Georges Marsan, maire sortant de Monaco : "Je voudrais être bien élu ce dimanche"

Le maire sortant de Monaco, qui briguera ce dimanche un 6e mandat de rang, appelle au vote et promet de grands projets pour faciliter le quotidien.

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Thomas MICHEL Publié le 16/03/2023 à 12:10, mis à jour le 16/03/2023 à 10:39
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Georges Marsan appelle les jeunes de moins de 25 ans à venir voter ce dimanche pour les élections communales. Photo Jean-François Ottonello

Ce dimanche, Georges Marsan n’aura pas de concurrent pour entraver sa conquête d’un sixième mandat de rang de maire de Monaco. Un record qu’il aimerait toutefois marquer d’un sursaut démocratique alors que la participation aux élections s’effrite d’année en année.

En cela, les élections nationales de février dernier n’ont pas rassuré par leur taux de participation historiquement bas (57%). Sauf "effondrement", la liste L’évolution communale devrait réunir les 25% de suffrages exprimés nécessaires à sa réélection mais le maire souhaite être "bien élu et légitime".

Invoquant la figure d’Anne-Marie Campora, sous le mandat de laquelle il avait intégré le conseil communal en 1991, il confie ne pas avoir d’autre limite que l’âge pour exercer et rappelle que toute la population est concernée par les services de proximité de la mairie. "Anne-Marie Campora disait toujours qu’on s’occupe de la naissance aux décès."

À défaut de détenir des pouvoirs régaliens, Georges Marsan estime que la crise covid a remis en lumière le rôle fondamental de son institution et entend accentuer sa mission pédagogique pour contribuer aux transitions environnementale et numérique menées par le prince Albert II et son gouvernement.

Comment se sent-on  à quelques jours de briguer un 6e mandat?

On est tous très motivés même s’il n’y avait pas de liste en face. On le prévoyait, comme il y a quatre ans, et on a fait comme si de rien n’était. On travaille beaucoup, d’abord pour l’électorat monégasque et puis pour l’Administration de proximité. J’insiste pour que les gens viennent voter pour saluer le bilan d’une équipe mais également de mon administration qui a beaucoup œuvré pendant le covid, notamment sur le social et les aînés. Aujourd’hui nous avons un bon bilan et je les salue.

La mobilisation des électeurs est en baisse constante, qu’avez-vous fait pour les ramener vers les urnes?

Cela s’est effrité en Europe comme c’était déjà le cas aux États-Unis. Lors de mon premier mandat, en 2003, il y avait les élections communales et nationales. Depuis on a perdu 20 points de participation aux Nationales, peut-être même plus. Aux dernières Communales, nous étions déjà seuls et nous avions fait 47% de participation. Cette fois-ci on s’est beaucoup plus mobilisé sur les réseaux sociaux pour capter les jeunes de moins de 25 ans. Au-delà, la population est plus sensibilisée aux services de la mairie par la culture, les crèches, les aînés…

"Le vote et une bonne participation nous donneront la légitimité"

Le fait de ne pas avoir de concurrence, et donc de débat, ne complique-t-il pas la tâche?

Peut-être faut-il expliquer davantage qu’on est une administration de proximité et que lorsque l’on va voter on salue le travail de l’équipe sortante mais aussi de mon personnel.

Votre défi n’est pas d’être réélu mais d’être bien élu…

Exactement. Le vote et une bonne participation nous donneront la légitimité. Je voudrais être bien élu et on a tout fait pour cela. On s’est beaucoup déplacé sur les marchés, on a parlé aux familles et aux voisins, on a été actifs sur les réseaux sociaux. Je ne pense pas que les Monégasques en ont marre des élections et ils sont intéressés par les actions concrètes de la mairie. Mais attention il nous faut 25% des votants, en enlevant les nuls.

Nous n’en sommes pas là tout de même…

Non, il faudrait un effondrement!

"Le maire, c’est celui qui prend les coups"

Il y a les votes pour la liste et les votes individuels, rarement les plus flatteurs pour la tête de liste. Est-ce quelque chose que vous regardez?

C’est le sport national ça. Le maire, c’est celui qui prend les coups parce que c’est la locomotive et que sur des dossiers spéciaux, lorsqu’il ne veut pas, ne doit pas ou ne peut pas, il dit non. Et boum! [rires] Après à Monaco c’est toujours un vote familial aussi.

Mais ça ne vous touche pas plus que ça?

Je me souviens qu’à mes débuts avec Anne-Marie Campora il y avait ce même phénomène car il fallait qu’elle dise non parfois. Maintenant ça fait deux ou trois mandats que c’est toujours comme ça, je le sais. Ce n’est pas grave. Il y a toujours une moyenne de liste et entre le premier et le dernier vous avez 4 points, ce n’est pas monstrueux. C’est sûr que ça ne fait pas plaisir mais cela fait partie du jeu. Le plus important est qu’il y ait une bonne moyenne de liste et une bonne participation.

