Un guide, bon comme du bon pain... Savoureux !

Antibes Du haut de ses 13 ans, Ewan Corinaldesi-Geria est parti sur les traces des derniers artisans boulangers du département. Résultat : un livre sincère à dévorer tout cru

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M.-C.A Publié le 15/04/2019 à 10:30, mis à jour le 15/04/2019 à 10:30
Ewan devant le four trois fois centenaire de la boulangerie « Chez Gégène » dans le village haut perché de Roure.	(DR)
Ewan devant le four trois fois centenaire de la boulangerie « Chez Gégène » dans le village haut perché de Roure. (DR)

Il aura fallu deux ans pour qu’il sorte du four. Doré à souhait. Pétri de passion et d’amour. Pas un pain, bien sûr, mais un ouvrage tout entier dédié aux derniers artisans boulangers et pâtissiers du département. Les vrais de vrais. Ceux qui, dans le secret de leur laboratoire et de leur pétrin font naître cet aliment nourricier, quasi sacré sous nos contrées. L’auteur n’a pas ménagé sa peine : deux ans de recherches, de visites sur le terrain, de rencontres, de discussions, puis du temps pour écrire, choisir les photos... Un long pétrissage, donc.

Un apprentissage.

« Tout cela entre ma vie à l’école puis au collège, puisque j’ai lancé l’idée quand j’étais au CM2 et aujourd’hui je suis en 5e », sourit l’auteur.

Car, Boulanger. Une espèce en voie de disparition, qui vient tout juste d’être imprimé par l’Atelier antibois, est âgé de treize ans. Ewan Corinaldesi-Geria. Pas vraiment un inconnu, Ewan.

On l’a découvert en 2016, en passionné de trains, lancé sur les pistes (oubliées) du TNL (Tramway Nice Littoral). Comme il l’explique dans son livre, « l’amour du pain et de la boulangerie occupe une place particulière ». D’ailleurs, il veut en faire son métier et fabrique déjà son propre pain à la maison. Avec un four, un plan de travail... et même un petit champ où pousse un blé sélectionné avec soin. Très exigeant, il met un point d’honneur à ne manger que du pain frais, cuit dans les règles de l’art. Dans son guide, le collégien propose « 18 adresses rares dans les Alpes-Maritimes ». Comment est née cette sélection ? « Au départ, il y avait trente adresses. C’est mon amie Léanne qui, grâce à sa famille, me les a données. Je les remercie ! En CM2, j’avais lancé un concours en classe : un pot de pâte à tartiner pour qui me donnera le plus de noms ! »

Deux artisans antibois à l’honneur

Puis, Ewan est parti sur les routes. Pas tout seul, bien sûr. Avec ses parents Chantal et Marc qui se sont relayés dans cette quête « du pain d’antan, frais et authentique ». De Menton à Cannes, d’Isola à Breil-sur-Roya, en passant par Antibes, Nice, Grasse. Des grandes villes côtières aux villages perchés. Il y avait du pain sur la planche ! Pour faire son choix, une méthode bien agréable : goûter ! Ou plutôt déguster. Une mission à laquelle Chantal et Marc ont participé sans trop rechigner... Des pâtissiers ont également été sélectionnés pour leur savoir-faire. Et, oui, on est gourmand dans la famille Corinaldesi-Geria !

La cité des Remparts, où Ewan est né, est bien lotie avec deux adresses : l’incontournable Veziano et Lilian Bonnefoi. Il y a eu des rencontres mémorables, comme Gégéne, du Roure, avec son four trois fois centenaire. « Il est l’un des rares à pétrir ses confections à la main, un savoir-faire perdu par la modernisation. Il comble de bonheur les habitants et emplit les étroites ruelles de l’odeur du levain », écrit joliment Ewan.

« Espèce en voie de disparition »

« Même si ça n’a pas toujours été facile, l’aventure a été merveilleuse. J’ai été accueilli avec beaucoup de chaleur. Ces personnes m’ont fait confiance. Ce n’est pas évident quand on a treize ans. Je pense qu’ils ont vu que j’étais sincère. Ils m’ont raconté leurs parcours, leur passion pour ce métier pas comme les autres. J’ai pu visiter longuement des laboratoires, voir le travail...On m’a proposé de venir travailler et de faire un stage ! Tous m’ont remercié de les aider. Car, c’est le sous-titre de mon livre, boulanger est une espèce en voie de disparition. Lorsque j’ai commencé à écrire mon livre, plusieurs boulangeries que j’ai visitées et choisies ont fermé leurs portes. Il y a eu un débat sur le choix du mot espèce en voie de disparition. Mais, les artisans m’ont dit que c’était leur sentiment. »

Ewan n’oubliera jamais le choc qu’il a ressenti en découvrant la boulangerie Sabbia, à Vence, en train d’être démolie. « Je voulais faire une photo et le vieux four était en train de disparaître sous les coups du marteau-piqueur. J’ai cru que j’allais tout abandonner. »

Et puis, bravement, il s’est remis à son plan de travail.

Le petit guide est plaisant à découvrir. Parce qu’il est bien écrit et bien mis en page. Là aussi, l’ado sait ce qu’il veut. Pour chaque commerce, deux pages. A gauche, le parcours et la rencontre avec l’artisan et à droite, une photo. Le boulanger pose devant sa vitrine en noir et blanc. Seul le personnage et son produit sont en couleur. Cerise sur le gâteau : powur chaque boulangerie et pâtisserie, l’auteur donne ses trois coups de cœur. Et on a même droit à la gourmandise préféré de l’artisan lui-même. La première chose qu’Ewan a faite lorsque le livre est paru, c’est de commencer à le distribuer aux boulangers rencontrés. Le plus bel hommage à leur travail.

Comme une bonne recette. Pour la maquette de son livre, Ewan a soigneusement choisi ses ingrédients. La couverture, bien sûr, a été le fruit de bien des réflexions. « Je voulais quelque chose qui évoque l’importance du métier du boulanger, un vrai four et où l’on voit toutes sortes de pains ». Ce n’est pas une photographie mais un tableau qui a été choisi après de patientes recherches : Le boulanger Arend Oostwaard et sa femme du peintre hollandais Jan Havicks Steen. La toile du maître, datée de 1658, est conservée au célèbre Rijksmuseum d’Amsterdam. Il a fallu écrire au musée pour demander l’autorisation de reproduction. La réponse n’a pas tardé à arriver. « C’était d’accord à condition d’envoyer au musée un exemplaire du guide ! » explique l’auteur, ravi, à juste titre. Il attire notre attention sur tous les détails de la scène et notamment l’enfant, le fils du boulanger, qui, en jetant un regard admiratif à son père qui, lui, présente sa dernière fournée, souffle dans une corne de brume. « À l’époque, c’est comme ça que les boulangers prévenaient les gens que le pain était sorti du four ». En plongeant dans la scène, on croit, presque, sentir la bonne odeur qui se dégage de ce four si lointain.

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