Sécurité, relance économique, Covid-19: les premiers mots du nouveau chef du gouvernement de Monaco
Environnement, sécurité, relance économique, crise de la Covid-19: Pierre Dartout, le nouveau chef du gouvernement princier, a réservé ses premiers commentaires et réflexions à Monaco-Matin.
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Arnault CohenPublié le 03/09/2020 à 17:46, mis à jour le 03/09/2020 à 17:52
Pierre Dartout, nouveau chef du gouvernement princier.Photo Jean-François Ottonello
Quelques minutes avant de recevoir la presse dans sa résidence, jeudi, le nouveau ministre d’État a peut-être entendu la Marseillaise qui était jouée en face de chez lui, dans le cadre des cérémonies célébrant la Libération de Monaco.
Une Marseillaise immédiatement suivie de l’hymne monégasque. Comme un signe du destin pour ce Français de 66 ans, qui a embrassé une carrière presque entièrement dédiée à l’administration préfectorale avant d’être désigné par le Prince pour diriger son gouvernement.
Devant les représentants des médias monégasques et azuréens, Pierre Dartout a dit sa "très grande fierté" et le "très grand honneur" d’avoir été choisi par le prince Albert II. Il a également mesuré "l’ampleur des défis", "les enjeux des sujets à traiter" et "l’importance des missions" à accomplir.
Le chef du gouvernement, qui a salué d’un mot "le travail qui a été fait sous l’autorité de [son] prédécesseur Serge Telle", notamment sur la gestion de l’épidémie de coronavirus, a ensuite brossé son parcours professionnel, évoqué ses cinq garçons – "ils sont nés dans cinq lieux différents, au gré de mon nomadisme" –, assuré son bonheur, à sa famille et lui, d’être ici, en Principauté, à ce poste, au bord de cette mer Méditerranée qu’il aime depuis la plus tendre enfance et ses vacances passées dans la maison familiale du Var.
Dans son discours devant la presse, le ministre d’État a évidemment évoqué la pandémie de Covid-19 et la crise économique qui en découle, soulignant les "conditions remarquables" dans lesquelles cet événement inédit a été géré par la Principauté.
Il a ensuite rappelé les trois principaux axes de la feuille de route tracée par le prince souverain – l’écologie, la sécurité et la relance économique –, insistant sur le second volet: "Je parle en connaissance de cause, j’ai servi dans des territoires difficiles (allusion à son dernier poste de préfet de la région Paca, basé à Marseille, ndlr). Il n’y a pas de liberté sans sécurité, il n’y a pas de qualité de vie sans sécurité. C’est une priorité forte, ici, depuis des années. La réponse est performante. Il reste maintenant à la faire évoluer et à l’adapter aux nouveaux phénomènes de délinquance."
À l’issue de cette prise de parole, Pierre Dartout a accordé un entretien à Monaco-Matin. "Serge Telle m’a dit qu’il y avait ici la plus belle terrasse du monde. Je crois qu’il avait raison", sourit-il, en nous invitant à nous asseoir autour d’une table, avec vue imprenable sur le port Hercule et la mer Méditerranée qu’il aime tant.
Pierre Dartout.Photo Jean-François Ottonello.
"J’ai répondu oui immédiatement"
Pensiez-vous qu’un jour, vous vous retrouveriez à la tête du gouvernement de la Principauté de Monaco?
Non, je ne m’y attendais pas. J’ai été surpris quand on m’a fait cette proposition, qui m’a tout de suite passionné. J’ai répondu oui immédiatement. Pour moi, mais aussi pour toute ma famille, c’est un grand honneur, une grande fierté d’avoir été nommé par le Prince ministre d’État, chef de son gouvernement.
Pourquoi vous? Le fait que vous ayez croisé le souverain à plusieurs reprises a-t-il pu plaider en votre faveur?
J’ai effectivement rencontré le prince Albert à plusieurs reprises: quand il est venu à Bordeaux – j’étais préfet de la région Aquitaine –, puis lorsque j’étais préfet de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur. Je lui ai fait une visite de courtoisie en février 2018, puis à d’autres occasions durant cette période. J’ai toujours apprécié le contact avec lui. C’est extrêmement motivant de travailler sous les ordres de cette personnalité.
Votre parcours, peut-être, lui a plu, aussi…
C’est plus au souverain qu’il faut poser la question. Je suppose que mon expérience, dans des territoires différents, notamment méditerranéens puisque j’ai été préfet de trois départements bordant la Méditerranée, a pu jouer. Et puis le préfet est un homme polyvalent. Je porte un intérêt sur la sécurité, les questions économiques, les liens avec les entreprises, auxquels j’attache la plus grande importance, les enjeux environnementaux qui sont vitaux, la nécessité de concilier au mieux l’environnement et l’économie… J’ai également été directeur de cabinet du président de l’Assemblée nationale, et délégué à l’aménagement du territoire. Je connais à la fois les questions politiques, de relations avec une assemblée, et d’attractivité d’un territoire.
Vous, l’enfant de la République française, ancien élève de l’École nationale d’administration, qui a fait sa carrière dans la haute administration française, comment avez-vous vécu la cérémonie de prestation de serment devant le souverain?
