Coût, calendrier, nuisances... Tout ce qu'il faut savoir sur la bretelle d'autoroute qui doit faciliter l'accès à Monaco

Le financement est bouclé: 6,06 millions d’euros pour la réouverture, ou la création d’une bretelle, censée désengorger les accès à la Principauté. La mise en service est prévue pour 2022

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Thibaut Parat Publié le 11/09/2019 à 09:30, mis à jour le 11/09/2019 à 09:27
La bretelle de Beausoleil, qui va être entièrement repensée, reliera l’A8 à la Grande Corniche (RD2564). Photo Dylan Meiffret

À l’est du département, le projet est qualifié d’Arlésienne ou, au choix, de serpent de mer. Pour ses lenteurs administratives autant que pour les blocages et refus successifs de l’État. Serait-ce le bout du tunnel pour la bretelle de l’A8, dite "de Beausoleil"? Pas tout à fait.

Mais, ce lundi midi, le dossier a connu une avancée significative : les protagonistes du projet ont signé un protocole financier pour la réouverture, ou du moins la création d’une bretelle répondant aux normes et exigences autoroutières.

Un document qui, en bref, acte la répartition des 6,06 millions d’euros engagés pour ce chantier (qui fait tant jaser depuis plus de deux décennies) censé désengorger les différents accès à la Principauté par l’ouest des Alpes-Maritimes, à savoir le tunnel de l’A500, la Moyenne corniche et, bien sûr, le village de la Turbie.

"Cette création est une nécessité absolue (...) J’aurais toutefois préféré, je l’avoue, vous accueillir aujourd’hui pour l’inauguration des travaux", a taquiné Jean-Jacques Raffaelle, maire de La Turbie.

"La Turbie en crevait…"

La bretelle de Beausoleil, qui va être entièrement repensée, reliera l’A8 à la Grande corniche (RD2564). Dylan Meiffret.

Si l’édile a tant prêché pour la réouverture de la bretelle de Beausoleil, au point de mener une contestation dans la rue en 2015 aux côtés d’élus locaux et de la population, c’est que son village subit un ballet incessant de véhicules aux heures de pointe.

"Depuis le 1er janvier 2012, le respect des normes de sécurité conduit très régulièrement à la fermeture du tunnel de l’A500 aux heures de pointe. La Turbie, sortie suivante, devient donc l’alternative obligatoire pour ces véhicules qui se déversent alors sur l’artère principale du village, y créant l’embolie, avant d’emprunter des voies qui ne sont ni qualifiées, ni calibrées, pour un tel trafic", justifie-t-il.

Une étude de 2011, soit avant l’entrée en vigueur de cette obligation, établissait déjà à 10.831 le nombre de véhicules se croisant chaque jour, aux heures de pointe, sur la seule entrée Est de La Turbie.

Sans doute plus, en 2019, quand on sait à quel point la Principauté est pourvoyeuse d’emplois.

Des nuisances pour les riverains.

Sans parler de la perte de temps et d’énergie des milliers de pendulaires (ils sont 43.000 pendulaires à se rendre chaque jour, par le train ou la route, à Monaco pour y travailler, NDLR) bloqués dans des embouteillages monstres chaque matin.

"Ce document signé va désengorger la Turbie qui en crevait", résume Jean-Claude Guibal, président de la communauté d’agglomération de la Riviera française, lequel ne s’est pas montré tendre avec l’État et son concessionnaire autoroutier, Vinci Autoroutes, quant à la longueur du dossier. Tout comme les élus locaux ayant pris la parole, d’ailleurs.

"Je trouvais ça assez triste qu’il faille à notre pays, qui est à ce point inventif et qui a des ingénieurs d’une qualité mondialement reconnue, près de 25 ans pour résoudre un problème de vie quotidienne évident", a-t-il fait remarquer.

"Sans le maire de La Turbie, Jean-Jacques Raffaele, il n’y aurait pas eu l’étincelle", surenchérit Charles-Ange Ginésy, président du Département, l’un des quatre financeurs de ce chantier.

"Cette ouverture n’est pas LA solution"

Des piques, plus diplomates que vindicatives, auxquelles a répondu sans ambages le représentant de l’État.

"On ne peut pas non plus transiger avec les normes de sécurité, la sécurité routière étant un sujet tristement d’actualité, a argumenté Yoann Toubhans, le nouveau sous-préfet Nice-Montagne. On ne peut pas se permettre, en tant qu’acteur public, de ne pas être en mesure d’assurer les meilleurs ouvrages pour nos concitoyens et d’être une cause d’insécurité routière."

Toujours est-il qu’une fois repensée - les travaux devant débuter au second semestre 2021 pour une mise en service un an après - la bretelle pourrait voir passer 350 véhicules, chaque heure, aux heures de pointe le matin.

C’est en tout cas les statistiques qui ressortent d’une étude datant de… 2012. Là encore les chiffres sont à revoir à la hausse.

