L’ADN lui rend sa famille

L’histoire de la Cannoise Michèle Christophel, née sous X en 1937, a fait l’objet d’un reportage émouvant qui sera diffusé ce soir à 21 heures sur M6 dans l’émission Zone Interdite

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éric farel Publié le 03/11/2019 à 10:22, mis à jour le 03/11/2019 à 10:22
L’heure de trinquer pour le détective Fabrice Brault et les trois sœurs enfin réunies.	(DR)
L’heure de trinquer pour le détective Fabrice Brault et les trois sœurs enfin réunies. (DR)

C’est un petit bout de femme d’1,52 m. Mais bourrée d’énergie. Et déterminée à mener sa quête à son terme. Pour Michèle Christophel, une Cannoise de 82 ans, retrouver sa famille et plonger au cœur de ses origines, aura été, au cours des cinquante dernières années, le moteur principal de sa vie. Et un vrai chemin de croix...

Un prénom : Madeleine

Née sous X dans le XVIIIe arrondissement de Paris, le 24 janvier 1937, Michèle ne connaît de sa mère qu’un prénom, laissé sur le PV d’abandon : Madeleine.

La retrouver deviendra quelques années plus tard, une véritable obsession. Au point qu’elle signera un livre du pseudo « Madeleine Michèle » (lire ci-dessous), et l’intitulera Madeleine Comment ?

« Je suis née rue Ordoner, au domicile d’une sage-femme », confie Michèle. C’est le point de départ d’un destin hors du commun. À l’âge de deux ans, l’enfant intègre une famille d’accueil, au côté d’une sœur de substitution qui s’appelle Huguette. Une famille qui finira par l’adopter alors qu’elle vient de fêter... ses 22 printemps. Entre-temps, Michèle s’est mariée. Une union dont naîtront deux enfants. En 1967, c’est le divorce. Elle a 30 ans, et se retrouve seule. Toujours rongée par le désir de remonter le fil de ses origines. Et si elle n’a pas encore entrepris les démarches pour ce faire, c’est, dit-elle, par respect pour sa mère adoptive, Hélène. Celle-ci décède en 1968. Un coup de massue pour Michèle qui confie aujourd’hui « avoir eu beaucoup de mal à se remettre de ce deuil. » Mais cette fois-ci, elle n’a plus aucune raison de retarder encore les recherches qui lui permettraient d’identifier sa mère biologique. Commence alors un investissement de tous les instants. Une semaine par mois, elle se rend à Paris, aux Archives départementales, et consulte les quelque 200 000 actes d’état civil - naissances, mariages, décès, recensement de population - susceptibles de lui fournir une indication. Des investigations qui restent vaines. Le détective Fabrice Brault, spécialisé dans la recherche des familles en France et à l’étranger, raconte la suite : « J’ai rencontré Michèle en 2009, dans le cadre des cafés débats organisés par la Cadco (Coordination des actions pour le droit à la connaissance des origines, Ndlr) auxquels je participe. Elle m’a présenté sa gigantesque enquête, un dossier que j’ai étudié pendant plusieurs semaines avant de lui faire savoir qu’avec si peu d’éléments recueillis, je ne pouvais pas faire grand-chose. »

Un père et deux demi-sœurs

Mais Michèle ne se décourage pas. En 2016, elle reprend contact avec le détective qui est aussi généalogiste et lui offre de nouvelles pistes à étudier. Là encore, les recherches font chou blanc. « En juin 2018, j’évoque donc avec elle le recours aux tests ADN généalogiques. Michèle est peu convaincue mais souhaite tout de même se donner toutes les chances. Ces tests, bien qu’interdits en France, apportent deux types de résultats, explique Fabrice Brault. D’une part, ils fournissent les origines ethniques et géographiques du sujet, mais aussi une liste d’environ 1 000 cousins génétiques à travers le monde, avec leur degré de parenté. À partir de là, nous remontons la généalogie familiale pour retrouver des ancêtres communs. »

Concernant Michèle, les résultats sont étonnants : ils indiquent qu’elle est d’origine arménienne, italienne et française alors qu’elle pensait être née de parents français. Quant aux cousins génétiques, ils sont approchés afin d’étudier leur généalogie. Et en mars dernier, c’est le coup de théâtre : l’un d’entre eux, prénommé Olivier, « matche » avec Michèle, avec un taux de correspondance intéressant.

