Membre de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire à l’Assemblée nationale, Alexandra Masson, députée (RN) de la 4e circonscription a été nommée co-rapporteure de la mission d’information "flash".
Une tâche de deux ou trois mois (au lieu de six) sur le bilan des mesures de reconstruction et de réaménagement des vallées de la Roya, de la Tinée et de la Vésubie après la tempête Alex.
Avec Philippe Pradal, député (Horizons) de la 3e circonscription, la parlementaire entend mener "une mission transpartisane s’étalant sur plusieurs journées d’auditions auprès des différents acteurs de cette crise et de ceux par qui la reconstruction a été opérée."
Très récemment, les deux élus étaient en visite dans la vallée de la Roya pour une série d’auditions, à quelques encablures des stigmates encore visibles laissés par la tempête meurtrière de 2020.
Comment s’est constituée cette mission "flash"?
Je fais partie de la commission développement durable et aménagement du territoire. J’ai eu l’idée de cette mission au mois de décembre dernier. Chaque parlementaire peut demander la tenue d’une mission. Il y en a beaucoup en général c’est pourquoi elles font l’objet de discussions dans le bureau de la commission. Cette mission a été votée positivement en début d’année. Elle a pu démarrer une fois les gros textes de loi sur les retraites passés. Ces missions se font de manière transpartisanes avec un parlementaire d’un autre groupe politique. Philippe Pradal a été nommé et il était judicieux d’inclure la Vésubie et la Tinée puisque la tempête a touché les trois vallées.
Où en êtes-vous dans votre mission?
Nous avions plusieurs auditions à mener. Nous avons fait deux étapes dans les Alpes-Maritimes : une série d’auditions à la préfecture et une autre dans la Roya, sur deux jours. Aujourd’hui, la grosse priorité c’est la réouverture du tunnel de Tende pour cet automne. Il y a une grosse attente, tant sur le plan économique, avec les travailleurs transfrontaliers, que sur le plan touristique. Il faut espérer que ça puisse se faire très rapidement. Le seul moyen d’accéder à Cuneo, c’est par le train. Il reste accessible depuis le départ mais cela reste compliqué. J’ai écrit au vice-premier ministre italien Matteo Salvini pour accélérer au maximum les travaux de l’autre côté de la frontière pour que nous puissions respecter les délais. ça ne fait pas partie de la mission « flash » mais c’est bloquant sur le plan économique et c’est une demande des maires de la vallée que la liaison reprenne.
Le week-end dernier, des crues ont endommagé des passages construits dans la Roya après la tempête…
Oui il y a encore beaucoup d’ouvrages provisoires et les infrastructures n’ont pas été confortées. Des travaux définitifs sont à venir. Nous allons d’ailleurs demander une extension de la durée de la mission. À la suite de ces intempéries, nous allons auditionner de nouvelles personnes. Le but de cette mission est, outre l’état des lieux, de concrétiser un modèle d’action en temps de crise pour les collectivités. S’il y a une tempête du même type en France, les collectivités doivent savoir comment se positionner, savoir que faire et ne pas faire face à une catastrophe naturelle. Dans notre département, on s’est rendu compte que la Métropole Nice Côte d’Azur était mieux dimensionnée que la CARF au niveau de leur cellule de crise.
Qu’est-ce que vous retenez de vos différents échanges?
Contrairement à ce qu’on pourrait croire, plus de 30 mois après la tempête Alex, les plaies sont toujours ouvertes. Chez les élus, on sent vraiment la souffrance. C’est très vif. Les communications, l’électricité, les routes… Des villages ont été coupés du monde après la tempête. La vallée de la Roya, et Tende notamment, l’est restée le plus longtemps. Pour les routes, le réseau est presque rétabli, ça a plutôt bien fonctionné. Le plus long aujourd’hui, ce sont les indemnisations et le redémarrage de l’activité économique dans les vallées.
Pourquoi c’est aussi long?
Car la situation d’urgence est terminée. Les demandes d’autorisations (urbanismes, défrichement etc.) reprennent des délais normaux, c’est-à-dire très longs. Le seuil de tolérance de la population face à ces attentes est moindre. Les gens veulent que ça avance et on ne peut que le comprendre. Quand ce genre de chose dure trop longtemps, ça ne permet pas d’oublier et de passer à autre chose.
Les perquisitions à la Métropole ont mis des travaux à l’arrêt dans certaines zones sinistrées. Une incidence sur la Roya?
Au moment où on se parle, non. Mais je ne peux pas l’exclure non plus. Les derniers ouvrages n’ont pas tenu. Pour quelles raisons ? Je ne sais pas. On ne peut écarter aucun scénario.
Une reconstruction de cette ampleur n’est-elle pas l’occasion de reconstruire différemment?
L’idée c’est que tous les nouveaux projets soient résilients. Il ne faut pas refaire les mêmes erreurs. Il y a de nouveaux aménagements à prendre en compte. Ce qui a posé beaucoup de problèmes d’ailleurs car, dans les subventions publiques, les indemnisations s’obtiennent si on reconstruit à l’identique et au même endroit. Pour reconstruire de manière résiliente, des subventions n’ont pas été attribuées ou alors il a fallu beaucoup se battre. C’est une grosse bataille administrative au milieu d’une enveloppe à plusieurs millions d’euros. À l’issue de cette mission, Philippe Pradal et moi-même ferons une proposition de loi commune pour alléger ces procédures administratives.
Justement, le clivage politique entre vos deux familles politiques n’est pas un frein?
Absolument pas. Nous sommes tous les deux bien implantés dans notre territoire. Cette mission est pour le bien de ce dernier et la population qui y vit. On a un intérêt local commun et nous travaillons dans des conditions positives. C’est avec les gens butés et non ancrés dans leur territoire que ça ne fonctionne pas.
Vous allez prochainement [aujourd’hui pour nos lecteurs] auditionner Karim Touati, directeur territorial de la SNCF?
Oui nous attendons qu’il nous explique son bilan de la gestion de la tempête Alex. Cette ligne, qui devait être plus ou moins abandonnée, a montré toute son utilité pendant les mois qui ont suivi ce tragique événement. C’est une des rares voies de circulation qui a fonctionné et qui a permis de ravitailler Tende rapidement. Il faut en tirer les conclusions et voir ce que la SNCF va faire pour cette ligne. C’est le passé et le futur.
À la fin de cette mission, vous prévoyez des propositions de lois donc?
Ce sera surtout pour des allègements de procédures administratives, sur les délais etc. Le rapport de cette mission est prévu pour le 14 juin.
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