"Cette ouverture n’est pas LA solution mais UNE des solutions aux problèmes de circulation. Il nous faut poursuivre nos efforts pour mettre fin aux thromboses circulatoires de notre territoire", conclut le maire de La Turbie. Lequel a prié l’État et Escota de renommer la bretelle au nom de La Turbie.

Le tracé de 600 mètres étant en effet sur sa commune. "Histoire de rendre à César ce qui est à Auguste."

"Personne n’aime passer 45 minutes dans un embouteillage"

Serge Telle, ministre d’Etat du gouvernement princier de Monaco. Photo Dylan Meiffret.

Monaco, pourvoyeur d’emplois. Monaco, loué unanimement pour son dynamisme économique. Mais Monaco, de facto et malgré lui, au cœur du problème de congestion des axes avoisinants son territoire.

Serge Telle, ministre d’État du gouvernement princier, revient sur la convention fraîchement signée par les protagonistes du dossier, synonyme de grande avancée, et les autres pistes étudiées en matière de transport et de mobilité.

"Cela va apporter de la fluidification du trafic. On espère que cela va se passer le plus rapidement possible car, cela a été rappelé dans les discours, 43 000 personnes des Alpes-Maritimes viennent travailler tous les jours en Principauté. Cela explique qu’aux heures d’embauche et de débauche, vous avez des queues qui remontent jusqu’à l’A8. Ce qu’on cherche à faire, c’est de minimiser les nuisances pour les communes concernées, fluidifier et développer les échanges économiques et rendre la vie des gens un peu plus confortable.Personne n’aime passer 45 minutes dans un embouteillage pour arriver à son lieu de travail."

Cette solution est une partie du puzzle. Des améliorations ont déjà été apportées, notamment pour le train…
"On a doublé la taille des trains, en participant au financement de l’allongement du quai de Riquier àNice, qui posait un problème pour les trains doubles, et surélevé ceux-ci depuis deux ans. Puis, on a augmenté la cadence des trains pour en avoir plus aux heures de pointe. On est actuellement en négociation avec la Région, laquelle a la compétence sur les réseaux ferroviaires, et laSNCF sur la desserte de la Principauté par le cadencement augmenté des trains."

D’autres solutions sont envisagées, notamment les navettes maritimes entre Nice et Monaco.
"On avance.Évidemment, la Principauté ne peut pas faire une navette maritime à elle toute seule. On travaille avec la Chambre deCommerce et d’Industrie de Nice. Les appels d’offres ont été lancés, on attend le dépouillement.Dans le cahier des charges, le lieu stratégique de ces navettes est la Principauté et donc cela donne la possibilité aux pendulaires concernés de venir travailler par d’autres moyens que la route et le rail."

Et pour le téléphérique entre LaTurbie et Monaco, "Le maire de La Turbie a rappelé qu’il avait mis dans son Plan local d’urbanisme un projet de parking relais. Le téléphérique est évidemment une bonne idée. Il faut qu’on y travaille, qu’on voit comment tout cela peut fonctionner. La vraie question est d’apprécier les besoins, d’apprécier le nombre de personnes qui seraient concernés par ce téléphérique, d’arriver à déterminer si l’investissement, qui est assez conséquent, correspond à l’idée généreuse et relativement belle sur le plan du transport et de l’écologie qu’est ce téléphérique. On est en pleine étude."

La nature des travaux

Cette bretelle d’autoroute présente un dénivelé important et des virages serrés. Ce qui nécessite un réaménagement en profondeur. Photo Dylan Meiffret.

Oui, la bretelle de Beausoleil existe depuis des lustres. Mais sa réouverture tant attendue, due en outre aux lenteurs administratives récurrentes, a longtemps été bloquée par l’État.

"Le ministère des Transports avait plusieurs fois refusé d’envisager un tel aménagement pour des raisons de sécurité et d’incapacité de mise aux normes autoroutières de ladite infrastructure, a confié Blaise Rapior, directeur général du réseau Escota de Vinci Autoroutes. Nous avons su proposer des solutions audacieuses et pragmatiques qui ont permis au ministère de regarder le projet sous un autre angle. Et, au final, d’accepter une solution technique, certes dérogatoire, mais qui apporte un bénéfice global en termes d’accès et de sécurité."

Car, en effet, le tracé de 600 mètres reliant l’A8 à la Grande corniche (RD2564) présente une pente assez conséquente (6% au maximum) et des virages particulièrement serrés. En quoi va consister le chantier estimé à 6,06 millions d’euros?

"C’est une modification en profondeur. L’origine des problèmes, on l’a dit, était liée au rayon de giration et au dénivelé important, poursuit le ponte d’Escota. Le travail de conviction portait sur ce sujet : notre capacité à construire une route en lacets qui ne s’éloigne pas trop des canons autoroutiers. Il nous faudra déborder largement de l’infrastructure existante pour une bretelle qui sera soutenue par des murs car elle ne pourra plus s’appuyer sur le terrain naturel."

Les travaux, prévus pour le second semestre de 2021, devraient durer un an. Pour une mise en service, donc, en 2022.Si tout va bien…

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