Frondeur, obstiné, méticuleux, pertinent: les adjectifs pleuvent lorsqu’on évoque Jérôme Guedj. Bien au-delà du Parti socialiste, dont il est le bouillonnant porte-parole, le député de l’Essonne accroche l’attention. C’est dire combien sa visite dans les Alpes-Maritimes, ce samedi à la Fête de la rose (1), est attendue par les militants. Une occasion, pour lui, de dire ses vérités… Sans esquiver celles qui fâchent.
Les responsables nationaux du PS s’aventurent rarement dans les Alpes-Maritimes. Les socialistes considèrent-ils le 06 comme une terre perdue?
Non. Ici comme ailleurs, nos idées s'expriment, même quand elles ne sont pas majoritaires. Si les élus sont rares, les électeurs existent! Ce sont des territoires de mission et de conquête. Je suis d’autant plus fier de rencontrer nos militants azuréens.
Tout de même: 300 adhérents dans les Alpes-Maritimes pour plus d'un million d'habitants…
Ce n’est pas ridicule. Le PS compte 50.000 adhérents au niveau national. Les Républicains n’en ont pas beaucoup plus! C’est un fait, les partis ne sont pas à la mode. Je le regrette…
Au niveau national, le Parti socialiste paraît souvent inaudible. Le problème est-il lié, comme certains l’affirment, à un problème d'incarnation?
C’est plutôt lié au fait que la dernière fois que le PS a été aux affaires, une grande partie de notre électorat – à tort ou à raison – a été déçue par le résultat. Il y a eu une rupture de confiance. Cependant, depuis les élections législatives, nous existons dans le débat public. N’oubliez pas que, lorsqu’on additionne le nombre de députés et de sénateurs, nous sommes le premier groupe d’opposition au Parlement. Et la première force de gauche!
Contrairement au patron du PS Olivier Faure, vous estimez que ne pas faire de liste commune à gauche aux Européennes "est une faute politique". Mais comment concilier la vision du PS et celle de LFI?
L’idée que ces visions seraient inconciliables, c’est une légende urbaine! Stylo en main, je vous démontre que les points de convergences sont majoritaires.
Même sur les questions internationales?
Je ne suis pas d'accord avec la France insoumise lorsqu’elle exprime un discours ambigu sur Poutine ou sur la nécessité de soutenir l'Ukraine. Nous avons des divergences sur l’appartenance à l'Otan ou la défense européenne. Mais est-ce insurmontable? Dans le programme de la Nupes élaboré pour les législatives, il y a 80% de points d'accords. Et LFI a évolué sur des points clivants comme la sortie de l’Union ou l’abandon de la monnaie unique. [Il soupire] Cette liste commune était attendue par nos électeurs. Mais si elle ne se fait pas, ce n’est pas un drame absolu!
La gauche s'est fracturée sur la question de l'abaya à l'école. Vous êtes favorables à l'interdiction, alors que les Insoumis dénoncent une "police du vêtement"…
Je revendique un attachement fort à la loi de 2004 qui interdit les signes religieux à l’école. Une loi que LFI, d’ailleurs, ne remet pas en cause…
Ce n'est pas difficile, tout de même, de composer sans cesse avec des Insoumis qui sont dans l’opposition systématique?
Il y a des différences de style et de tempérament. Mais ce qui compte, ce sont les démarches transpartisanes. Par exemple, la proposition de loi sur les déserts médicaux ou sur la place des personnes âgées dans la société. On essaie d'avancer ensemble.
Lorsque vous écoutez Jean-Luc Mélenchon aujourd'hui, retrouvez-vous l'ancien leader de la Gauche socialiste dont vous avez été l'assistant parlementaire?
Non… Je retrouve une matrice de convictions, bien sûr, mais je désapprouve sa méthode pour aller vers la conquête du pouvoir. Il ne faut pas restreindre sa base; au contraire, il faut l’élargir. On peut être réformiste et avoir un rapport apaisé à nos institutions.
Vous défendez une proposition de loi sur le grand âge et le bien vieillir. Avez-vous le moindre espoir d'être suivi?
J’ai l’espoir de celui qui se bat. Tout le monde est d’accord pour dire que la situation actuelle n'est pas satisfaisante et que les réponses, depuis vingt ans, ne sont pas à la hauteur. La population des 75-85 ans va doubler dans les vingt-cinq prochaines années. Face à cette urgence, il faut un plan d'action global et des moyens. C’est ce qu'avait promis Emmanuel Macron en 2018… à l’horizon 2019. Ce devait être " le marqueur social du quinquennat". Aujourd’hui, l’exécutif refuse d’ouvrir le dossier pour des questions de coût. Discutons-en!
Avec le recul, comment analysez-vous les débats sur la réforme des retraites?
De la part du gouvernement, ça a été un enfumage du début à la fin. On n'a jamais su pour quels motifs réels cette réforme était engagée. Les raisons ont changé au fil du temps. Le gouvernement promettait des réformes; ils ont fait de la com'. C'est la raison pour laquelle les Français ont été ulcérés. Il paraît qu’Emmanuel Macron réfléchit aux questions qu’il pourrait soumettre à référendum… Eh bien, en voilà une excellente, non?
1. Fête de la rose, ce samedi à partir de 14h30, salle Patrice-Recroix, 730 avenue Georges-Pompidou au Cannet-Rocheville. Renseignements: www.ps06.fr ou 04.93.92.02.62.
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