Une Norma hors norme

Aux côtés de l'extraordinaire Cecilia Bartoli, une soprano, aphone, a dû être doublée en coulisse par une autre chanteuse. Tout cela sous contrôle… de la Gestapo !

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André PEYREGNE Publié le 21/02/2016 à 05:02, mis à jour le 21/02/2016 à 05:02
La mise en scène de cet opéra n'avait rien à envier au cinéma. En haut à droite : Cecilia Bartoli (avec le bébé), en duo avec la soprano aphone.
La mise en scène de cet opéra n'avait rien à envier au cinéma. En haut à droite : Cecilia Bartoli (avec le bébé), en duo avec la soprano aphone. Alain Hanel / Opéra de Monte-Carlo

Merveilleuse Cecilia Bartoli ! Entendue vendredi à l'opéra dans le rôle inhabituel pour elle de la Norma, elle a été éblouissante. Cecilia Bartoli est la musique même. Son instinct musical est tel qu'elle pourrait apprivoiser n'importe quel répertoire. Et avec cela, une présence scénique digne d'une grande actrice ! Elle a été ovationnée.

La représentation a été marquée par deux surprises : l'aphonie de l'autre chanteuse et l'étrangeté de la mise en scène.

La soprano défaillante s'appelait Rebeca Olvera. Elle devait incarner le personnage d'Adalgisa, rivale en amour de Norma. Ayant perdu sa voix l'avant-veille du spectacle, elle a dû être remplacée au dernier moment.

Or, aujourd'hui, il n'y a pratiquement plus de soprano à travers le monde chantant le rôle d'Adalgisa, lequel, depuis un siècle, a été repris par les mezzo-sopranos. Le directeur de l'opéra, Jean-Louis Grinda, réussit à en trouver une, Eva Mei, qui n'accepta de venir chanter qu'avec une partition à la main.

Du jamais vu !

Une solution étrange fut donc adoptée : la chanteuse aphone mimait son rôle sur scène tandis que la « doublure » Eva Mei chantait au bord des coulisses, derrière son pupitre ! On n'avait jamais vu cela. Vocalement, Eva Mei fut magnifique. Ce fut même la révélation de la soirée !

Dernière étrangeté du spectacle : la mise en scène. L'histoire de la Norma, qui est celle d'une druidesse gauloise amoureuse d'un soldat ennemi romain, a été transposée… pendant la Seconde Guerre mondiale. On voit des images bien réalistes et pénibles de l'armée d'occupation en 1940 tandis que les personnages chantent des paroles évoquant la cueillette du gui près des temples gaulois au clair de lune, au temps de l'invasion romaine. On se demande bien pourquoi ! Cela étant, si on accepte le principe de cette mise en scène, celle-ci a été réalisée avec une précision millimétrée qui force l'admiration. C'aurait pu être une mise en scène de cinéma.

Tressons une couronne de lauriers - comme à la vraie époque gauloise - sur le front de la basse Peter Kalman, et, dans une moindre mesure, du ténor Christoph Strehl, mais aussi au front des chœurs de la Radio Suisse Italienne et de l'excellent orchestre des Barrochisti. Car, afin de retrouver des couleurs orchestrales proches du début du XIXe siècle, c'est un orchestre baroque qui a été convié dans la fosse. Un orchestre baroque pour accompagner les exactions de la Gestapo ? Cette Norma est vraiment hors norme !

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