Droits des femmes: à Monaco, du changement à prévoir concernant la législation

Jeudi soir en séance législative, les élus ont examiné un projet de loi visant à modifier et abroger, dans le droit monégasque, des dispositions obsolètes et inégalitaires par rapport aux droits des femmes.

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Julie Baudin Publié le 09/05/2022 à 10:11, mis à jour le 09/05/2022 à 09:53
Ce projet de loi vise à modifier les textes du droit monégasques de notions jugées obsolètes et inégalitaires. Dylan Meiffret

S’il tient plus de la forme et que du fond, c’est bien un pas de plus vers l’égalité entre les hommes et les femmes à Monaco qui a été fait, jeudi soir, en séance législative.

Les élus du Conseil national ont en effet adopté un projet de loi du gouvernement, élaboré dans le cadre du Comité pour la promotion et la protection des droits des femmes, dont l’objectif est de modifier et d’abroger des dispositions obsolètes ou inégalitaires à l’égard des femmes, et qui ont été recensées dans l’ensemble des codes et dispositions non codifiées du droit monégasque. Une mise à jour sémantique, en plus de 50 articles qui tient bien plus que du symbole.

"Cette actualisation des dispositions juridiques contribue à poursuivre la construction de l’édifice des droits des femmes et à mettre la Principauté en adéquation avec l’évolution de la société et, au plan international, en accord avec les recommandations des Nations Unies" a rappelé le ministre d’État Pierre Dartout.

12.000 textes juridiques analysés

Durant trois ans, les services du gouvernement ont donc analysé près de 12.000 textes juridiques et législatifs afin de repérer les expressions devenues, au fil du temps, obsolètes pour des raisons juridiques, sémantiques ou scientifiques. Et au total, ce sont 85 dispositions et textes qui font l’objet d’une modification ou d’une suppression.

Le projet de loi que le gouvernement a soumis aux élus de la Haute assemblée propose d’actualiser en fonction de l’évolution du droit diverses références, à l’instar de la suppression des dispositions relatives à l’ancien régime dotal ou régissant la capacité de la femme mariée. Il propose aussi de remplacer certains énoncés sexués par d’autre expression: par exemple la notion de "bon père de famille" par "personne raisonnable".

La notion de "bon père de famille"

C’est autour de cette notion que se sont focalisées une partie des discussions des élus, comme l’a expliqué Brigitte Boccone-Pages, rapporteure du projet de loi au nom de la Commission des Droits de la Femme et de la Famille. "Selon la jurisprudence traditionnelle, le bon père de famille est celui qui agit dans le cadre de la conversation, l’administration ou la jouissance du bien d’autrui, de façon prudente, diligente et avisée, en étant soucieux des intérêts d’autrui, comme s’il s’agissait des siens propres. On remarquera donc que toutes ces qualités ne se retrouvent pas dans la seule action raisonnable."

Pour les élus il est donc délicat de réduire cette notion au seul adverbe "raisonnablement". Plusieurs amendements ont donc été apportés en ce sens.

Thomas Brezzo a pris notamment la parole pour préciser qu’il avait proposé de remplacer "bon père de famille" par "bon parent de famille" ou même "bonne mère de famille".

Soulignant son profond attachement à l’égalité entre les femmes et les hommes, il estime aussi que le projet de loi aurait pu aller encore plus loin et a fait part de son intention de s’abstenir dès le début de son intervention.

Finalement, le texte sera donc adopté par 18 voix pour et une abstention.

Pour Brigitte Boccone-Pages, "Les élus ne pouvaient qu’accueillir favorablement l’objectif poursuivi par ce texte. En effet qu’il s’agisse de la lutte contre les violences et les agressions sexuelles, la mixité professionnelle, la marche vers l’égalité salariale, le statut du chef de foyer ou encore les congés maternité et paternité, le Conseil national œuvre avec détermination pour apporter des évolutions législatives concrètes et contribuer à faire évoluer les mentalités. Ce texte est une étape importante en ce sens."

"Un texte qui apporte sa pierre à un édifice long et difficile à construire, celui d’une parfaite égalité entre les femmes et les hommes en droits et dans les faits". Photo DR.

« Une étape importante »

Que ce soit Pierre Dartout, le ministre d’État ou Stéphane Valeri, le président du Conseil national, tous deux ont tenu à dire que ce projet de loi n’était qu’une étape d’un long processus. Ils en ont rappelé les principales dates :
- 1945: le droit de vote et l’éligibilité pour les femmes monégasques aux élections communales.
- 1962: droit de vote étendu aux élections nationales.
- 1992: les mères monégasques peuvent, comme les pères, transmettre la nationalité à leurs enfants.
- 2003: mise en place de la commission des droits de la femme et de la famille au sein du Conseil national.
- 2003: loi sur l’égalité entre le mari et la femme dans le mariage, qu’il s’agisse de leurs droits et devoirs respectifs, comme de l’exercice de l’autorité parentale.
- 2009: loi sur l’interruption médicale de grossesse.
2011: loi sur l’égalité entre les femmes et les hommes monégasques, dans la transmission de la nationalité par le mariage.
Et beaucoup plus récemment des étapes mises en lumière par Pierre Dartout :
- 23 décembre 2021: loi portant réforme des dispositions relatives à l’incrimination des agressions sexuelles.
- 3 décembre 2021: loi relative à la lutte contre le harcèlement et la violence en milieu scolaire.

"Beaucoup a été fait, mais tant reste à faire encore, a reconnu Stéphane Valeri. Il reste aujourd’hui de grands chantiers devant nous et la longue marche vers l’égalité salariale n’est pas le moindre d’entre eux. Il s’agit sans aucun doute de la plus grande attente concrète pour les femmes dans le cadre de leur évolution professionnelle."

"Dans le cadre du comité pour la promotion et la protection des droits des femmes, il a souvent pu être dit et répété que ‘‘l’édifice du droit des femmes prenait assise sur un chantier toujours vivant et qu’il était important, à la fois de consolider ce qui a pu être bâti, et d’en poursuivre la construction’’" Photo DR.

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