Lors de la conception des sous-titres de son film, Marie Heurtin, même Jean-Pierre Améris, pourtant sensibilisé au sujet, n'a pu s'empêcher de faire une remarque fâcheuse : « J'ai dit à la traductrice : vous avez oublié de mentionner que sur l'image, la porte claque. Elle m'a aussitôt répondu : je suis sourde, mais pas idiote ! »
Anecdote révélatrice des quiproquos et difficultés de communication entre valides et malentendants.
« Un sous-titre de cinéma doit être fidèle au dialogue du film, il doit aussi indiquer des bruits utiles tels que le chant du grillon ou le téléphone qui sonne, mais il n'est pas là pour expliquer l'image aux malentendants ! », précise Brice Meyer-Heine, président de l'ADRRS. Son association gère des cas dramatiques, « parce que ce sont des gens qui ont perdu l'audition, principalement à l'âge adulte, qui en perdent tous leurs repères. Il y a parfois des musiciens qui n'entendent plus une note du jour au lendemain ».
La génération « walkman » (et sa musique trop forte dans les écouteurs) vient gonfler les rangs de ces malentendants tardifs.
« À leur âge, il est très difficile d'adopter le langage de signes, une langue à part entière qu'il faut apprendre et maîtriser. On apprend plutôt le langage labial (sur les lèvres), plus facile et plus rapide à acquérir, et qui peut compléter un appareillage auditif ». Reste que le sous-titrage n'est pas un langage assez courant dans les salles du 7e art, malgré six millions de personnes souffrant de problèmes d'audition sur notre sol : « Par rapport aux États-Unis où même la pub est sous-titrée, la France est très retard. On trouve très peu de films français sous-titrés en salles, ou alors à des horaires inadaptés pour les actifs, alors que le sous-titrage en français pourrait aussi être facteur d'intégration pour des étrangers », estime Brice Meyer-Heine.
« ça reste très dur de convaincre les exploitants du 7e art, d'autant plus que la surdité est un handicap qui ne se voit pas. »
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