Quels seraient les plus et les moins pour la Principauté d'un accord avec l'Union européenne ? Alors que la question avait échaudé lors de la campagne pour les élections nationales, le Monaco Press Club a organisé un débat en conviant deux spécialistes des questions européennes : Jean Quatremer, journaliste français à Libération et Romain Clivaz, journaliste politique suisse sur la radio RTS pour les questionner sur l'opportunité d'un accord, alors que les négociations entre Monaco et l'Union européenne se poursuivent.
Deux tons, deux discours différents, pour évoquer ce cas unique de Monaco, pays où les nationaux sont minoritaires et qui négocie un accord d'association avec l'Europe.
Pour Jean Quatremer, « seul on n'est rien, on ne pèse rien, on n'existe pas dans notre monde de bientôt huit milliards d'habitants. ça vaut pour Monaco, la France ou l'Allemagne. C'est cette solidarité qui aide à peser contre la politique américaine ».
« On peine à imaginer que l'Europe accepte la question de priorité nationale »
Romain Clivaz, lui, nuance, « l'idée est de voir comment collaborer entre un grand ensemble et une petite entité. L'essentiel est de voir ce qu'attend l'autre partenaire. Après, il y a la réalité du pays, ses liens naturels vu sa position géographique. Mais on peine à imaginer que l'Europe accepte la question de priorité nationale. ça me paraît compliqué qu'ils ne veuillent pas franchir cette ligne rouge pour Monaco. On peut attendre plus de souplesse de la part de Bruxelles, je pense qu'il n'y en aura jamais ».
En somme, l'éventualité d'un accord entre Monaco et l'Europe devrait s'accorder aux quatre libertés fondamentales de l'Union européenne : circulation des marchandises, des services, des capitaux et des personnes. Un statut qui ferait que Monaco gagnerait ou perdrait en souveraineté ? Pour Romain Clivaz, « il faut un parrain puissant pour garder les spécificités. Une force tutélaire que pourrait être la France pour Monaco ».
Et Jean Quatremer de réagir : « on gagne en souveraineté en appartenant à un ensemble » lance le journaliste de Libération. « Quand on parle à des patrons chinois, ils savent ce qu'est l'Europe, cela simplifie la vie des affaires. De Gaulle en 1958 avait compris que la France serait plus grande au milieu de l'Union européenne. On n'en perd pas pour autant en spécificité. On ne se fond pas les uns dans les autres mais c'est l'opportunité d'avoir la capacité de répondre à des gens qui nous menacent ».
« Il va falloir de la souplesse intellectuelle »
Verdict ? Selon Romain Clivaz, les atouts seraient « dans la nature des choses, pour favoriser les échanges de voisinage » avec les pays européens. « Mais si le prix à payer est de remettre en cause les principes de la constitution en matière démographique ou fiscale, il faut peser les intérêts. Car, quand on signe dans une communauté de destin, le droit qui évolue, on doit le reprendre ». Pour Jean Quatremer, « l'intérêt d'un accord serait un grand marché qui s'ouvre pour le pays, les Britanniques aujourd'hui se rendent compte de ce à quoi ils sont en train de se couper. Mais la négociation ne doit pas commencer si l'Union européenne n'accepte pas une exemption en matière de libre circulation des personnes. Ceci dit, le Brexit a impacté Bruxelles dans le sens où, aujourd'hui, l'idée progresse qu'un principe ne doit pas obligatoirement s'appliquer pour aboutir à la catastrophe. Il s'agit de voir s'ils sont prêts à faire un effort ou pas. Il va falloir de la souplesse intellectuelle ».
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