Son lien si particulier avec la princesse Grace
Trois hymnes pour une femme hors normes: le Star-Spangled Banner, la Marseillaise et l’hymne monégasque ont clos l’hommage national conduit par le prince Albert II. "Nous nous devions de faire mémoire à Monaco, de cette figure emblématique du XXe siècle qu’a été, dans toute sa singularité, Joséphine Baker, parce qu’elle a été, et restera, une Monégasque de cœur", a souligné le souverain, évoquant le lien si particulier qui unissait sa mère la princesse Grace à Joséphine Baker.
En 1951, Grace Kelly est témoin de la fameuse scène d’humiliation de Joséphine Baker au très chic Stork Club de New York, où l’accès lui est refusé pour sa couleur de peau. Elle en gardera un souvenir vif, marquée par le courage de cette dernière face au scandale.
Le Palais princier conserve dans ses archives les échanges épistolaires entre les deux femmes, qui en plus de leurs origines américaines se sont trouvé rapidement des points communs. En 1959, un courrier de Joséphine félicite la princesse Grace pour la visite officielle que le général de Gaulle vient de faire en Principauté.
Elle écrit: "Le peuple parisien, Madame, vous a adoptée définitivement et vous êtes à présent, sa jolie et gracieuse princesse Grace". En 1972, dans un autre échange, elle lui assure que "le prince Rainier et la princesse Grace resteraient toujours son couple royal préféré".
Dans son discours, le prince Albert II s’est souvenu qu’un jour sa mère lui avait dit toute son admiration pour Joséphine Baker. "De voir ses enfants nager pour la première fois dans la piscine du Palais, cela représentait pour elle quelque chose, et elle en eut les larmes aux yeux et dit, je la cite "‘son admiration de la voir élever ses douze gosses, moi qui n’en ai que trois’"".
"Joséphine mit un point d’honneur à payer sa dette"
Le 25 juillet 1969, Joséphine arrive en Principauté avec ses enfants pour préparer sa performance au gala de la Croix-Rouge monégasque. La tribu "arc-en-ciel", expulsée du château des Milandes, réside à l’hôtel Hermitage.
En 1976, la princesse Grace, racontera cette soirée en ces termes: "Comme tout le public, je fus sidérée par sa beauté en scène, et une fois de plus, par le courage que tout cela représentait. Elle se sentait très bien à Monaco. Elle vit une villa à vendre sur la falaise. Le Prince et moi nous avançâmes les premiers fonds et j’alertais le comité exécutif de notre Croix-Rouge monégasque pour achever de l’aider. Joséphine mit un point d’honneur à payer sa dette. Six mois avant sa mort, elle avait remboursé la maison".
La villa Maryvonne à Saint-Roman, devient son ultime refuge. Georgette Armita, à l’époque secrétaire de la Croix-Rouge monégasque, est mandatée pour épauler Joséphine et sa famille dans son installation.
"Il a fallu équiper toute cette maison, je me souviens que le CHPG a mis à disposition d’anciens lits d’hôpitaux pour meubler la villa". Louisette Lévy-Soussan Azzoaglio, qui fut la secrétaire particulière de la princesse Grace au Palais n’a pas oublié "la vitalité et le grand cœur" de Joséphine Baker. "Elle m’a dit un jour: "‘si tu savais comme la vie est belle quand les orages du cœur se sont éteints", je m’en suis toujours souvenu".
Les plaisirs de la scène retrouvés
Aux orages du cœur, succèdent les plaisirs de la scène retrouvés en Principauté pour la vedette de music-hall. Le 22 juin 1974, elle remplace au pied levé Sammy Davis Jr., pour l’inauguration du nouveau Sporting d’été.
Le 9 août suivant, lors d’un nouveau gala de la Croix-Rouge, elle triomphe dans un show qui retrace sa vie. C’est ce spectacle qu’elle choisit de monter à Paris au printemps 1975 pour son retour à Bobino.
Un retour triomphal de quelques jours qui s’achève en drame. Un soir d’avril, après une prestation, Joséphine Baker fait une attaque cérébrale qui la plonge dans le coma. Elle meurt le 12 avril 1975.
Fidèle à son amie, la princesse Grace tient alors à honorer son souvenir. Elle organise la messe de funérailles en l’église Saint-Charles et offre à la famille, la tombe en granit noir d’Afrique au cimetière de Monaco, dans laquelle elle est inhumée le 2 octobre 1975. "Il y a des êtres qui ne s’éteignent jamais", dira d’elle la princesse Grace, le jour des obsèques.
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