La course poursuite a été d’une rare intensité. Le 24 novembre dernier, les policiers opèrent un banal contrôle routier boulevard de l’Ariane à Nice. Avec un dispositif rôdé. Un policier en civil, garé discrètement sur le bas-côté avec une moto banalisée, signale les infractions à une patrouille qui intercepte plus loin.
A la manœuvre, dans le rôle du "guetteur", un flic costaud, 40 années de service. En face déboule un scooter Piaggio trois roues. L’engin roule vite, grille un feu. Le policier signale mais, d’un coup, le pilote, Walid Missaoui, 42 ans, opère un demi tour, passe de nouveau au rouge, prend un sens interdit et s’échappe vers la route de l’Abadie. "Je n’étais pas sûr d’avoir pris la bonne immatriculation, a témoigné le policier à la barre du tribunal correctionnel de Nice, ce vendredi. J’ai donc remis mes gants, mon casque, et je suis parti derrière lui."
Il retrouve le contrevenant, décline sa profession et demande au chauffard de faire demi tour. "Il a alors donné un grand coup de guidon à gauche pour me faire quitter la route. Je n’ai pu éviter la collision que par un freinage d’urgence."
Le policier prévient ses collègues qu’il a failli être renversé, reprend l’homme en chasse mais à distance, dans cette route en lacets. Soudain, à la sortie d’une épingle, le Piaggio est là, face à lui. Le pilote a fait demi tour pour l’attendre et lui foncer de nouveau dessus. "Un scooter comme ça, à trois roues, ça pèse bien 200 kilos, c’est un bélier." Les deux pilotes tombent à terre. Le policier chute entre un plot en béton et une bouche incendie. "A un mètre près, je pouvais me tuer." Une bagarre s’ensuit au sol et le forcené est finalement maîtrisé.
Le fonctionnaire n’est heureusement que légèrement blessé. "Juste sous le roncier dans lequel je suis tombé, il y avait un trou de quatre mètres", a-t-il témoigné, visiblement très secoué par cette affaire.
16 condamnations au casier
Walid Missaoui, défendu par Me Jean-Yves Garino, raconte une tout autre version. Il affirme n’avoir pas vu le contrôle, avoir juste souhaité prendre un raccourci et avoir pensé en voyant la moto avec un homme habillé en noir, avoir affaire … à un tueur à gages.
Selon lui, le policier n’a pas décliné son identité. La présidente du tribunal, Marion Menot, n’en croit pas un traître mot. L’homme compte seize condamnations au casier, dont une pour violences sur officier ministériel, vols avec violence, évasion. "Un passé tumultueux", résume-t-elle.
Le prévenu roulait sans permis, était positif au cannabis et transportait une petite quantité de résine. "Il a commis cinq délits ce jour-là, défaut d'assurance, conduite sous stupéfiants, refus obtempérer avec mise en danger d’autrui, usage de stupéfiants et violences sur policier", a résumé Ludovic Manteufel, le procureur.
Le tribunal n’a pas entendu l’argumentaire du prévenu, ni adhéré à son histoire de "tueur à gages" et de "raccourci". Walid Missaoui a finalement été condamné à 30 mois de prison, dont un an avec sursis probatoire, soit dix-huit mois ferme. Le tribunal a ordonné son maintien en détention. Il a obligation de soin, de travail, et devra indemniser le policier.
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