Sans faire concurrence à Madame Soleil, il est assez aisé de prévoir ce que le chef de l’État… ne va pas dire, mercredi à 13 heures, sur TF1 et France 2.
Il ne va pas annoncer sa démission, ni la dissolution de l’Assemblée nationale, ni le retrait de la réforme des retraites adoptée l’avant-veille au forceps.
Bien au contraire, Emmanuel Macron devrait reprendre à son compte les "éléments de langage" distillés depuis vendredi par Élisabeth Borne: la loi a bien été soumise à un "vote démocratique" – la motion de censure – qui n’a pas permis de dégager une majorité hostile au projet. Son adoption est donc aussi "légitime" que "nécessaire pour préserver l’avenir du système par répartition".
Sauf énorme surprise, le Président ne devrait pas davantage "démissionner" la Première ministre, ni procéder à un remaniement ministériel. L’hôte de l’Élysée déteste agir sous la contrainte. Surtout, il a intérêt à conserver cette cartouche en cas d’aggravation de la crise sociale.
S’adresser à la France de la ruralité
Emmanuel Macron doit cependant montrer qu’il a entendu la colère des Français. Le choix d’intervenir depuis l’Élysée, à 13 heures, est symbolique: il veut s’adresser solennellement aux retraités, à ceux qui rentrent déjeuner chez eux, à cette "France de la ruralité" et des petites villes, supposée plus réceptive que celle des agglomérations où se concentre la contestation.
L’enjeu de cette interview télévisée est triple. Le chef de l’État doit d’abord tourner la page de cette réforme. Il redoute, plus que tout, un embrasement du pays sur le modèle de la révolte des gilets jaunes en 2018-2019. Cette épée de Damoclès restera suspendue au-dessus de sa tête, au moins, jusqu’à la promulgation définitive du texte, dans la foulée de son examen par le Conseil constitutionnel.
Le Président s’astreindra ensuite à tracer des perspectives positives pour la suite de son mandat. Évoquer les promesses de l’avenir peut être un moyen de faire oublier l’amertume du présent.
Enfin, Emmanuel Macron doit conforter le socle de ses partisans. À commencer par les députés Renaissance qui ont fait l’Assemblée buissonnière, lundi, à l’heure où Élisabeth Borne affrontait une opposition vent debout.
Directement exposés à la grogne des électeurs, ces édiles doutent – plus ou moins ouvertement – de la stratégie de leur chef. C’est la raison pour laquelle ils sont conviés à l’Élysée, mardi soir, avant la séquence médiatique qu’ils suivront avec attention.
Tout le problème se résume, en définitive, à une unique interrogation: la parole du Président est-elle encore audible?
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