Agnès (Inga Ibsdotter Lilleaas) et Nora (Renate Reinsve) voient leur père (Stellan Skarsgård) débarquer après de longues années d’absence.
Réalisateur de renom, il propose à Nora, comédienne de théâtre, de jouer dans son prochain film, mais celle-ci refuse avec défiance.
Il propose alors le rôle à Rachel Kemp (Elle Fanning), une jeune star hollywoodienne…
Casting de qualité
Une maison vide au lourd passé, témoin de l’histoire complexe d’une famille à travers le temps.
Elle pourrait être vendue, à moins que le père, cinéaste vieillissant qui cherche à faire son come-back, ne s’en serve comme décor principal pour un film d’auteur intimiste.
Dès sa première scène, Joachim Trier donne le ton. Avec délicatesse, il scrute en profondeur les relations humaines.
Minutieux, inspiré par Tchekhov, il capte pendant plus de deux heures les non-dits et les liens indicibles qui unissent ou désunissent les êtres, en évitant tout poncif.
Autour de cette problématique, il pose une réflexion sur la frontière parfois infime entre l’homme et l’artiste.
Le personnage de Stellan Skarsgård, réalisateur, cherche à rattraper le temps perdu et utilise son art pour renouer avec sa fille.
Une envie, pas totalement assumée, de combler un manque, qui produit l’effet inverse et réveille des douleurs enfouies.
Pure émotion
Au-delà du tact du cinéaste norvégien, la finesse du jeu de son remarquable casting empêche l’ensemble de tomber dans l’entre-soi, le nombrilisme ou le simple drame bourgeois.
Chaque fois qu’elle foule le tapis rouge cannois, Renate Reinsve l’illumine par la grâce de son jeu, nuancé et intense.
Qualités perçues dans Julie (en 12 chapitres) (qui lui a permis de recevoir le prix d’interprétation en 2021) ou La Convocation (Caméra d’or 2024).
La première scène, dans laquelle son personnage, Nora, a le trac avant de monter sur scène, est un moment de pure émotion et fait contrepoids à la discussion poignante qu’elle aura avec sa sœur lors du dénouement.
À travers les différents portraits – on n’oubliera pas celui de l’actrice américaine interprétée par Elle Fanning, jeune mais nostalgique d’un monde qu’elle n’a pas connu –, Valeur sentimentale dégage une profonde mélancolie, essaie de relier les époques et interroge le rapport entre les générations.
Dense, complexe, miroir de notre monde, constamment sur le fil, cette œuvre chorale sensible a cette capacité rare de faire réfléchir sur sa propre condition et touche à l’intime.
>> Valeur sentimentale, de Joachim Trier (France/Norvège/Allemagne/ Suède/Danemark), avec Renate Reinsve, Stellan Skarsgård, Elle Fanning... Comédie dramatique. 2h13. Notre avis: 4/5.
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