Sécurité routière: Monaco déploie les tests salivaires antistupéfiants

Au moindre comportement suspect d’un usager de la route, la police de Monaco peut désormais coupler le contrôle d’alcoolémie d’un prélèvement buccal pour détecter cannabis, opiacés, ecstasy…

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Thomas Michel Publié le 09/12/2020 à 11:45, mis à jour le 09/12/2020 à 12:07
Le dépistage se fait à bras tendu, ganté et masqué, pour respecter les mesures sanitaires actuelles de lutte contre la Covid-19. Photo JFO

Que les fumeurs de joints et consommateurs de drogues, a fortiori les usagers de la route, le sachent. Monaco accentue sa chasse aux stupéfiants. Depuis quinze jours maintenant, des kits de prélèvements salivaires pour détecter la présence de drogue dans l’organisme complètent l’attirail des agents de la Sûreté publique. Et la procureur général de Monaco, Sylvie Petit-Leclair, n’y va pas par quatre chemins. "Nous avons la volonté de réprimer davantage la conduite sous l’emprise de stupéfiants."

Réactif à différentes substances illicites comme le cannabis, l’ecstasy, l’héroïne, les méthamphétamines et opiacés, le test salivaire est à usage unique. L’individu reconnu positif, la procédure est déclenchée.

"La quantification n’a pas à être déterminée", précise la procureur. Et ceux qui tenteraient d’échapper au verdict n’auront rien à y gagner. Au contraire. "Tout refus est considéré comme un test positif, tranche Sylvie Petit-Leclair, la peine est la même!"

Signes extérieurs

La Sûreté publique a dû établir un protocole validé par Sylvie Petit-Leclair. Le dépistage pourra ainsi être réalisé par les policiers sur la base de "signes extérieurs". "Une élocution difficile, des yeux injectés de sang, des propos incohérents, une conduite hasardeuse… Tous les signes extérieurs qui laissent à penser qu’un individu a pu consommer des produits illicites", confirme le commandant Fabien Vachetta, responsable de la Division de l’Événementiel et de la Préservation du Cadre de vie.

Un protocole par ailleurs adapté à la situation sanitaire actuelle. "C’est identique à la procédure de contrôle d’alcoolémie. Les agents sont masqués et gantés et le prélèvement se fait à bras tendu, dans le respect de la distanciation physique nécessaire pour se prémunir de la propagation du virus."

Pour confirmer, et affiner le test, la personne sera conduite au CHPG pour des analyses complémentaires. "Le kit de prélèvement sanguin in vivo pour usage de stupéfiants est alors fourni par la Sûreté publique", détaille la procureur. Réfrigérés, les prélèvements prennent ensuite, par convention bilatérale, la direction d’un laboratoire d’analyses à Nice.

Quant au prévenu, rendez-vous est pris à la barre du tribunal où les stupéfiants occupent une bonne place. Moins que l’alcool toutefois. A ce sujet, rappelons qu’en l’absence de disposition permettant de clore le dossier par une ordonnance pénale dans le bureau du juge, comme chez le voisin français, toute conduite sous l’empire d’un état alcoolique finit à l’audience à Monaco.

La mise en application d’une loi de 2019

Ce nouveau dispositif découle de l’application de la loi 1478 du 12 novembre 2019, portant sur l’exécution des peines. Une loi "fourre-tout" qui visait à "offrir aux juges davantage d’outils de personnalisation de la peine", et a surtout supprimé l’emprisonnement en matière contraventionnelle.

"Une peine doit être pédagogique", défend toujours la procureur général de Monaco, forte de son expérience internationale. "Il faut être capable d’expliquer la peine et ne pas avoir de décisions incohérentes pour des mêmes faits".

Mutée sur le Rocher à l’été 2018, Sylvie Petit-Leclair avait ainsi entrepris de dépoussiérer et moderniser les Codes monégasques. Travail qui se poursuit sous l’égide du Secrétaire d’État à la justice, Robert Gelli. Un arsenal juridique plus complet qui, à terme, fermerait aussi des “fenêtres de défense” dans lesquelles n’importe quel avocat serait actuellement idiot de ne pas se jeter pour “sauver” son client.

Quant à la jurisprudence sur les consommateurs de drogue, elle risque de s’enrichir rapidement avec ces nouveaux tests…

Se soustraire à l’injonction équivaut à être testé positif. Photo JFO.

Le risque d’une peine lourde et personnalisée

L’article 60 de la loi 1 478 du 12 novembre 2019 prévoit l’insertion dans le Code pénal d’un article 391-15 quant aux sanctions en cas de dépistage positif de drogue.

"Est puni d’un emprisonnement d’un à six mois et de l’amende prévue au chiffre 2 de l’article 26 [de 2.250 euros à 9.000 euros, ndlr] ou de l’une de ces deux peines seulement, celui qui aura conduit un véhicule alors qu’il a fait usage de substances ou plantes classées comme stupéfiants."

Sont visés, l’auteur d’une infraction à la police de la circulation routière, le conducteur d’un véhicule en état d’ivresse ou sous l’empire d’un état alcoolique, ou encore le conducteur d’un véhicule impliqué dans un accident de la circulation.

Les peines complémentaires

Des peines complémentaires, nombreuses et coercitives, sont également introduites par l’article 391-16 du Code pénal:
- Suppression du permis de conduire pour une durée de deux ans ou plus,
- annulation du permis de conduire avec interdiction de solliciter la délivrance d’un nouveau permis de conduire pendant cinq ans au plus,
- si le coupable n’est pas titulaire du permis de conduire, l’interdiction de solliciter la délivrance du permis de conduire pendant une durée de cinq ans au plus,
- interdiction de conduire dans la Principauté pour les titulaires d’un permis de conduire délivré par une autorité étrangère pendant une durée de cinq ans au plus,
- immobilisation, pour une durée de six mois au plus, du véhicule appartenant au condamné,
- si le coupable est titulaire d’un permis de conduire qui a été suspendu, la prolongation du délai de suspension pour une durée de cinq ans au plus.

"Les peines complémentaires de suspension, d’annulation ou d’interdiction de délivrance du permis de conduire et d’immobilisation du véhicule peuvent être déclarées exécutoires par provision, à titre de mesure de protection".

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