« J’ai pris contact avec lui dans l’espoir de le convaincre de nous aider, indique Fabrice Brault. Et il a accepté de me dévoiler l’histoire de sa famille. Après un travail de quatre mois, j’ai remonté l’arbre généalogique sur six générations et retrouvé une trentaine d’ascendants communs à Olivier et Michèle. J’ai étudié la vie de chacun pour me rendre finalement compte qu’un seul avait vécu en région parisienne dans les années 1935-40. Et puis j’ai orienté mes recherches vers son lieu de décès, d’habitation, son mariage, jusqu’à retrouver ses deux filles, Josselyne et Françoise. On a, bien sûr, évoqué l’histoire de Michèle sans avoir de certitudes sur un éventuel lien de parenté. »

Il faudra un nouveau test ADN et cinq longues semaines de patience pour que le verdict tombe : oui, Josselyne et Françoise sont bien les sœurs cadettes de Michèle. Leur papa, Paul - Païlak en arménien - avait fui son pays avec sa famille au moment du génocide, destination Marseille puis Paris où il est devenu représentant dans le secteur de l’habillement. Il est mort à Reims en 1979.

Deux demi-sœurs, un père : Michèle a réussi à rassembler un bon morceau du puzzle de ses origines. Mais il manque une pièce de taille : sa mère. Sa quête n’est donc pas terminée. C’est ce qu’elle expliquera ce soir dans l’émission d’Ophélie Meunier sur M6, Zone Interdite. Avec cette promesse faite à elle-même : « Je suis née sous X, je ne veux pas mourir sous X. »

On imagine aisément la joie qu’a pu ressentir Michèle Christophel en apprenant qu’une partie du mystère entourant sa naissance avait été levée.

Et surtout, en découvrant qu’elle avait deux sœurs : Françoise, 71 ans, et Josselyne, 75 ans. La première a fait une carrière d’assistance sociale. La seconde est comédienne au Théâtre de Paris, et toujours en activité. C’est à Perpignan, au domicile de l’une d’elles, que les retrouvailles ont eu lieu, dans le courant du mois de juin. Poignantes. Touchantes. Émouvantes.

Entre joie et pleurs, les trois femmes ont bien évidemment mis sur la table les détails de leur vie.

L’occasion pour Michèle de retracer le long cheminement qui lui a permis, au terme de 50 ans de recherches, de remplir les cases blanches de son existence, jusqu’à la découverte de cette famille insoupçonnée. Beaucoup de persévérance, un peu de chance et l’appui d’un expert ont ouvert la voie à cet heureux dénouement. E. F.

La quête de Michèle, on l’a vu, n’est pas terminée. Il lui reste à retrouver celle qui l’a mise au monde voici 82 ans. Elle nous prie donc de publier cet appel à témoins :

« Michèle, née le 24 janvier 1937 à Paris XVIIIe, recherche sa mère biologique ayant signé Madeleine sur le PV d’abandon. Elle avait 20 ans en 1937, donc née en 1916 ou 1917, était comptable et peut-être orpheline, d’origine française, italienne ou arménienne.

Pour toute information, contacter Fabrice Brault, agence FBI, au 06.72.44.49.47. »

Lors du tournage pour Zone Interdite par l’équipe de M6, photo de famille pour immortaliser l’instant. De droite à gauche : le détective, Fabrice Brault, la réalisatrice Anaïs Ciura, Michèle Christophel, ses deux sœurs Josselyne et Françoise, et le caméraman.	(DR)
Lors du tournage pour Zone Interdite par l’équipe de M6, photo de famille pour immortaliser l’instant. De droite à gauche : le détective, Fabrice Brault, la réalisatrice Anaïs Ciura, Michèle Christophel, ses deux sœurs Josselyne et Françoise, et le caméraman. (DR)
Cl. C..

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