Ils ne sont pas énervés. Les voix restent égales. Mais le ton est ferme.
« Nous demandons au gouvernement, avec beaucoup de fermeté, de caresser l'idée de faire un échelonnement de l'ensemble des travaux. » C'est Jean-Louis Grinda qui parle. À côté de lui, deux autres conseillers nationaux Union Monégasque, Bernard Pasquier et Jean-François Robillon, acquiescent. La minorité parle d'une voix pour relayer « une exaspération de la population ». En ligne de mire : les chantiers publics qui se multiplient dans Monaco. Il doit y en avoir 45 en Principauté dans les prochaines années ; les rotations de camions devraient être multipliées par quatre.
« Surseoir, pas suspendre »
Selon Jean-Louis Grinda, avec cette succession de travaux, Monaco se place sur « une pente plus que dangereuse », avec un risque de se « déshumaniser ». Il défend un « droit à la tranquillité par quartier » qui serait donc remis en cause par les ballets de camions et les rotations des pelleteuses.
« Plus personne ne supporte cet état de fait », appuie-t-il.
Alors, « il ne s'agit pas de supprimer mais de surseoir », plaident-ils. Le problème résiderait dans la succession de tous ces chantiers, et son résultat : « On asphyxie totalement le pays, on prend des risques financiers », appuie Jean-François Robillon. Des risques financiers ? D'abord, dans leur discours, il y a l'attractivité de la Principauté. Notamment la capacité à attirer de nouveaux résidents. Bernard Pasquier synthétise : « Je ne sais pas si ça aide vraiment à la vente d'appartement, d'avoir un pays où il y a des camions qui passent tout le temps, un bruit infernal… »
Autre problème : le budget triennal d'investissement supérieur à quatre milliards d'euros, sans certaines opérations comme Testimonio ou l'extension en mer…
« ça me paraît très élevé, trop vite, et pas nécessairement dans l'intérêt de la préservation de nos finances publiques », juge encore Bernard Pasquier. Il entame une comparaison entre la partie liquide du Fonds de réserve constitutionnel et le fonds souverain norvégien, souvent cité en exemple en matière de finances publiques. « J'ai essayé de comparer le niveau de nos réserves par rapport à la taille de notre économie, avec celles de la Norvège. Si on était la Norvège, ce n'est pas deux milliards en liquide qu'on aurait devant nous. C'est douze. ça ne veut rien dire. ça veut dire qu'il faut peut-être arrêter de toujours pavoiser, de dire que tout va bien, de se rendre compte qu'en face du grand programme d'investissement qu'on a devant nous, la prudence serait peut-être de mise. » Bref, « ce qu'on demande, c'est l'organisation, d'une manière urgente, d'une commission plénière d'études avec le gouvernement pour discuter de l'échéancier des travaux à venir », dit encore Bernard Pasquier. Avant le vote du budget primitif.
Le dossier a déjà été porté aux oreilles du gouvernement, reprend Jean-François Robillon : « C'est vrai qu'il (NDLR : le ministre d'État) commence à s'inquiéter, lui aussi.[...] Il nous l'a dit. L'inquiétude vient aussi du gouvernement qui se dit : "Peut-être qu'on est allés trop vite, et trop loin." »
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