"On est parti de Nice en train. On est descendu à Èze à la demande d’un contrôleur (sic). Comme on devait aller à Vintimille, on a poursuivi le trajet à pied. En passant par Monaco, fatigués de marcher, on a pris des vélos. Mais sans intention de les voler…"
Dans le box, menottés, deux ressortissants roumains racontent leurs péripéties azuréennes du jeudi 18 juillet. Ils comparaissent à l’audience de flagrance pour vols, détentions de stupéfiants et outrages.
Réponse à tout
Le protagoniste, un retraité de 69 ans, et son comparse, un manœuvre dans le bâtiment de 42 ans, ont sombré depuis longtemps dans la délinquance. Ils comptent plusieurs mentions sur leurs casiers, avec en majorité, des faits de vols, recels, violences… Leurs premières condamnations datent respectivement de 2010 et 2007.
Les faits, reconnus, se situent en début d’après-midi sur le quai Antoine-Ier. Ils y dérobent deux vélos de marque Décathlon. À leur retour, les propriétaires, quarante-cinq minutes plus tard, alertent la Sûreté publique. Il ne reste plus que les antivols sectionnés sur place. Grâce à la rapide intervention des policiers, les deux cyclistes occasionnels sont interpellés au niveau de la place d’Armes.
Le président Jérôme Fougeras-Lavergnolle* rend compte de l’enquête éclair et presse les deux prévenus de questions embarrassantes.
"Vous déteniez chacun une pince coupante. À quel effet?
– C’était pour aller travailler, répondent laconiquement les détenus.
– Et la drogue ? 2,44 grammes d’herbe de cannabis pour l’un, un joint pour l’autre…
– C’est pour traiter mon asthme, affirme le retraité.
– Je suis un consommateur régulier, confirme le second.
– À la vue de vos antécédents judiciaires, n’étiez-vous pas venus à Monaco avec l’intention de voler ces vélos?
– Non! À mon âge, le chemin parcouru m’avait épuisé, assure le sexagénaire.
– J’étais saoul et j’avais pris des médicaments", admet le quadragénaire.
Celui-ci ne se souvient toutefois pas d’avoir insulté les deux policiers. À cet instant, l’agent présent vient lui rafraîchir la mémoire. L’amnésie persiste! Même avec la plaidoirie de Me Hervé Campana: "Les insultes fusent dès l’entrée de ce prévenu dans le véhicule de police, martèle l’avocat. Cet individu conteste et estime qu’il a été frappé. Ce comportement est inadmissible. Chacun de mes clients sollicite la somme de 500 €."
"Pas de sursis!"
La colère s’empare du premier substitut Olivier Zamphiroff. "Après la description des intéressés, écartez cette chimère de primo-délinquants à Monaco. Ce sont des gens qui bougent: Paris, Bruxelles… Ils projetaient de voler à Monaco. Voilà des professionnels du vol unis dans la même manœuvre. Leurs noms et dates de naissance diffèrent pour tromper. N’ayez pas des œillères pour ces rompus aux balivernes et supercheries. Soyez cohérents avec les condamnations! Pas de sursis, douze mois ferme."
C’est une lourde tâche pour Me Clyde Billaud de défendre ses clients présentés d’emblée comme des délinquants professionnels. "Les prévenus étaient bien alcoolisés: entre 0,30 et 0,40 mg/l. Le vol n’est pas contesté et les vélos ont été rendus. La précarité les pousse à poursuivre leurs méfaits. Mais leurs casiers monégasques sont vierges. Enfin, je doute de leur solvabilité pour les parties civiles."
Le tribunal prononcera trois mois ferme et maintiendra le versement des sommes aux plaignants.
* Assesseurs : Florestan Bellinzona et Morgan Raymond.
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