Il y a des choses qui ne sont pas racontables. Par exemple, l'émotion qui a saisi le public du parvis Saint-Michel lundi soir, lorsque le violoniste Renaud Capuçon, le violoncelliste Edgar Moreau et le pianiste David Kadouch ont repris en bis, peu avant minuit, le thème sublime du deuxième mouvement du célèbre 2e Trio de Schubert.
Un silence figea le public. La salle retenait son souffle. À la fin, on n'osait pas applaudir pour ne pas troubler cet instant d'éternité.
Hier soir, le récital du grand pianiste Christian Zaccharias commença lui aussi par du Schubert - comme pour donner une suite au rêve de la veille.
Ce fut une réussite. Trois notes sous ses doigts et, aussitôt, la magie reprend. On a l'impression que tout l'espace du parvis Saint-Michel, entre les deux églises baroques, s'emplit de musique. Une brise de Schubert parcourt le lieu. On est aux anges…
Christian Zaccharias a joué, avec une magistrale sérénité la 5e sonate de Schubert, les 27e et 30e sonates de Beethoven, ainsi que ces œuvres fantasques que sont les « Danses des compagnons de David » de Schumann. Aucun effet gratuit dans son jeu. Une concentration de tous les instants. Une recherche constante de la beauté du son.
La 27e sonate de Beethoven a une histoire. Elle a été composée comme cadeau de mariage au comte Lichnowski.
Dans le premier mouvement, Beethoven évoque les hésitations du comte : « Vais-je vraiment me marier ? » « Fais-je bien de me marier ? »
Dans le second, il évoque le soulagement : « Ouf, c'est fait, j'ai eu raison de me marier ! »
Il manque un troisième mouvement dans lequel Beethoven nous dirait - si c'est le cas - que le comte fut heureux et eut beaucoup d'enfants ! On ne le saura jamais…
Ce qui est sûr c'est que les noces entre Christian Zaccharias et le public de Menton ont été bien émouvantes, hier soir…
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