"C'est une épidémie": va-t-on devenir tous allergiques comme l'affirme l'OMS? Cette allergologue nous répond

Selon l'Organisation mondiale de la Santé (OMS), 50% de la population mondiale sera allergique d'ici 2050. Une problématique de santé majeure à ne pas minimiser selon cette allergologue, qui parle d'épidémie.

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M.M. Publié le 24/03/2023 à 08:45, mis à jour le 23/03/2023 à 21:08
Illustration. Photo Philippe Arnassan

Demain, tous en train de se moucher? C'est grosso modo ce que sous-entend l'OMS, en affirmant que d'ici 2050, une personne sur deux sera allergique dans le monde.

Et le champ des possibles est vaste: allergies respiratoires, alimentaires, médicamenteuses, ou encore allergies de contact avec certains cosmétiques ou métaux. 

"On voit de plus en plus d’allergies en milieu urbain, c’est multifactoriel, on peut parler d’épidémie, explique le docteur Véronique Lustgarten-Grillot, allergologue à Nice. Ça peut être lié à l’alimentation, la pollution extérieure et intérieure, le stress maternel pendant la grossesse... Les conséquences sont bénignes, comme avec la rhinite allergique, mais ça peut dans certains cas aller jusqu’au décès avec le choc anaphylactique"

Changement d'environnement et de consommation

Pourquoi devient-on de plus en plus allergiques? L’allergie, c'est une réaction immunitaire excessive à un élément de notre environnement habituel. Et notre environnement habituel est en perpétuelle évolution avec de nouveaux comportements et de nouvelles habitudes de consommation.

"Nous, on voit une modification de la pollinisation, avec des pollens plus en plus agressifs. Il y a le soja, de nouvelles habitudes alimentaires, déroule Véronique Lustgarten-Grillot. Plus on change nos modes de vie plus on découvre de nouvelles allergies. Les régimes vegan font apparaître de nouvelles allergies, notamment aux légumineuses avec les pois ou les lentilles. Et ça va prendre de l’ampleur.

Certains agitent même le spectre de l'obsession hygiéniste pour justifier cette inquiétante augmentation des allergies. Soit la réduction de l'exposition de notre système immunitaire aux bactéries, aux microbes, et donc de ses capacités à se défendre.

Véronique Lustgarten-Grillot balaye cette théorie: "Ça peut être un des éléments qui explique cette épidémie, mais vraiment une toute petite partie. C'est plutôt l'environnement, le mode de vie, le changement d’alimentation, la pollution atmosphérique."

"On ne peut pas éviter de devenir allergique"

Et c'est chez soi que peut commencer le combat contre les allergies. L'allergologue plaide pour un effort dans le choix de ses produits ménagers, souvent hautement allergisants, mais aussi, et c'est encore loin d'être un réflexe, dans le choix des peintures de son appartement: "La qualité de l’air intérieur est très importante. L’utilisation d’huiles essentielles, de parfums d’intérieur, de produits ménagers peut être délétère."

Faut-il alors traquer les allergisants pour éviter le nez qui coule? Malheureusement non.

"On ne peut pas éviter de devenir allergique, tranche l'allergologue, qui plaide pour des aménagements du mode de vie. On peut faire attention si on se sait issu d’une famille d'allergiques. Par exemple ne pas prendre un chat, éviter certaines professions, comme la coiffure, la boulangerie ou la maçonnerie, qui sont parmi les secteurs où il y a le plus de maladies professionnelles liées à l’allergie."

Une vraie maladie

Car si l'on réduit souvent l'allergie à quelques éternuements ou le nez qui gratte, ce n'est pas toujours bénin.

"L’allergie c’est une maladie, ce n'est pas juste un symptôme, un petit truc bizarre, insiste l'allergologue. Il faut prendre en compte la plainte des allergiques car ils seront 50% et il faudra les entendre. Quand on dit 'c'est pas grave tu éternues', il ne faut pas dramatiser les choses mais il ne faut pas non plus les banaliser. Ces gens dorment mal, respirent mal, ont une gêne sociale car leur nez coule, ils ronflent. Ce n'est pas grave dans le principe, mais il faut entendre la plainte et mettre tous les moyens en oeuvre pour prévenir les allergies, les prendre en charge et qu’il y ait une écoute sur cette pathologie."

Les moyens classiques pour calmer une allergie rentrent alors en jeu, comme avec les antihistaminiques ou les traitements pour les yeux. Et la désensibilisation est également à envisager si l'allergie devient trop handicapante.

Pour les acariens, la désensibilisation est efficace dans 90% des cas. Son efficacité pour les pollens tourne entre 60 et 80%. Les personnes atteintes d'allergies alimentaires peuvent également espérer se faire désensibiliser dans le futur. Des essais sur l'arachide sont actuellement très prometteurs.

Prise en charge précoce et coordination des soins

Plus globalement, Véronique Lustgarten-Grillot veut miser sur la prévention, et lorsque l'allergie est là, l'accompagnement pour mieux la vivre: "Un enfant qui a 5 ans avec des petits signes, il faut tout de suite le prendre en charge pour éviter qu’il aille vers l’asthme. Il faut plus de médecins formés pour qu’ils prennent en charge les allergies modérées, qu’ils sachent quoi conseiller, nous les allergologues sommes en deuxième ligne et l'hôpital pour tout ce qu'on ne peut pas faire en ville comme les allergies médicamenteuses. On doit coordonner nos soins."

Certaines villes françaises ont également mis en place des conseillers médicaux en environnements intérieurs (CMEI) afin d'aider les patients à identifier les sources allergènes de leur logement comme les moisissures, les animaux, etc. Ce service n'existe pas encore à Nice.

"On peut tous devenir allergiques et on est tous acteur de notre santé. On doit essayer de vivre raisonnablement en tenant compte de ce risque." conclut l'allergologue.

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