Au coeur d’un jour de grève inédit des héros du ciel
Jamais, en 63 ans, la Sécurité civile n’avait manifesté. Ambiance particulière, hier, à la base de Mandelieu, où le préfet avait réquisitionné un équipage pour assurer la continuité des secours
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Grégory Leclerc
Publié le 14/01/2020 à 10:36, mis à jour le 14/01/2020 à 10:36
Jour de grève inédit pour Olivier Clément, chef de base de la Sécurité civile à Mandelieu. Il est également délégué branche aérien du Syndicat national du personnel navigant de l’aéronautique civile (SNPNAC).G. L.
«La grève, ce n’est pas dans notre ADN. » Il flottait hier à la base d’hélicoptère de la Sécurité civile de Mandelieu une drôle d’atmosphère. Et pour cause. En 63 années d’existence, jamais la Sécurité civile, qui compte 300 personnels sur le territoire français, ne s’était mise en grève. Il aura fallu une réforme des retraites pour provoquer l’impensable chez ces héros du ciel.
Pour Olivier Clément, chef de base à Mandelieu, délégué branche travail aérien du Syndicat national du personnel navigant de l'aéronautique civile (SNPNAC), c’était inédit.
Cet ancien militaire de carrière n’avait jamais effectué un jour de grève jusque-là. Les quatre pilotes et quatre mécaniciens opérateurs de bord de la base de Cannes-Mandelieu étaient hier déclarés grévistes.
Pourtant, l’hélicoptère de sauvetage EC 145 jaune et rouge, baptisé « Dragon 06 », calé sur ses patins, était bel et bien prêt à décoller. La raison : averti par le préavis déposé par le personnel le 1er janvier, le préfet avait réquisitionné un équipage pour assurer la permanence des secours. « Je ne vous cache pas que la grève, nous la faisons à contrecœur. Notre mission, c’est sauver des gens, confie Olivier Clément, 51 ans. Mais nous n’avions pas d’autre levier, le ministère de l’Intérieur n’a pas voulu nous écouter. »
Hier matin, à 8 heures, le mécanicien réquisitionné a donc sorti la machine sur le tarmac, et en a assuré le contrôle quotidien pré-vol.
Selon Fabrice Chrétien, secrétaire général travail aérien du SNPNAC, 90 % du personnel total de la Sécurité civile était hier en grève. Un peu partout, les ordres de réquisition sont donc tombés. « Dans l’absolu, les équipages arrêtent vers 57-62 ans, mais il faut pouvoir laisser un navigant partir à 55 ans s’il estime qu’il n‘est plus dans le match, et en mesure de piloter. »
Ni banderoles, ni pancartes
Hier, sur la base, surplombée de nuages lourds, aucun signe visible de grève. Ni banderoles, ni pancartes. « On ne sait pas faire, il faudra qu’on y pense si le mouvement continue », sourit Olivier Clément quand on lui fait remarquer. Comme un jour normal, le téléphone n’a d’ailleurs pas cessé de sonner.
La retraite, le chef de base y pense. Évidemment. Il ne se voit pas piloter jusqu’à plus d’âge. « Nous sommes les seuls à opérer de nuit, dans des conditions périlleuses, cela demande des prises de décision rapides. Chaque année, nous devons passer une visite médicale qui déclare si nous sommes aptes ou pas. Il n’y a pas de possibilité de reclassement si nous ne sommes plus aptes. »
Le personnel de la Sécurité civile a observé, un brin ironique, la décision du préfet des Alpes-Maritimes. « Nous réquisitionner, c’est bien la preuve que nous assurons, comme agents contractuels, une mission régalienne… On ne nous accorde pourtant pas les mêmes droits qu’un policier ou qu’un pompier. Le gouvernement reconnaît notre métier à risques, mais ne veut pas l’écrire. »
Les hommes de la base se disent prêts à continuer le mouvement, même s’il est quasi invisible pour le grand public, excepté l’écho dans les médias. « Notre action est symbolique, car les préfets nous réquisitionnent. Mais nous défilerons dans la rue s’il le faut », prévient Fabrice Chrétien.
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