Dès la sortie de Saint-Vallier-de-Thiey, les gouttes qui commencent à perler à mon front répondent en écho à celles, énormes, en train de s’abattre sur le pare-brise de ma monture. Aussi fébriles que les essuie-glaces qui battent la chamade, mes doigts XXS se crispent sur le volant à jante épaisse. À l’approche de chaque courbe, ma main droite malmène le gros pommeau de la boîte manuelle aux verrouillages aussi fermes que précis. Bousculé par les ruades de ce bon vieux V8 atmosphérique de 453 ch dont les envolées sonnent comme autant de coups de tonnerre, le train arrière de cette propulsion à l’ancienne ne demande qu’à se faire la malle entre les lacets et les virages serrés d’une route étroite transformée en patinoire. Bienvenue à bord de la nouvelle Ford Mustang Dark Horse, version sombre de l’emblématique Pony Car.
Digne de ses illustres aînées, la Mustang 2025 reste une auto sans concession. Thermique jusqu’aux bout des jantes, joueuse quand il le faut, bestiale à l’occasion. Un cheval sauvage qui continue à galoper comme si de rien n’était à une époque où les autos sont standardisées, les sensations aseptisées et le plaisir de conduite relégué au rang des souvenirs. Sans complexes, fière de son dernier lifting qui muscle sa silhouette tout en affinant certains de ses traits, la Mustang est une sexagénaire épanouie. La digne héritière d’une lignée d’exception, symbole du rêve automobile américain.
Toujours en cours d’écriture grâce au succès de ses modèles successifs, l’histoire de la Mustang a débuté la même année que celle de la Porsche 911, autre icône vivante. En moins de dix ans, le succès de la Pony Car a tout écrasé. Entre 1964 et 1973, Ford en écoulera plus de trois millions d’exemplaires. Les trois décennies suivantes seront plus inégales. Moins réussies, moins sportives et moins populaires, les nouvelles Mustang n’arriveront pas à la cheville du modèle originel.
Condamnée par un malus délirant
Il faudra attendre 2005 et la sortie de la sixième génération pour voir à nouveau les yeux des fans pétiller. Inspirée des fastback des années 1960, la nouvelle Mustang reprend les éléments stylistiques qui ont fait le succès de son aînée et retrouve la personnalité qui manquait aux pâles copies des années 1980 et 1990. La réussite commerciale est immédiate et la carrière de la belle relancée. Neuf ans plus tard, la Mustang 7 poursuit la même philosophie: une auto exclusive, efficace et confortable, délicieusement en décalage avec son époque. Gros moteur, consommation à l’avenant, poids conséquent, pas une once d’hybridation...
Aux yeux de l’administration fiscale, peu sensible à la poésie d’un V8, la Ford Mustang a tout faux. Conséquence, un malus délirant de 60.000 euros qui double le prix de l’auto (à partir de 59.300 euros) et la condamne à une diffusion confidentielle en France. Les aficionados pourront toujours se consoler en optant pour la Ford Mustang Mach-E électrique. Pas de bruit, pas de pollution, peu de sensations, mais un SUV politiquement correct pour rouler tous les jours en attendant le week-end pour pouvoir enfin sortir du garage sa Mustang Dark Horse. Une espèce en voie de disparition. Et un futur collector.
FORD MUSTANG DARK HORSE
- V8 5 litres - 453 ch - Couple: 540 Nm à 5100 tr/min - Poids: 1.837kg - Coffre: 381l - 0 à 100km/h: 5,3s - 263km/h - CO2: 279g, malus: 60.000 euros - Tarif: 71.300 euros
C’est tout bon
- Légende roulante - Sensations - V8 musclé et musical - Boîte mécanique
C’est moins bien
- Malus dissuasif
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