Encore un avis accablant sur l'accueil des migrants

La Commission nationale consultative des droits de l'Homme (CNCDH) se dit «profondément choquée» par les traitements des migrants à la frontière franco-italienne

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R.M. (avec AFP) Publié le 20/06/2018 à 05:17, mis à jour le 20/06/2018 à 05:17
Jean-François Ottonello

Encore un avis très négatif sur l'accueil des migrants par la police aux frontières. Dénonçant «les violations des droits» des migrants et «les pratiques alarmantes observées sur ces deux zones frontalières», la Commission nationale consultative des droits de l'Homme, dont l'avis est consultatif, estime que la puissance publique «renonce au principe d'humanité et se rend même complice de parcours mortels» dans cette zone.

Cet avis, révélé par La Croix, a été publié hier alors que la crise de l'Aquarius, le bateau-ambulance qui a accosté avec deux autres navires, dimanche à Valence, avec 630 migrants que l'Italie avait refusé d'accueillir, a provoqué une vive passe d'armes diplomatique entre Rome et Paris. L'Italie reproche à la France de lui renvoyer des migrants en la laissant en première ligne, tandis que Paris assure avoir fait preuve de solidarité via la répartition européenne ou l'aide financière et logistique.

«Parcours de plus en plus dangereux à travers les Alpes»

La CNCDH, autorité morale qui avait déjà rendu un avis très sévère en mai sur la politique migratoire du gouvernement, s'inquiète notamment de voir que les migrants, dont de nombreux mineurs, entreprennent «des parcours de plus en plus dangereux à travers les Alpes».

Parmi ses griefs, le non-respect de la loi lors des refus d'entrée à la frontière, où les contrôles ont été rétablis en 2015. L'an dernier, quelque 50 000 non-admissions ont été prononcées aux points de passage.

Pour la CNCDH, la République française est «hors droit» en ne respectant pas plusieurs garanties légales, telles l'entretien approfondi ou le délai d'un jour franc avant un éloignement. En matière de respect des procédures d'asile, elle relève que les autorités ont «indiqué qu'aucune demande d'asile n'avait été déposée à la frontière, ce qui ne peut qu'interroger».

La Commission dénonce aussi «des lieux de privation de liberté improvisés et non respectueux des droits», dont elle demande «la fermeture immédiate».

«Au mépris des lois françaises et européennes»

Le traitement des migrants à la frontière est régulièrement dénoncé par les ONG. Vendredi dernier encore, l'Oxfam fustigeait la politique de reconduite en Italie, y compris des enfants, «au mépris des lois françaises et européennes».

La Commission s'alarme également du sort de ces mineurs, dont elle recommande de «cesser tout renvoi immédiat» vers l'Italie. «Alors qu'en principe, la minorité est déclarative à la frontière, les mineurs sont questionnés et il leur est demandé de remettre tout document pouvant attester de leur minorité», assure-t-elle.

La CNCDH a notamment été alertée «de modifications effectuées par les autorités de la date de naissance sur les formulaires de refus d'entrée», de cas de mineurs «rattachés arbitrairement à des majeurs avec lesquels ils n'ont aucun lien» ou encore de formulaires où la case indiquant qu'ils souhaitaient «repartir en Italie immédiatement» était pré-cochée.

En matière d'accueil, la Commission rejoint aussi les ONG en déplorant «l'inaction de l'État pour permettre un premier accueil digne» qui est «laissé à la seule générosité des citoyens, parfois même en opposition avec l'État».

Aussi l'Etat devrait-il, selon elle, concentrer ses efforts «dans le renforcement de la capacité d'accueil des personnes migrantes» au lieu de «cibler jusqu'au harcèlement ceux qui leur viennent en aide».

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