramzi Khachroub, 22 ans, le 11 septembre 2013, à 8 h 45, au moment du braquage de la bijouterie La Turquoise à Nice ? La police judiciaire niçoise reste persuadée qu'il accompagnait Antony Asli, 19 ans, tué par Stephan Turk. Ils pensent qu'il s'agit du second braqueur casqué filmé en train de frapper le commerçant avant de le dévaliser. Les enquêteurs ont la conviction que ce jeune homme pilotait le scooter volé quand son passager a été mortellement blessé.
Le scooter a été découvert aspergé d'eau de javel. « Plus discret que le feu pour effacer les traces », a précisé lundi un enquêteur de la BRB. Sur le bidon de javel, l'ADN de l'accusé a été retrouvé. La PJ croit rarement aux coïncidences.
Les témoins, qui se sont succédé à la barre mardi ont tous prêté serment, juré de dire la vérité, toute la vérité. La plupart sont convaincus de l'innocence de l'accusé. Quitte à forcer le trait ?
Ramzi Khachroub affirme que le jour des faits, il dormait chez sa petite amie Kelly à Carros. Il s'est levé vers 9 h 30. A 10 heures, il serait allé à l'auto-école puis chez Mathilde, une amie. Kelly le dit d'emblée à la barre : « Il était avec moi. Il est innocent. » Le président Benoît Delaunay s'étonne : « Lors de votre première audition, vous ne vous souveniez pas. Puis vous donnez beaucoup de détails lors de votre deuxième audition… »
Autre curiosité : la même jeune fille avait déclaré que Ramzi ne possédait pas de portable. Avant de fournir une facture détaillée pour démontrer qu'à 10 h 25, le jour fatidique, elle l'avait appelé.
« Déclarations pas crédibles »
Mathilde, amie du couple, affirme à son tour avec beaucoup d'assurance que Kelly et son ami Ramzi étaient chez elle en fin de matinée le 11 septembre. Là encore, le témoin fournit d'étonnants détails mais à la seconde audition. L'avocate générale Clotilde Galy lui dit comme elle le pense : « Vos déclarations ne paraissent pas crédibles. »
La gérante de l'auto-école, elle, ne peut confirmer l'alibi du Khachroub.
Mohamed, ami d'enfance de l'accusé, est plus affirmatif : « Ramzi n'a rien à voir dans cette affaire. » Question d'un juré : « Ramzi est-il gaucher ou droitier ? » « Gaucher » répond sans hésiter le témoin alors que depuis lundi les proches affirment qu'il est droitier ou ambidextre.
« Ma mère est mythomane »
Vanessa, témoin à charge, met une pierre dans le jardin de la défense : « Dans un kebab, (ndlr : presque en face de la bijouterie) j'ai vu les deux jeunes hommes un ou deux jours avant les faits. Le jeune homme dans le box avait une crosse dans son dos qui dépassait du pantalon. » Le président suggère : « Regardez-le bien. » « C'était bien lui au kebab… confirme le témoin. Cela ne veut pas dire que c'était le jeune qui était au braquage. À l'époque, j'ai vu la photo du jeune Asli dans Nice-Matin et j'ai appelé la police municipale. »
Me Frédéric Hentz, l'avocat de la défense, souligne les contradictions de Vanessa, évoque « une histoire à dormir debout, un méli-mélo. » La propre fille du témoin est incrédule : « Ma mère est malade, c'est une mythomane, elle se raconte des histoires. »
Entre la mémoire défaillante des uns, les autres qui fuient la justice pour éviter de témoigner, difficile d'y voir clair. Une deuxième journée pour rien ? La Cour appréciera, selon la formule consacrée.
Le bijoutier : « Soit moi soit lui »
Stephan Turk, le bijoutier.Dix-huit ans de labeur réduit à néant.
Photo Cyril Dodergny.
Dans un Français haché, Stephan Turk, solide sexagénaire, cravate et costume brun, moustache sévère, a tenté de décrire son agression devant les jurés, anticipant le procès qui l'attend, l'an prochain, pour répondre d'homicide volontaire.
« Les deux m'ont frappé. L'un m'a donné un coup au cœur, il a essayé de me tuer, heureusement je ne suis pas mort », confie-t-il.
« A la sortie, je prends le pistolet pour récupérer mes affaires » (un butin de 124.000 euros jamais retrouvé).
Sur les images vidéo de sa boutique, on l'aperçoit, arme au poing, s'accroupir, méfiant, et passer sous le rideau métallique dans le sillage des braqueurs. « C'est soit lui, soit moi », commente-t-il à propos du jeune homme qu'il a abattu.
Antony Asli, 19 ans (et non 17 comme il est écrit dans l'ordonnance de renvoi), est mort d'une balle dans l'omoplate.
Le joaillier plaide la légitime défense, lui qui avait fui la guerre du Liban et s'était exilé à Nice dans les années 80 pour protéger sa famille.
« En deux minutes, deux individus ont ruiné dix-huit ans de labeur », note Me Djendel Yassen, l'un de ses avocats.
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