Qui de l'automobiliste ou du chauffeur poids lourd est responsable dans une collision sur un passage piéton? La justice monégasque a tranché

Seize mois après le choc violent entre une voiture et un poids lourd, une victime s’est plainte encore, au tribunal correctionnel de Monaco, des conséquences de l’accident corporel sur sa vie quotidienne.

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Jean-Marie Fiorucci Publié le 31/05/2022 à 05:01, mis à jour le 31/05/2022 à 11:19
L’accident a eu lieu au Jardin exotique (illustration devant la gare). Photo Illustration J.-F.O.

À la barre du tribunal correctionnel de Monaco, un couple de retraités monégasques est venu réclamer justice. Très respectueux du Code de la route et même trop prévoyant semble-t-il, l’époux au volant de sa voiture avait anticipé l’intention d’une jeune femme de s’engager avec un landau sur un passage protégé. C’était le 4 février 2021, vers 7h55, au niveau du boulevard du Jardin-Exotique. Réaction logique: il freinait et s’arrêtait pour laisser le champ libre à la personne à pied en attente d’effectuer la traversée de la chaussée sans danger. Mais un fourgon au trajet identique, surpris par cette immobilisation brusque de l’automobile qui était devant lui et dont la vision était tout autre, la tamponnait à l’arrière. La collision était violente.

"Cela donne une idée
de la violence du choc"

Les deux passagers du véhicule, blessés, étaient dirigés par les services de secours vers le CHPG. Il en résultait huit jours d’ITT pour l’épouse qui se plaint encore à cette date des conséquences de l’accident corporel sur sa vie quotidienne. Or, dans ce dossier (il a fait précédemment l’objet de deux renvois), la notion d’obstacle prévisible apparaît à l’audience prêter à discussion. Par le témoignage du piéton, d’une part, apparemment surprise que le véhicule s’immobilise pour la laisser passer. Et du prévenu, d’autre part, tout aussi abusé par la décision de l’arrêt brusque. Haut perché sur son camion avec une vitesse de 30 km/h, il ne pensait pas un seul instant à pareille réaction de la part de la personne au volant.

Comme tout conducteur doit, compte tenu de sa vitesse, maintenir entre son véhicule et celui qui le précède une distance de sécurité suffisante, le président Jérôme Fougeras Lavergnolle a rappelé au chauffeur "de devoir s’arrêter devant tout obstacle se présentant sur la chaussée et anticiper toute manœuvre de la part d’autres utilisateurs. Quand on annonce 20.000 euros de réparations, cela donne une idée de la violence du choc. Vous avez déjà été condamné en 2017 pour délit de fuite…"

Voix de la partie civile, Me Cyril Offenbach, du Barreau de Nice est prêt à contre-attaquer et il s’en prend aussitôt au témoin.

"Les victimes sont affectées et surprises"

"Étrange réflexion de ce piéton dont les propos sont contraires en fin d’audition où il tient à préciser qu’aucun automobiliste ne daignait s’arrêter pour la laisser passer! Il faut savoir ce que l’on raconte. Les victimes sont affectées et presque surprises que l’on s’étonne du freinage pour céder la priorité à un piéton. Les résultats? Vous avez un véhicule proche de la démolition. Mes clients ont dû faire l’avance des frais pour une voiture de location et Monsieur demeure préoccupé par le traumatisme de son épouse, en plus de tous les tracas engendrés. Si l’assurance adverse a reconnu le préjudice matériel, elle conteste les dommages corporel et moral. Faite droit aux provisions de 8.000€ pour le couple."

Le substitut Emmanuelle Carniello résume avec simplicité l’affaire. "Les infractions sont caractérisées et confirmées devant les services de police. Le chauffeur ne respectait pas la distance obligée entre les deux véhicules. Pour cette inattention, condamnez le prévenu à 1.000€ d’amende assortis du sursis et une contravention à 45€ pour le défaut de maîtrise."

Le tribunal a suivi les réquisitions du ministère public et alloué la somme de 3.000€ aux victimes.

L'effet de surprise pour étayer la défense

On n’en aura pas terminé avec l’effet de surprise du piéton devant l’arrêt du véhicule, comme celui du client défendu par Me Gérard Baudoux, face à cette manœuvre inopinée.

Pour le ténor niçois, "ce chauffeur ne pensait pas que le conducteur de la voiture avait anticipé de laisser un libre passage, pas plus que le témoin. C’est un freinage inopiné avec un poids lourd chargé. Le comportement de mon client est à mettre en exergue. À la suite de cet accident, il a été sanctionné. Ce n’est pas un chauffard qui peut justifier d’un bonus de 50%..."

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