Récidivistes, les voleurs de sac de luxe iront (encore) en prison

Deux ressortissants bosniens ont été interpellés après avoir volé un sac de luxe dans un magasin de Monaco. Connus d'Interpol pour les mêmes faits, les deux prévenus ont été condamnés à 18 mois de prison ferme

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J.-M.F. Publié le 06/11/2018 à 11:30, mis à jour le 06/11/2018 à 09:49
Le Palais de justice de Monaco Photo Cyril Dodergny

Configuration inhabituelle pour le procès de deux Bosniens devant le tribunal correctionnel. Soupçonnés d’avoir volé un sac en croco, le 10 juin 2017, dans la boutique "Loro Piana", allée François-Blanc, à Monaco, ils comparaissaient éloignés d’une soixantaine de kilomètres l’un de l’autre.

Dans le box, en effet, Zoran, un brocanteur de 62 ans, toujours en détention préventive à la maison d’arrêt du Rocher pour ce délit, prend place menotté. L’autre, Momir, un jardinier âgé de 67 ans, incarcéré à la prison de Grasse pour un vol commis à Cannes le 19 janvier dernier, assiste à cette même audience par visioconférence.

Habitués des prétoires

Ces individus, habitués des prétoires et des longs séjours en cellules, cumulent une douzaine de mentions chacun sur leur casier et ordres d’écrous pour vols. Une énième condamnation à 18 mois de prison ferme les attend à l’issue du délibéré.

Aujourd’hui, persona non grata en Principauté, ils se sont fait remarquer, à l’époque, par la vidéosurveillance de l’enseigne de luxe. Ils entrent une première fois dans la boutique, le 8 juin, en touristes.

Deux jours plus tard, ils retournent, entre 13h45 et 14 heures. Quand Zoran et Momir en ressortent, le superbe sac a disparu. Grâce aux enregistrements, ils sont catalogués.

Ce qui permettra au vendeur de les reconnaître, le 22 juin, dans les jardins du Casino. Les policiers alertés, les deux compères sont rapidement interpellés devant le bureau de tabac du Métropole et placés en garde à vue.

Puis incarcérés. Jusqu’à ce que le conseil de Momir soulève l’irrégularité de l’interpellation en flagrance de son client au-delà de huit jours. Il sera libéré en décembre 2017. Zoran n’aura pas la même chance. À cause d’une infraction à mesure de refoulement, il reste détenu. Le premier sera toutefois vite rattrapé par la justice française…

"J’ai eu envie de prendre ce sac pour l’offrir…"

À l’audience, le président Jérôme Fougeras Lavergnolle passe l’emploi du temps monégasque des prévenus au peigne fin. Sous le feu des questions ciblées, précises, accolées, le magistrat les fait chuter de leur piédestal d’innocence arrogé.

Après avoir tergiversé sur leurs intentions de venir à Monaco en touristes, de se donner des idées de cadeau pour offrir à une femme qu’ils devaient rencontrer à Monte-Carlo et autres billevesées, les deux ressortissants de la péninsule balkanique se livrent… Le brocanteur avoue! Ce serait l’occasion qui a fait le larron…

"Mon copain m’accompagnait. Nous n’étions pas en repérage. On se connaît depuis longtemps. Posé sur la table, j’ai eu envie de prendre ce sac pour l’offrir à la dame qui n’est jamais venue. Je l’ai caché sous ma veste. Je ne sais pas si Momir m’a vu… Pourquoi l’alarme ne s’est pas déclenchée? Certainement, le système n’a pas fonctionné. À la sortie du magasin, on s’est séparé…"

Le président insiste: "Pourtant, le 22 juin, on a retrouvé sur vous un système antivol. Était-ce celui du sac?"

Réponse inconsidérée: "Non! C’est quelqu’un qui me l’a remis et c’était un pur hasard de l’avoir conservé sur moi…"

Enfin, où est passé l’objet tant convoité? "Je l’ai vendu sur un marché en Italie, pour la somme de 2.000€. J’ai bien essayé d’en tirer plus d’argent…"

Le président l’interrompt: "À partir de votre portable, vous avez envoyé des photos du sac avec une proposition de vente à 20% du montant initial à des commerçants…"

Comme tout porte à croire que le sexagénaire cherche à couvrir son complice, le magistrat se demande: "Avez-vous peur de votre compatriote?"

Affirmation du contraire: "Non, c’est le hasard si j’ai volé le sac qu’il a touché…"

Interrogé… depuis la prison de Grasse

Interrogé à son tour, l’autre prévenu, depuis la prison de Grasse, reconnaît une partie des faits tout en essayant de se blanchir dans un rôle de simple accompagnateur par amitié.

"Vous avez un sacré palmarès, remarque le président. Vivez-vous uniquement de vols?"

La réponse a fait sourire… "Non, je travaille comme jardinier bénévole…"

C’est lassant, pour le procureur Alexia Brianti, après une année d’information et le rappel minutieux des faits, d’entendre pareille assertion.

"Ces prévenus sont des professionnels sans aucun doute. Bien organisés, ils vivent de vols depuis des années et connus d’Interpol pour leur spécialisation dans les objets de luxe. Quand le brocanteur vous parle de réinsertion, il n’y a aucune raison de le croire et de lui offrir une nouvelle chance. Vous les condamnerez à une peine de trois ans de prison ferme avec mandat d’arrêt."

Me Xavier-Alexandre Boyer plaidera la relaxe de Momir. "Rien ne démontre qu’il a commis un vol à Monaco, interprétation de la vidéo à l’appui. Il est resté étranger à la revente. Ses antécédents ne doivent pas jouer."

Pour Me Valentin Loret, du Barreau de Marseille, "Que s’est-il passé entre son interpellation et octobre 2018? Pourquoi mon client est-il toujours en détention provisoire? On aurait dû le condamner dès le début puisque refoulé, il était en situation de flagrance. C’est un vol simple. Sans arme. Sans partie civile. Il a un projet d’entreprise avec son fils. Donnez-lui une chance…"

Le tribunal réduira de moitié les réquisitions du ministère public: 18 mois ferme pour chacun.

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