En cette rentrée politique à Monaco, le Conseil national regrette "une relation compliquée" avec le gouvernement princier

La relation institutionnelle n’est pas au beau fixe en cette rentrée politique à Monaco, alors que la Haute assemblée doit étudier dans les prochaines semaines les budgets de l’État et des questions législatives.

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Cédric VERANY Publié le 19/09/2023 à 10:02, mis à jour le 19/09/2023 à 10:20
Rentrée politique et médiatique ce lundi au Conseil national. Romain Fondacaro/Conseil national

Pour cette première conférence de presse de mandature des conseillers nationaux élus en février dernier, à l’aune de leur Session d’automne, c’est une rengaine bien connue autour de la place de la Visitation qui est revenue comme un boomerang, ce lundi matin. Celle d’une relation de friction avec le Gouvernement où la politique du consensus n’est pas vraiment au menu. "Au fil du temps, cette relation est plus ou moins apaisée et fructueuse. Je ne peux que constater aujourd’hui, à l’approche du budget rectificatif 2023, que par de multiples prises de position de la part du Gouvernement, cette relation devient de plus en plus compliquée", tance la présidente, Brigitte Boccone-Pagès. "Je n’irais pas jusqu’à dire qu’elle est dégradée mais je vous le confirme: c’est compliqué".

En substance, le dialogue patine entre les élus et les ministres. Brigitte Boccone-Pagès plaide pour sa part représenter "un Conseil national à l’écoute, toujours prêt à discuter avec le gouvernement lorsque celui-ci évolue comme un partenaire institutionnel. Nous sommes pour lui une ressource institutionnelle et c’est ainsi qu’il doit nous considérer et nous respecter. Ni chambre d’opposition au gouvernement ni chambre d’enregistrement, tel est notre credo au Conseil national".

"Sur l’Europe, nous ne changerons jamais d’avis"

Le ton est donné pour cette rentrée alors que les élus qui se sont régulièrement et farouchement élevés contre la possibilité d’un accord global d’association entre Monaco et l’Union européenne, ne peuvent que se réjouir de la suspension des négociations entre la Principauté et la Commission européenne annoncée le 15 septembre dernier. Et renvoyées aux Calendes grecques.

Brigitte Boccone-Pagès estime que cette décision est une "avancée majeure" pour le dossier. "Je dis et j’assume le mot avancée puisque cette décision de suspendre les négociations avec l’Union européenne représente pour le Conseil national une grande satisfaction, et pour une grande majorité de notre communauté nationale, un immense soulagement. Depuis 2018 nous avons toujours eu les mêmes positions, il était essentiel, pour nous élus, de rester sur nos lignes rouges. Nous ne changerons jamais d’avis".

Selon Thomas Brezzo, président de la commission de Législation, ces huit années de palabres entre Monaco et Bruxelles n’auront pas été vaines. "Ce n’est pas un gâchis, des discussions devaient se tenir. Mais nous ne changerons pas de position sur le fait que nos spécificités ne sont pas conciliables avec les quatre libertés européennes. Pour autant, nous encourageons le gouvernement à réduire le champ des discussions et évoquer des thématiques notamment pour le secteur de la pharmacie, des transports, où certains acteurs économiques de la place auraient un intérêt à trouver un accord de libre-échange".

Avant cela les élections européennes du printemps prochain rebattront les cartes. Le Conseil national présentera quand même, à la mi-octobre, l’étude d’impact diligentée par ses services sur ce sujet. "Cette étude s’appuie sur la plus vaste consultation des acteurs économiques et sociaux de la Principauté de mémoire d’élus. Je vous rappelle que l’étude d’impact menée par le gouvernement avait démontré elle-même une tension économique, voire une récession dans les premières années suivant la signature d’un éventuel accord avant, en toute hypothèse, de voir la situation s’améliorer plus d’une décennie après", rappelle Brigitte Boccone-Pagès. "C’est quelque chose que les élus du Conseil national ne peuvent envisager, et je ne doute pas que les résultats de l’étude d’impact menée par notre assemblée révéleront les mêmes tendances".

Paroles d'élus

La conférence de presse, ce lundi, a été l’occasion pour quelques élus de mettre en avant les dossiers importants qui vont jalonner cette Session d’automne au sein de la Haute assemblée.

Budget: quelles prévisions de recettes ?

