Car le samedi 24 août, vers 11h45, en train d’errer sur la place de la Visitation, dans les jardins qui bordent le ministère d’État, elle n’échappe pas à la vigilance des policiers du Rocher.
Quand la présidente Françoise Barbier-Chassaing(*) l’interroge sur les raisons de son infraction, la prévenue semble désorganisée. Elle balbutie des mots éparpillés ou des bribes de phrases qui reflètent le désordre de sa pensée. Certes, la détenue s’efforce à donner sens et cohésion à ses idées éparses. Sans y parvenir assurément. D’où la répétition des questions par la magistrate sur sa situation.
Alors, la sexagénaire est-elle véritablement consciente de ses responsabilités, de sa valeur, de la situation en déclarant son domicile. "Vous avez un statut de SDF, remarque la présidente. Quelle est votre profession?" Les emplois annoncés n’ont pas plus de sens.
"À la suite de cette 4e garde à vue"
"Je suis le porte-parole entre le Conseil national et le Diocèse de la Principauté. Je chante pour l’Opéra de Monaco et celui de Nice…" Une fois le délire passé, cette personne ne travaille pas du tout.
La présidente a raison de douter sur les facultés cognitives de cette femme de 64 ans, loin d’être en harmonie avec la réalité présentée. "Quels sont vos revenus?" Ils se limiteront à l’aide financière de l’AAH (allocation aux adultes handicapés). Maigres ressources… Peut-être à partager afin d’aider une fille malade? À la suite de ce désordre verbal, étayé de formules énigmatiques et de soliloques incompréhensibles, le premier substitut Cyrielle Colle apporte une précision complémentaire pour souligner cette existence pleine d’incertitudes.
"Ce n’est pas la première fois que Madame est en situation irrégulière sur le territoire monégasque, annonce-t-elle. Au début, le parquet a été clément. Mais à la suite de cette quatrième garde à vue, il fallait saisir le tribunal correctionnel."
La défense, par la voix de Me Stephan Pastor, sollicite "un délai afin d’ordonner une expertise psychiatrique. Les rapports médicaux précédents et les déclarations incohérentes de ma cliente sont à prendre en compte."
"Sa responsabilité ne peut être retenue"
Après concertation, les juges prévoient une expertise et renvoient l’affaire au vendredi 30 août. Toutefois, afin de garantir la représentation de la prévenue devant le tribunal, elle est maintenue en détention jusqu’à cette date.
Ce vendredi après-midi, la présidente Françoise Barbier-Chassaing a fait part des conclusions de l’expert. "La responsabilité de la prévenue ne peut être retenue. Le praticien considère l’utilité d’un traitement psychiatrique." La représentante du parquet général requiert sans mots contrariants la relaxe. L’avocat apprécie cette décision. "Elle corrobore le contenu des différentes déclarations de ma cliente", conclut-il.
Le tribunal a finalement suivi les réquisitions du ministère public dans un procès où l’ensemble des magistrats a fait preuve d’un profond sentiment d’humanité et s’est montré particulièrement préoccupé par la destinée de la coupable.
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