La Covid a eu raison du Monte-Carlo Jazz Festival cette année. Mais pas de l’énergie des artistes. Alors qu’il devait participer à l’une des soirées musicales annulées, Charles Pasi n’a pas, pour autant, ajourné sa venue en Principauté.
Mieux encore, le chanteur français, qui en quatre albums s’est fait une place au croisement entre le jazz, le blues et la soul, a décidé d’investir pour deux jours la Salle Garnier, dont les ors serviront de décor à un vidéoclip pour accompagner la sortie de son nouvel album en début d’année.
Un album aux faux airs d’arlésienne. "Il devait sortir en mars 2020, puis en juin, puis en septembre et ce sera finalement février 2021. À cause du confinement tout a été déplacé, et le label voulait éviter le marasme", souffle-t-il.
"C’est un peu frustrant parce qu’il est prêt et j’aime bien que ça se fasse dans la foulée. C’est compliqué d’avancer avec un album qui n’est pas sorti. Mais il y a pire en ce moment, et il faut s’adapter. J’ai entendu le ministre des Finances anglais carrément exhorter les musiciens à changer de métier. On s’accroche. Je pourrais faire de la boulangerie ou des pizzas, mais pour l’instant je reste artiste", plaisante-il.
Un album confectionné
dans le secret
Preuve de son entêtement, sa venue sur cette scène monégasque, sans public mais pour l’amour de la musique.
"Je cherchais un lieu pour faire ce clip, j’ai demandé à Jean-René Palacio que j’aime beaucoup et avec qui j’ai beaucoup collaboré, de pouvoir profiter de ce super lieu. Il a dit oui. J’ai toujours pris beaucoup de plaisir à venir dans les salles de spectacles à Monaco. Et le décor de la salle Garnier est impressionnant, mais pas paralysant. Il ajoute de l’énergie à l’envie de jouer".
Résultat ce sont deux titres de l’album qui ont été clipés ces jours-ci à Garnier, par Marilor Requet, dans les conditions du live.
Un peu comme l’esprit du cinquième opus de Charles Pasi. "C’est un album que j’ai voulu faire comme je n’ai jamais fait. En prenant des musiciens que je ne connaissais pas forcément, mais dont j’aime le travail. Je n’ai pas fait de maquettes, les musiciens n’ont pas entendu ce qu’ils allaient jouer avant notre rendez-vous en studio. C’est un risque que je voulais prendre, j’ai tout gardé secret pour voir si l’alchimie prenait".
Pour accompagner sa voix et son souffle dans l’harmonica, Charles s’est entouré de Fred Dupont à l’orgue Hammond, de Cyril Atef à la batterie, et de Vincent Perani, en invité, à l’accordéon. "Ça tient sur cet équilibre assez fragile, très épuré. Ce sont des sonorités d’instruments un peu oubliées. On a commencé par faire deux séances, et on a fini l’album assez rapidement".
"Tout n’est pas tout noir ou tout blanc"
Ne manquait qu’un nom à cet album. Ce sera Zebra, zèbre en anglais. Explications ?
"J’ai vu un documentaire sur les zèbres, je trouvais que c’était un animal qui fait de longues migrations pour manger, c’est un peu l’histoire des musiciens, de migrer pour manger. On est tout le temps en mouvement. Et j’aimais le côté noir et blanc, qui ressemble à mes influences, la musique afro-américaine mêlée à la rencontre du monde occidental. ça rappelle que tout n’est pas tout noir ou tout blanc", glisse le jeune musicien, raccord avec perfecto noir et tee-shirt blanc sur le dos.
Zebra est aussi l’anagramme de “braze”, qui signifie “souder” en anglais. "Là encore, ça traduit l’esprit d’un album. Quand on fait un disque, on soude des parties ensemble pour faire quelque chose d’indivisible".
Preuve de cette "soudure" réussie, le très beau titre Silence, déjà audible en streaming, laisse envisager la suite prometteuse.
commentaires