Le sujet taraude le président de la Commission des Finances et de l’Économie Nationale, Franck Julien. En prélude de cet automne où les budgets de l’État sont soumis au vote, il entend du gouvernement que ce dernier établisse des prévisions de recettes pour donner plus d’horizon au budget national.

"Nous avons connu des années prospères, mais l’avenir semble incertain. Avons-nous les ressources nécessaires pour soutenir notre économie et nos services publics ? Et si non, quels sont les plans pour combler cet écart? L’absence de prévisions de recettes par le gouvernement est troublante. Ce manque de visibilité ne fait que conforter le gouvernement dans son absence de décisions structurantes pour l’avenir", plaide l’élu. Citant notamment les recettes des années précédentes abondées par l’opération Mareterra qui arriveront à leur fin une fois le chantier livré et les appartements vendus.

"Nous devons anticiper cette transition et en tenir compte dans notre planification financière à long terme", estime Franck Julien. Pointant, "l’échec du gouvernement en matière de politique d’innovation. Il est grand temps de se demander pourquoi nous n’avons pas réussi à favoriser l’innovation au niveau attendu et de prendre les mesures nécessaires pour rectifier le tir".

Départ de Jean Castellini

En souhaitant la bienvenue à Marco Piccinini, nouveau conseiller de gouvernement-ministre des Finances et de l’Économie, Brigitte Boccone-Pagès a souhaité saluer les onze années de travail de Jean Castellini à ce poste.

"Vous le savez nous n’avons pas toujours été d’accord avec un certain nombre de ses approches, mais je salue son sens de l’État, sa haute technicité et je voudrais le remercier pour avoir accompagné de façon optimale les grandes décisions du souverain". Et Thomas Brezzo, de renchérir sur le dossier Moneyval auquel il a œuvré et dont le conseiller de gouvernement avait le leadership, "il part avec le sentiment du devoir accompli sur ce sujet. Depuis six ans, nous avons réalisé un bon travail en soutenant nos positions pour trouver un consensus. Je le remercie pour son implication".

Après deux lois votées en mai et juillet derniers, un troisième texte est à l’étude dans le cadre des quatre projets de loi autour du dossier Moneyval. Ce troisième texte devrait être voté d’ici la fin de l’année espère le président Brezzo, rappelant des difficultés au printemps, sur l’aboutissement du deuxième projet de loi. "Une réunion avait été annoncée par le ministre d’État pour revoir la méthode de travail. Nous l’attendons…"

Une nouvelle opération domaniale demandée

Présidente de la commission du Logement, Maryse Battaglia a rappelé la volonté des élus de veiller à ce qu’il n’y ait pas de retard dans la livraison des logements domaniaux. "C’est malheureusement ce qui risque d’arriver en 2025, 2026. Notre demande la plus importante est donc une nouvelle opération urgente avec une centaine de logements. Nous attendons du Ministre d’État qu’il annonce un dispositif ou une opération pour ne pas subir de trou d’air car le gouvernement n’aurait pas décidé aujourd’hui."

Titularisations de nationaux dans l’Administration

C’est une question soulevée par Franck Lobono, président de la commission des Intérêts Sociaux et des Affaires Diverses, pointant des Monégasques, employés dans l’administration, qui attendent d’être titularisés depuis plusieurs années. "Soit un salarié convient, soit il ne convient pas! Après plusieurs années, il n’est pas acceptable qu’un Monégasque se lève tous les matins, aille à son travail, donne satisfaction, mais ne soit pas titularisé. Nous avons la volonté ferme que l’on règle ces situations, quitte à les éplucher cas par cas avec le gouvernement."

Toujours sur la question du travail, l’élu s’est réjoui du succès du Forum de l’emploi. Rappelant une volonté du Conseil national de développer des logements pour actifs dans les communes limitrophes, pour résoudre des contraintes de mobilité. Un sujet épineux, car la loi SRU française impose des quotas sociaux dans les constructions de logements neufs. Ce qui contraindrait l’État monégasque, s’il construisait des bâtiments en France, à ne pas forcément pouvoir les proposer à ses salariés.

"Nous avons eu des échanges avec le président du Sénat Gérard Larcher" assure Franck Lobono. Ainsi qu’avec des élus locaux comme la sénatrice LR Dominique Estrosi Sassone et la députée RN Alexandra Masson, pour peut-être obtenir des dérogations à la loi SRU.

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