Patrimoine: connaissez-vous la légende de ce célèbre site varois?

Outre ses ruines et son histoire reconstituées grâce à de nombreuses et minutieuses recherches archéologiques, l’Abbatia Sancti Petri de Almanarra a légué à la postérité une incroyable légende.

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Nelly Nussbaum Publié le 13/09/2025 à 11:00, mis à jour le 13/09/2025 à 11:00
Restitution à l’aquarelle de l’abbaye Saint-Pierre de l’Almanarre dans son environnement naturel. Illustration J.-M. Gassend/ IRAA- 2013
Le nom "Almanarre" aurait pour origine un toponyme arabe "al Manara" signifiant le phare. Une étymologie qui, bien que longtemps controversée, est aujourd’hui acceptée. Photo J.-M. Gassend, IRAA- 2013.

L’abbaye Saint-Pierre de l’Almanarre est fondée le 13 mars 1221 en lieu et place du monastère bénédictin Saint-Gervais de Fos, lui-même fondé en 989 sur les ruines de l’antique Olbia. Fermé en 1220 par décision du Pape à la suite de dérèglements, le monastère Saint-Gervais devenu l’abbaye Saint-Pierre de l’Almanarre est affecté à des moniales cisterciennes (ordre de Cîteaux) qui y résideront près de 200 ans. En 1250, le Pape Innocent IV prend, par une bulle pontificale (document scellé par lequel le pape signifie une décision juridique), l’abbaye sous sa protection et confirme tous ses biens, permettant ainsi d’en connaître l’importance.

Les moniales étaient souvent des filles de familles nobles attirées par la rigueur de la règle et le prestige de l’ordre cistercien. Elles faisaient vœu de pauvreté, d’obéissance et de chasteté. L’effectif de l’abbaye, de douze à ses débuts, passera à trente-deux un siècle plus tard. Il y règne alors organisation interne hiérarchisée avec abbesse, prieure, sous-prieure, sacristine, cheffe des chœurs, sous-cheffe des chœurs et des religieuses aux différents travaux. À leur côté, des religieux ainsi que des laïcs prennent part à la gestion de l’abbaye comme syndic ou économe. Il semble que cet effectif fut à peu près constant pendant toute la période de stabilité, soit environ jusqu’au milieu du XIVe siècle. Puis, lorsque la fin du XIVe siècle engendre désordres, dangers et malheurs, les religieuses quittent le rivage pour se réfugier à l’intérieur de l’enceinte de la ville d’Hyères au sein du monastère Saint-Bernard.

Après deux siècles de turbulences, de crises spirituelle et temporelle graves au XVIe siècle, les moniales de l’ex-Saint-Pierre de l’Almanarre n’étaient plus qu’une dizaine. Elles ont subsisté jusqu’à la destruction de Saint-Bernard en 1793. Les possessions des nonnes sont alors déclarées Biens Nationaux et vendus. Par la suite, les terres devenues parcelles agricoles et les quelques élévations de l’église abbatiale préservées sont rachetées par l’État en 1955.

Des recherches archéologiques poussées

Des documents de l’archéologue Jacques Coupry en 1960 décrivent précisément la topographie et l’architecture de l’abbaye, ainsi que le lieu où elle se situait. Selon le chercheur, l’installation des moniales impulse une campagne de construction notamment l’agrandissement de l’église. Les fouilles vont prouver que celle-ci avec dépendances, maisons, jardins, vignes et salines, se déployait sur le territoire d’Hyères et des lieux-dits Fennulum (le Fenouillet), Roketta (la Roquette), Ayronis (Rouveirone) et Brumetta (Bormettes).

D’autres fouilles en 1990/1991 ont concerné le cimetière où ont été découvertes de nombreuses tombes d’époque médiévale, 175 inhumations pleine terre, 90 coffrages de pierres, 2 sarcophages monolithes remontant à l’Antiquité Tardive ou au Haut Moyen Âge, 5 caveaux et 64 réductions. La diversité de population enterrée prouve qu’il ne s’agissait pas d’un cimetière réservé aux seules moniales. Les tombes de ces dernières étaient sans doute rassemblées au chevet de l’église, car c’est à cet endroit qu’ont été trouvés trois anneaux d’abbesse en or. Aujourd’hui, de l’abbaye Saint-Pierre de l’Almanarre il ne reste que des ruines sur lesquelles s’écrit son histoire.

Sources : documents de Hyères Patrimoine Saint-Pierre de l’Almanarre, Une abbaye de femmes ; l’ouvrage d’Alphonse Denis, Hyères ancien et moderne (1880).

Les vestiges de l’abbaye Saint-Pierre de l’Almanarre se situent sur la commune d’Hyères en bordure de mer, sur les ruines de l’antique Olbia. photo Ville de Hyères

La terrible légende du fantôme de la mère abbesse

La tradition populaire raconte qu’un jour, alors que le couvent était attaqué par les Sarrasins, les religieuses ont fortement sonné la cloche d’alerte. Mais personne ne vint à leur secours à cause d’une fausse alerte survenue antérieurement. En effet, quelques mois plus tôt, une jeune abbesse eut la singulière idée de mettre à l’épreuve courage et bonne volonté des villageois en faisant sonner, sans sujet, la cloche du couvent.

Croyant l’abbaye menacée, les hommes se hâtèrent de s’y porter en armes pour ne trouver que calme et tranquillité. Aussi lorsqu’en ce jour de véritable danger, les moniales sonnent fortement la cloche d’alarme pour appeler à l’aide, les sauveteurs dupés une première fois restèrent chez eux, laissant libre passage aux barbares.

Il se dit que pour se rendre hideuses, croyant ainsi éviter d’être violées, les nonnes se sont coupé le nez. Une mutilation collective qui n’arrêta pas les Sarrasins. Ils violèrent les nonnes et incendièrent le bâtiment. Seules sept religieuses purent s’échapper. La légende ajoute encore que les soirs d’orage, le fantôme torturé de la mère abbesse hante les ruines du monastère.

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