Le parquet national antiterroriste (Pnat) demande que 14 personnes soient jugées après l'assassinat le 16 octobre 2020 de Samuel Paty, professeur d'histoire-géographie décapité par un islamiste radicalisé abattu dans la foulée par la police, a appris l'AFP vendredi 7 avril, de source proche du dossier.
Pour cet acte qui avait suscité un immense émoi en France et à l'étranger, le Pnat demande que l'infraction la plus grave, complicité d'assassinat terroriste, soit retenue seulement pour deux amis de l'assaillant Abdoullakh Anzorov. Azim E. et Naïm B. ont accompagné Anzorov pour acheter un couteau. Le second était allé avec lui jusqu'au collège de Conflans-Sainte-Honorine.
Brahim Chnina, père d'une collégienne visée par une exclusion pour indiscipline et qui prétendait avoir assisté au cours, et le sulfureux militant islamiste Abdelhakim Sefrioui, auteurs de vidéos sur les réseaux sociaux qui avaient attisé la polémique, avaient été mis en examen pour complicité, tout comme Priscilla M., trentenaire convertie à l'islam, en lien sur Twitter avec l'assassin les jours précédant l'attaque.
Mais pour ces trois personnes, comme pour trois autres adultes, le Pnat demande finalement un procès, également aux assises, pour association de malfaiteurs terroriste criminelle, selon la source proche du dossier. Le ministère public demande par ailleurs un procès devant le tribunal pour enfants pour cinq collégiens pour association de malfaiteurs en vue de préparer des violences aggravées, un délit. Le Pnat requiert que la collégienne à l'origine de l'affaire comparaisse également devant ce tribunal pour dénonciation calomnieuse, toujours selon la source proche du dossier.
Quelques jours avant sa mort, Samuel Paty était très inquiet
Le rapport d'enquête dévoilé par nos confrères du Parisien en novembre dernier, relevait que l'enquête avait démontré la "vive inquiétude ressentie" par le professeur avant son assassinat le 16 octobre 2020 dans les Yvelines "devant l'ampleur et l'agressivité de la polémique" qui le visait, selon un rapport d'enquête.
Dans ce "rapport de synthèse" final de la Sdat (Sous-direction anti-terroriste) daté du 28 juin, un enquêteur résume les investigations sur l'assassinat du professeur d'histoire-géographie de 47 ans, poignardé puis décapité près de son collège à Conflans-Sainte-Honorine (Yvelines) par Abdoullakh Anzorov, réfugié russe d'origine tchétchène, tué peu après par la police. Le jeune homme de 18 ans, radicalisé, lui reprochait d'avoir montré en classe des caricatures de Mahomet.
Dans un message audio en russe, Abdoullakh Anzorov avait revendiqué son geste en se félicitant d'avoir "vengé le prophète". Il avait pris connaissance de la polémique visant le professeur quelques jours plus tôt via les réseaux sociaux, où avaient été diffusées des vidéos de Brahim Chnina, le père d'une collégienne visée par une exclusion pour indiscipline et qui prétendait avoir assisté au cours, et du militant islamiste Abdelhakim Sefrioui.
Selon le rapport, Samuel Paty "s'en ouvrait à au moins deux collègues, à qui il demandait de le véhiculer au collège et/ou à son domicile" deux jours avant les faits. Ce même 14 octobre 2020, selon le rapport, il effectuait des recherches internet "sur lui-même et la polémique dont il faisait l'objet", d'après son historique de navigation, et aussi "sur la définition juridique d'une menace à l'ordre public". D'après la vidéosurveillance, le jour des faits, Samuel Paty a "rabattu la capuche de son manteau sur la tête dès sa sortie de l'établissement, pour potentiellement se dissimuler", note le rapport. Les enquêteurs retrouveront "un marteau" dans son sac à dos "sans qu'il n'ait été possible de déterminer l'usage auquel il était destiné".
Dans ce dossier, quatorze personnes sont mises en examen. Après une plainte de proches de Samuel Paty, une autre enquête a été ouverte en avril 2022 par le parquet de Paris pour non-assistance à personne en péril et non empêchement de crime. Leur avocate Me Virginie Le Roy avait pointé des "fautes (...) tant du côté de l'Education nationale que du côté du ministère de l'Intérieur".
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