Nicolas Baldassi est professeur en histoire contemporaine à l’Institut d’études politique d’Aix-en-Provence, spécialiste en politique étrangère des Etats-Unis.
Que vous inspire les résultats des élections aux Etats-Unis?
L’élection opposait deux visions du monde. La vision libérale de Kamala Harris: le multilatéralisme, le soutien aux alliés et privilégier la négociation à la force. Et la vision isolationniste de Trump. Traditionnellement, avant 1945, les Américains étaient isolationnistes. Trump rêve de revenir à ça.
Quel est l’impact du retour de Trump à la Maison blanche sur la guerre en Ukraine?
Trump a annoncé à plusieurs reprises qu’il allait y mettre fin en 24 heures en négociant avec Poutine, puisqu’il partage une vision du monde qui est parallèle. Le droit international, le multilatéralisme, le viol des frontières, etc., il s’assoit dessus. Il l’a bien démontré. Et il risque de donner à Poutine ce qu’il veut: une partie de l’Ukraine, on gèle la question du Donbass, on le donne aux Russes, et on arrête la guerre. Ainsi, les Américains cesseront de donner des armes aux Ukrainiens.
Et sur le conflit au Moyen-Orient?
Trump a clairement dit qu’il allait soutenir fermement la politique israélienne. Il est très proche du Premier ministre Netanyahou, des Israéliens et les pousse à aller jusqu’au bout dans leur logique d’affrontement contre le Hezbollah, contre le Hamas, contre l’Iran. Le risque étant notamment un face-à-face réel avec l’Iran et pourquoi pas une intervention israélienne soutenue par les États-Unis vis-à-vis de l’Iran que Trump rêve de faire tomber déjà depuis son premier mandat.
Quelles sont les conséquences sur l’OTAN?
Trump va remettre sur le tapis la question de la participation des États-Unis à l’OTAN. Il a déjà annoncé la couleur. Heureusement, il y a une loi qui a été votée par le Congrès américain en décembre 2023 qui est censée empêcher une décision unilatérale du président des États-Unis pour le retrait des États-Unis de l’OTAN. Ce serait catastrophique pour l’Europe, parce que tout notre système de sécurité, le parapluie nucléaire, les infrastructures dépendent des États-Unis.
Faut-il s’attendre à des relations tendues entre la France et les Etats-Unis?
Oui avec le sujet de l’OTAN, et de la coopération militaire, qui va être remis sur la table. Macron étant plutôt engagé politiquement dans le soutien à l’Ukraine, il risque d’y avoir des soubresauts en matière de stratégie commune vis-à-vis de l’Europe. Pareil sur le Moyen-Orient. Pareil sur l’industrie d’armement, puisque Trump souhaite accélérer les ventes d’armes aux pays d’Europe. Ça pose le problème de la concurrence avec les industries françaises. Autre sujet, c’est la Chine. Trump veut augmenter de 100% tous les droits de douane sur les produits chinois. De fait, la Chine risque de réorienter son commerce vers le reste du monde, dont l’Europe. Le marché français risque d’être victime d’une déferlante de produits chinois de basse qualité.
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