Officiellement les noms des candidats au rachat des parts que détient l'État (66%) dans les aéroports de Nice, Cannes et Saint-Tropez, sont "top secret". Les rares destinataires des candidatures ont dû signer des lettres de confidentialité.
Pour autant Christian Estrosi, président du conseil régional et de la Métropole niçoise, deux collectivités actionnaires minoritaires de la société aéroportuaire, croit savoir qu'une "puissance étrangère" est sur les rangs.
Le groupe turc Limak, dirigé par le milliardaire Nihat Özdemir, aurait fait une offre plus que généreuse afin de s'offrir le deuxième aéroport de France.
Pour Christian Estrosi, "alors que nous sommes en état d'urgence, en état de guerre même, c'est tout simplement inadmissible de permettre à une puissance étrangère de s'emparer d'un tel outil stratégique pour la Côte d'Azur".
L'ancien maire de Nice annonce qu'il opposera son veto au candidat turc. Et qu'il utilisera de "tous les moyens juridiques" pour l'empêcher d'arriver à ses fins.
Une fortune estimée à 1,3 milliard de dollars
A 66 ans Nihat Özdemir a bâti un empire. Cet homme d'affaires turc a fait son entrée en 2011 dans le célèbre classement Forbes des hommes les plus riches du monde.
Selon le magazine américain, au cours de l'année écoulée, la fortune personnelle de Nihat Özdemir serait même passée de 900 millions à 1,3 milliard de dollars!
Limak, le groupe fondé en 1976 par ce magnat turc que l'on dit proche du président Erdogan, ne connaît manifestement pas la crise.
Spécialisé dans le BTP, ce conglomérat a largement diversifié ses activités. Notamment dans le tourisme. Limak n'a pas seulement créé sa chaîne d'hôtels de luxe et sa propre compagnie de jets privés, le groupe s'est aussi lancé dans la construction d'aéroports.
Le futur méga-aéroport d'Istanbul d'une capacité de 150 millions de passagers par an, mais aussi celui de Dakar, en cours d'achèvement, du Caire ou encore de Rostov en Russie qui doit être livré en 2018 pour la coupe du monde de football.
De là à gérer directement ces plateformes aéroportuaires il y a un pas que le groupe Limak a déjà franchi, à Pristina au Kosovo et bien sûr en Turquie où il est actionnaire du troisième aéroport du pays.
Nihat Özdemir convoiterait donc désormais l'aéroport de Nice. Et pour cela il serait prêt à payer rubis sur l'ongle.
Selon nos confrères de Challenge, l'homme d'affaires turc aurait fait une offre largement supérieure à celle de ses concurrents qui ont estimé la valeur du second aéroport français à 13 ou 14 fois son résultat d'exploitation, soit environ 1,5 milliard d'euros.
Le groupe turc serait quant à lui prêt à mettre deux milliards sur la table. Ce qui en ferait le mieux disant.
"J'attaquerai l'État pour spoliation"
Mais, pour Christian Estrosi, "peu importe le montant". L'élu azuréen promet que "ça ne se jouera pas sur le seul aspect financier, mais sur la qualité de l'offre".
Or à ses yeux, celle du candidat turc serait loin d'être la meilleure. "Je serai attentif à ce que le gouverne ment retienne un candidat qui possède déjà des intérêts économiques dans la région. Parce que cet aéroport a pour vocation de défendre l'aménagement et le développement de ce territoire. Or seul un conglomérat qui y possède lui-même des intérêts est susceptible de le faire."
"Je veux que cet aéroport demeure plus niçois que turc, saoudien ou qatari ou même parisien", martèle Christian Estrosi qui rappelle que ce n'est pas la première fois qu'il "s'oppose publiquement à une offre". Aéroport de Paris qui gère Orly et Roissy avait d'ailleurs finalement renoncé à candidater.
Il y a toutefois peu de chance que le groupe Limak capitule à son tour. Le président de la métropole niçoise annonce qu'il utilisera alors son "droit de veto".
Les collectivités locales, actionnaires minoritaires de l'aéroport, ont en effet obtenu, au terme d'un bras de fer avec le gouvernement, de pouvoir être consultées sur cet appel d'offres. Mais le ministre de l'Économie, Emmanuel Macron, a également rappelé qu'in fine le choix appartiendrait à l'État.
Si tel devait être le cas, Christian Estrosi annonce qu'il usera "de tous les moyens juridiques pour bloquer une décision qui irait à l'encontre des intérêts azuréens". Et non des moindres: "S'il le faut j'irai devant la Cour européenne pour attaquer la spoliation par ce gouvernement d'un bien public qui, rappelle-t-il, a été financé et valorisé par l'argent des contribuables niçois."
Sans attendre que le repreneur soit désigné dans le courant de l'été, Christian Estrosi prévient qu'il va d'ores et déjà "saisir Tracfin", les gendarmes financiers français, "pour qu'ils enquêtent".
Le nom du magnat turc avait en effet été mêlé à une affaire de corruption en 2013 qui n'a toutefois pas donné lieu à des poursuites à son encontre.
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