Nous avons été très émus, mon épouse, mes cinq fils et moi. Nous tenions à être tous présents à ce moment-là. C’était impressionnant par la solennité, mais aussi la sobriété et la simplicité de cette cérémonie. Ce n’est pas contradictoire. Ce moment engage solennellement celui qui prête serment, puisqu’il jure devant un souverain. C’est un moment fort, extrêmement important pour nous tous, et pour moi particulièrement. J’ai été très ému, et à la fois très heureux et très fier. Je suis très reconnaissant au Prince de m’avoir désigné.
Pierre Dartout fait le point sur les dossiers chauds.Photo Jean-François Ottonello.
Ses trois priorités
Le prince Albert II a fixé trois priorités dans votre feuille de route: l’environnement, la sécurité et la relance économique. Avez-vous des idées à proposer en matière d’écologie?
Beaucoup de choses ont été réalisées, que nous allons poursuivre. Inévitablement, il faut prendre en compte les progrès techniques, les nouvelles pratiques, les innovations. Pour cela, il faut également avoir le maximum de contacts à la fois avec les entreprises et les scientifiques. L’un des défis principaux est la capacité à produire des énergies nouvelles, renouvelables, tout en économisant l’énergie, faisant en sorte, par exemple, que les habitations soient les plus économes possible. La mobilité est aussi un enjeu fort : dans nos villes, la plus grande partie de la pollution provient de la circulation automobile. Des progrès doivent donc être faits.
Avez-vous déjà travaillé sur le sujet?
Je suis sensible à cette thématique, j’y ai travaillé dans les différents postes où j’ai exercé, notamment à Bordeaux et à Marseille. C’est un enjeu essentiel. Il s’agit de la survie de la planète. Pour la principauté de Monaco, c’est aussi un facteur d’attractivité. La prise en compte des enjeux environnementaux, c’est dans l’ADN de la Principauté. De plus en plus, les hommes et les femmes seront attirés par les territoires qui sont exemplaires dans ce domaine.
Y voyez-vous aussi un facteur de développement économique?
Il ne faut surtout pas opposer l’écologie et l’économie. Elles doivent être conciliées. C’est le rôle des pouvoirs publics que de s’en assurer. La préservation de l’environnement et la lutte contre les différentes formes de pollution nécessitent de nouvelles techniques qui engendrent des progrès en matière économique. L’environnement est incontestablement créateur de richesse et d’emplois.
La sécurité est l’une de vos spécialités. Comment jugez-vous Monaco sous ce prisme-là?
Le niveau de sécurité est ici très satisfaisant. Il est le fruit d’un engagement efficace des différentes forces de police et d’une réponse judiciaire adaptée. Cela dit, la délinquance évolue. Il ne faut pas rester sur des positions figées mais s’adapter en permanence à la nouvelle donne pour pouvoir y répondre efficacement.
Un exemple?
Je pense à la cybersécurité, et aux nouvelles formes de délinquance qui se développent sur internet et les réseaux sociaux. Des réponses doivent être apportées.
Que pouvez-vous apporter dans ce domaine?
Nous devons mobiliser et motiver ceux qui travaillent pour la sécurité. Ils le font de manière tout à fait exemplaire. La crise de la Covid l’a montré. J’irai les rencontrer dès lundi prochain pour voir dans quelles conditions ils travaillent. Je fais confiance aux forces de police.
Le troisième axe fixé par le souverain porte sur la relance économique. Que faut-il faire pour sortir de cette crise économique consécutive à la crise sanitaire?
La semaine prochaine, je présenterai au Conseil national le plan de relance économique, dont l’élaboration est quasiment achevée. J’irai également à la rencontre des entreprises pour leur exposer les mesures de ce plan de relance. Mais je veux aussi être à leur écoute. Chaque secteur, en fonction de ses spécificités, a subi la crise dans des conditions différentes. Les conséquences sont plus difficiles dans certaines filières que dans d’autres. Au-delà des mesures globales du plan de relance, il y aura des mesures spécifiques pour les entreprises. Par exemple, on connaît l’importance des grands événements à Monaco – sportifs, culturels, économiques. Le secteur de l’hôtellerie et du tourisme en général est très créateur d’emplois et de richesse. La crise de la Covid a durement frappé les entreprises du secteur, il faut donc les écouter pour leur apporter les réponses les mieux adaptées.
Questions Covid
La situation
"La Principauté a lutté efficacement contre l’épidémie, a pris de bonnes mesures, parfois avant la France, et fait preuve de la réactivité nécessaire. La tendance repart à la hausse, même si, en Principauté, la situation est moins alarmante que dans d’autres territoires. Le taux de personnes contaminées parmi celles qui sont testées est en dessous de la moyenne française (3,5 % contre 4 %). Cela montre qu’il y a eu une action efficace. La semaine prochaine, nous parlerons avec le Conseil national de la situation actuelle et des mesures à prendre."
Les tests PCR
"Il faut agir rapidement pour réduire les délais pour se faire dépister et obtenir les résultats. Nous travaillons activement pour faire en sorte de pouvoir répondre à la demande."
Le masque partout
"Ce n’est pas nécessairement souhaitable. Il y a débat au sein même du monde médical et scientifique. De mon point de vue, ce n’est pas forcément la meilleure solution. Il y a des lieux où c’est nécessaire, d’autres moins. Il faut être souple. Comme l’écrit le Prince, il faut vivre différemment mais pas s’arrêter de vivre."
Le masque à 6 ans
"C’est une bonne mesure. Deux masques par enfant seront d’ailleurs mis à disposition gratuitement. Parents et enseignants devraient accepter cette obligation qui est un bon moyen de lutter contre l’épidémie."
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