Georges Marsan souhaite "refaire entièrement le marché de la Condamine et réaménager la place d’Armes ces quatre ans” Photo Jean-François Ottonello.

"Créer des marchés d'artisanat à Monaco-Ville et Fontvieille"

Le maire sortant, Georges Marsan, veut profiter de la recomposition des Terrasses de Fontvieille et Carrefour pour financer avec le gouvernement, notamment grâce à la vente de terrains communaux, la restructuration du marché de la Condamine, qui serait plus étroitement lié à la nouvelle dynamique commerciale de Fontvieille.

Quatre ans, cela vous paraît raisonnable pour que le projet Fontvieille soit livré?

On nous a demandé de quitter l’espace Léo-Ferré pour avril 2024. On rentrera alors dans le nouvel Espace Léo-Ferré, la Médiathèque, etc. Après la destruction commencera par phases mais ils ne cassent pas tout, je pense que le projet peut prendre quatre ans.

Comment imaginez-vous la future jonction entre Fontvieille et la place d’Armes?

J’ai demandé d’étendre le parking sous la place d’Armes, ce que nous réclamons depuis quinze ans avec les commerçants monégasques. J’en reparlerai au ministre d’État. Aujourd’hui il n’y a que 50 places, le parking de La Colle est difficilement accessible et celui de la Condamine est vieillissant. Le gouvernement m’a présenté un cheminement piétonnier qui est bien, certes, mais pas suffisant.

Comment souhaitez-vous réaménager le marché de la Condamine?

On veut le refaire entièrement. La dernière restructuration remonte à 2011, en sortie de crise financière. Le gouvernement avait alors un projet de 10 millions d’euros qui avait été réduit à 5. On a fait un plus petit projet mais aujourd’hui tout est faisable. Il y a aussi un projet de réaménagement de la place d’Armes qui commence à dater. Il faut profiter de ces quatre ans pour se mettre en phase dans le quartier. Pour les commerçants, mais aussi les consommateurs et résidents.

Sans oublier les autres quartiers…

Oui. On s’est repris sur le marché de Monte-Carlo qui était une frontière. Les Beausoleillois n’y descendaient pas et les Monégasques n’étaient que de passage à travers les escalators et ascenseurs. Aujourd’hui on l’a dynamisé avec un concept totalement différent où il y a des petits producteurs, un revendeur, de l’artisanat. On va faire une placette conviviale avec des tables et chaises. On commence à travailler avec le maire de Beausoleil sur des animations communes. Je veux qu’il n’y ait plus de frontières entre Monégasques et Beausoleillois.

"Il faut même payer les commerçants, c’est une mission de proximité et social"

Était aussi pointée la question des prix pratiqués…

C’est pour cela qu’aujourd’hui il y a un revendeur et des petits producteurs, et on aide au maximum les commerçants. Dans notre projet on veut créer des marchés d’artisanat et de quartier à Monaco-Ville et Fontvieille, deux endroits où l’on va devoir aider les commerçants qui sont très enthousiastes.

Commerçants et gouvernement rament depuis plusieurs années pour relancer une dynamique…

C’est très dur et, là, il faut qu’on prenne la main pour les marchés publics comme la Condamine et Monte-Carlo. Il faut même payer les commerçants, c’est une mission de proximité et social. C’est un investissement.

Comment identifier les exposants et producteurs idoines?

On avait essayé avec Anne-Marie Campora rue de l’Église, et ça n’avait pas marché parce qu’on n’avait pas assez bien identifié la demande. Aujourd’hui ça ne peut marcher qu’avec de petits producteurs comme à Monte-Carlo. j’en ai parlé avec des commerçants de Monaco-Ville, ils sont à fond.

"La mairie est une institution qui a son autonomie administrative et commence à avoir son autonomie financière sur des grands projets.", assure Georges Marsan Photo Jean-François Ottonello.

"J’ai hurlé un moment parce qu’on a perdu deux ans sur le Jardin exotique"

Quelle est la place de la mairie en 2023 dans les institutions?

La mairie est une institution qui a son autonomie administrative et commence à avoir son autonomie financière sur des grands projets. Pour les crèches, la Médiathèque ou l’Espace Léo-Ferré, ce sont des millions d’euros qu’on ne peut pas financer, c’est pour cela que je remercie le gouvernement princier. En revanche on a pu, grâce à la valorisation de notre patrimoine immobilier sur le port, financer la totalité de l’espace Lamartine. On commence à acquérir cette autonomie financière et on ne demande plus rien au gouvernement. Après il faut être en phase avec lui sur les projets sociaux. être complémentaires.

Des frictions ont émaillé votre dernier mandat sur les travaux du Jardin exotique, pourquoi un tel agacement?

