Lorsqu’une entreprise est amenée à effectuer des travaux en ville, des mesures de prévention doivent faire l’objet d’une attention accrue. Il est d’ailleurs reconnu que toute mise en œuvre avec une emprise sur la voirie est un véritable défi pour l’équipe professionnelle.
Pourtant, le 19 octobre 2018, vers 11h45, un passant était gravement blessé à l’approche d’un chantier situé sur le boulevard d’Italie. Victime d’une chute et éprouvé par quatre-vingt-dix jours d’ITT, il est venu réclamer justice devant le tribunal correctionnel.
90 jours d’ITT suivis d’un licenciement
Apparemment, les faits évoqués à l’audience sont assez simples. Le piéton glissait en bordure du trottoir à proximité des lieux concernés à cause d’un liquide gras dû à l’épandage d’une foreuse. Entre autres témoignages relevés, le conducteur de travaux reconnaissait qu’un corps à l’état de fluide s’échappait de l’outil à rotation et s’écoulait sur le trottoir. Il proposait l’hypothèse d’une barrière pas suffisamment étanche.
Quant au chef d’équipe, il n’écartait pas le problème de la graisse utilisée pour le bon fonctionnement de cette machine neuve. Il rappelait toutefois l’application d’un produit dégraissant sur le sol afin de nettoyer la chaussée et le trottoir une fois l’activité terminée.
Très attentif aux propos tenus, le président Jérôme Fougeras Lavergnolle a reproché l’absence d’une signalisation indispensable. "Un dispositif devait être mis en place à cet effet par l’entreprise pour alerter d’un sol glissant." Il invite le directeur juridique de la SAS à s’expliquer à la barre.
"C’est un chantier qui a duré plus longtemps que prévu, déclare-t-il, dans un contexte particulier où le passage des piétons était limité. L’incident a eu lieu le dernier jour. Certes, l’employé aurait dû respecter la consigne: aucun nettoyage de la machine ne devait être effectué sur le lieu de travail. Mais uniquement au retour au dépôt et dans des ateliers adaptés à cet effet."
Ces éclaircissements renforcent les réclamations de la partie civile. "Le jour où je m’apprêtais à reprendre mon travail, j’ai été licencié après les trois mois d’arrêt. Or, des complications, plus ou moins tardives et durables, persistent encore. Ma vie a changé et je ne peux plus voyager comme auparavant…"
Préjudice moral, oui. Infraction pénale, non
Si la victime reconnaît que le risque zéro n’existe pas, il évalue l’ensemble de ses préjudices à la somme de 80.000 euros. Sans transition, le parquet fait part de son inquiétude sur la mise en place d’une réglementation aléatoire.
"Les directives administratives indiquent à chaque fois l’obligation d’un système de sécurité avec des mesures de protection, souligne le substitut Emmanuelle Carniello. Il n’y a même pas un bac pour récupérer le liquide. Qu’en est-il du superviseur des travaux afin de contrôler le bon déroulement du chantier? Cette démonstration structurelle et l’absence de signalisation, comme le changement de positionnement, justifient la responsabilité de la société."
Face à cette absence de mesures suffisantes pour éviter des dommages, la parquetière requiert 20.000 euros d’amende.
Toutefois, pour la défense, la responsabilité d’une personne morale obéit à une règle liée à un mécanisme pénal très clair. "Il lui est impossible de commettre une infraction, argumente Me Denis Fayolle, du Barreau de Marseille. Il appartient alors au juge de l’identifier. Il s’agit d’une cause d’imprudence. Le plaignant est victime d’un accident sans pâtir d’une infraction pénale. Dès lors, le préjudice moral et l’année de salaire sollicitée ne sont pas la même chose. Relaxez la société."
Le tribunal a suivi, semble-t-il, le raisonnement de l’avocat.
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