"Je m’angoisse trop pour mes enfants": que faire?

Est-il possible d'inculquer la prudence et la sécurité à ses enfants, sans en faire des êtres inquiets et fragiles? Comment rester solide face aux tourments traversés par nos enfants à tout âge? Émilie Perreard, psychopraticienne à Mougins, donne des astuces aux parents pour être plus sereins.

La rédaction Publié le 22/03/2023 à 15:00, mis à jour le 22/03/2023 à 09:54
Est-il possible d'inculquer la prudence et la sécurité à ses enfants, sans en faire des êtres inquiets et fragiles? Photo Pexels

Comme beaucoup de parents, Claire fait preuve d'une grande attention envers ses enfants. Dévouée, elle semble prête à tout pour leur éviter le moindre sentiment désagréable.

"Je ne supporte pas de voir mon fils de 13 ans triste quand il rentre de l'école. Je lui pose beaucoup de questions. Se fait-il harceler? A-t-il des amis? Je suis constamment derrière lui pour les devoirs, car j'ai peur que ses notes chutent et qu'il soit en échec. Il le vivrait tellement mal. Quant à ma grande de 19 ans, elle fait ses études en prépa dans une autre région. Elle est très perfectionniste. J'ai peur qu'elle ne tienne pas le coup. Je l'appelle plusieurs fois par jour pour m'assurer que tout va bien. Je la pousse à se confier, à me dire tout ce qui ne va pas… C'est difficile pour moi de paraître solide alors que je pleure à l’intérieur."

L’hyper-contrôle pour gérer l'anxiété

Même au travail, Claire est constamment connectée à ses enfants. Elle connaît les emplois du temps de chacun, vérifie les nouvelles notes sur la plateforme du collège, envoie la liste des devoirs à son fils encore dans le bus. Elle s'inquiète lorsque sa fille ne répond pas à l'un de ses multiples appels quotidiens, lui commande un billet de train dès qu'elle la sent sur le point de craquer. Elle exerce finalement un "hyper-contrôle" à distance.

On sent chez Claire une volonté intense de protéger ses enfants. Mais de qui? De quoi? D'un monde qui l'insécurise?

Alors qu'elle était confiante lorsqu'ils étaient dans les petites classes, Claire a plus de doutes concernant l'environnement dans lequel ils évoluent aujourd'hui. Elle connaît trop bien les risques et dangers du collège. Elle sait aussi les enjeux et la compétition qui existent dans les classes prépa.

Sentiment de dépendance

Néanmoins et malgré ses bonnes intentions, Claire communique inconsciemment ses peurs. Or, pour se sentir en sécurité, les enfants ont besoin de savoir leurs parents solides et confiants.

Claire adopte des stratégies d'anticipation qui, au lieu de rassurer, donnent l'impression que le monde est dangereux et que l'enfant n’a pas les habiletés requises pour faire face.

En surprotégeant leurs enfants, beaucoup de parents les privent de la possibilité d'apprendre à résoudre leurs problèmes par eux-mêmes. Ces derniers peuvent même développer un sentiment de dépendance anxiogène. Que faire si l'on se retrouve seul avec sa peine? Comment affronter les épreuves sans le soutien de cette mère si incroyablement empathique? Cette maman constamment à l'écoute, qui trouve toujours les mots pour apaiser et rassurer. Ces enfants ne comprennent cependant pas qu'en plus de comprendre leurs émotions, leur maman les ressent, les partage sans pouvoir garder aucune distance. Ainsi, Claire semble ne pas percevoir les limites entre ses propres ressentis et ceux de ses enfants qu'elle sent si vulnérables. Ce bain émotionnel dans lequel elle est plongée l'épuise littéralement, et la rend indisponible au reste.

Claire réalise qu'elle doit absolument prendre plus de recul. Elle est consciente également de l'impact de ses angoisses sur l'anxiété de ses enfants.

Travailler sur son anxiété parentale

Le premier travail à faire, après l'avoir identifiée, serait de s’interroger sur sa propre anxiété. Quelle est son origine? Provient-elle de traumatismes passés? Comment la diminuer ou au moins l'apaiser?

Le parent peut ainsi prendre conscience que les pensées anxieuses ne peuvent être chassées de l’esprit. Il faut plutôt les relativiser, les remettre en question ou les dédramatiser. Il faudra également apprendre à dissocier ses propres émotions de celles de son enfant. Il sera parfois nécessaire de se faire accompagner par un professionnel.

Exprimer clairement ses peurs

En admettant nos propres peurs à voix haute, on diminuera leur impact: " Ce n'est pas le fait de courir si vite qui est dangereux, c'est moi qui ai peur."

On peut aussi dire à son enfant: " Je vais essayer de ne pas te freiner avec ma peur, car j'ai confiance en toi, je sais que toi, tu peux y arriver." Cela lui permettra de se sentir plus "courageux" que ses parents.

En le laissant libre d'explorer et de se tromper (ou de tomber) sans venir immédiatement à sa rescousse, on va lui permettre de développer des stratégies d’adaptation. Ainsi confronté à la réalité, il apprendra à mieux gérer le stress.

Accepter les sentiments négatifs

Le parent doit aussi se rappeler qu'il est naturel que son enfant ressente toutes sortes d'émotions et qu'elles permettent d'avancer, de se construire. Le stress et l'anxiété peuvent également survenir à un moment ou un autre. Pour un parent lui-même anxieux, cette idée est difficile car l’anxiété vécue par son enfant peut lui faire raviver la sienne.

Dans ces moments-là, on peut apprendre à son enfant quelques stratégies, en l'amenant à se questionner sur ses pensées anxieuses, à réfléchir à des solutions, à les relativiser. Ce sera plus efficace et plus constructif pour son avenir que de le rassurer systématiquement. Au lieu de créer de la dépendance, on l'accompagne vers une autonomie émotionnelle.

Faire confiance

À l’instar de Claire, beaucoup de parents pensent être les plus aptes à comprendre leurs enfants. Néanmoins, particulièrement lorsque l'angoisse est très forte, il faut accepter de ne pas pouvoir tout contrôler, il faut accepter de ne pas être un parent tout-puissant qui anticipe et répare toutes les difficultés. Il faut accepter de ne pas être la seule personne-ressource. Ce rôle peut être tenu par l'autre parent ou par un tiers. Il faut autoriser son enfant à éprouver diverses émotions et à y faire face. Il faut lui faire confiance. C'est à ce prix que notre enfant gagnera en estime et se sentira capable d'affronter le monde et d'y trouver sa place. C'est comme cela que l'on pourra retrouver un peu de sérénité.

> 1. Par souci de confidentialité, son prénom ainsi que ses éléments de vie privée ont été modifiés.

Depuis qu'elle est devenue maman, Claire (1) ne cesse de s'angoisser. Alors qu'ils sont âgés de 13 et 19 ans, ses enfants continuent de lui causer souci. Même s'ils sont en pleine santé physique et mentale, la mère de famille ne parvient pas à être sereine! En état d'alerte permanent, elle est prête à intervenir au moindre tracas de l'un ou l’autre. Toutefois, ces inquiétudes constantes pèsent sur son couple, sa vie sociale, son travail et même sa santé: elle souffre d'insomnies et se plaint de douleurs diffuses.

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Monaco-Matin

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