J’ai hurlé un moment parce que les travaux du Jardin exotique auraient dû recommencer en 2022. Or, je m’aperçois sur le budget 2022 qu’il n’y avait même pas de projet d’études alors que, nous, nous avions commencé notre part des travaux. Quand j’ai crié le ministre d’État a vu la dangerosité et a mis tout de suite 2 millions d’euros, puis le gouvernement a inscrit les budgets. On a perdu deux ans. Aujourd’hui on travaille bien ensemble.

C’est une frustration?

Je pense que c’est un dysfonctionnement. Pourtant j’ai insisté lourdement. Grâce au ministre d’État qui a mis un budget de 15 millions d’euros, les travaux seront finis d’ici deux ans. Reste le projet sur l’îlot Charles-III où l’on doit vendre des terrains au gouvernement et, aujourd’hui, nous n’avons toujours pas d’accord sur la somme dont ils doivent nous indemniser.

"Il y a plein de choses à faire dans tous les domaines lors de ce prochain mandat. Nous avons un programme structurant", affirme le maire sortant, Georges Marsan. Photo Jean-François Ottonello.

Un mandat "structurant" et une équipe sur-mesure

"Que ce soit sur la culture, le commerce, etc. Il y a plein de choses à faire dans tous les domaines lors de ce prochain mandat. Nous avons un programme structurant", affirme le maire sortant, Georges Marsan.

Citant les livraisons prochaines de la villa intergénérationnelle Lamartine ou encore les trois nouvelles crèches (Ida, Honoria et Bel Air - "à horizon 5 ans pour cette dernière"), le maire érige aussi en exemple la refonte de la piscine Saint Charles, à Monte-Carlo, avec la création d’une nouvelle salle de sport et de vestiaires.

"Grâce au gouvernement on a refait tout le bâtiment, la signalétique, les ascenseurs etc. Et on a séparé les deux entités Habitat et Nike pour installer une parapharmacie et bientôt une pharmacie. Et cela fonctionne très bien", se félicite Georges Marsan.

"J’ai choisi des compétences et expériences spécifiques"

Le maire sortant entend aussi donner de l’envergure aux missions de la mairie dans les domaines de l’environnement et du numérique.

Sur ce dernier plan, un accord pourrait rapidement intervenir avec l’État et Monaco Telecom. Pour éviter toute "fracture numérique", un médiateur numérique sera nommé à l’espace Lamartine comme c’est déjà le cas à la Médiathèque.

Sur la question de l’environnement, là aussi le maire voit plus grand et souhaite multiplier les actions pédagogiques comme le "Munegu Repair Café" et les conférences fréquemment proposées, "parce que s’il n’y a pas l’accord de la population sur ces sujets fondamentaux, cela ne peut pas marcher". "Il faut expliquer aux gens que des petits gestes peuvent remplir un fleuve et l’environnement, qui est prioritaire à Monaco, commence à rentrer dans la mentalité."

En plus de l’équipe reconduite, quatre nouvelles têtes ont ainsi fait leur entrée sur la liste L’évolution communale.

"Tout le monde se connaît à Monaco donc il est très difficile de faire des choix. Quand j’ai monté mon équipe, j’ai choisi des expériences et compétences spécifiques", explique Georges Marsan. Passée par la mairie puis le gouvernement, Nada Lorenzi, occupera la fonction majeure de juriste. Nathalie Vaccarezza, prendra, elle, en mains la branche sociale si essentielle.

"Un projet de mobilité douce à travers le parc Princesse-Antoinette"

Quant au numérique et la smart city émergente, ils bénéficieront de l’expertise combinée de Georges Gambarini et Jean-Luc Puyo.

Le premier, après avoir fait ses armes dans le privé en France, a œuvré ces dernières années à la Transition numérique au gouvernement. Le second dirige la Direction de l’Aménagement urbain.

"Ils sont très complémentaires et agiront aussi sur l’environnement", avance le maire, qui poursuit son entreprise de "dépollution" de l’espace public notamment en décrochant les panneaux publicitaires d’antan, et réfléchit à de nouvelles formes d’affichage dans les galeries piétonnes de la gare par exemple.

L’un des plus gros dossiers restant la mobilité douce et son amélioration en entrée de ville ouest.

"En accord avec le gouvernement il faut créer des liaisons verticales et transversales sur le cheminement entre le Jardin exotique, Musée d’anthropologie, la villa Paloma, le parc Princesse-Antoinette… D’après ce qu’on m’a dit le projet de téléphérique serait abandonné mais avec tous ces blocs on doit arriver à faire un projet de mobilité douce à travers le parc. Et on peut y arriver parce qu’on a la maîtrise de toute cette partie supérieure Nord-Ouest", avance le candidat qui rappelle aussi "qu’un passage public pourra traverser le cimetière".

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