On sonne au portail de leur vaste propriété à Mouans-Sartoux, et ce ne sont plus les silhouettes furtives de Toundra et Alaska qui filent devant nos yeux. Plutôt que les deux loups polaires, c’est le museau d’Anubis, une femelle malinoise de 7 ans, qui se faufile à travers les grilles et réclame abondance de caresses. "Pour elle aussi, c’est très dur de ne plus avoir Alaska et Toundra avec nous, soupire son maître Daniel Hisrch. Avant, quand on sortait avec eux, Anubis marchait juste devant eux. Maintenant, elle reste prostrée derrière. En réalité, elle est aussi choquée que nous!"
Le 9 mars, Toundra et Alaska auront 10 mois. Mais Daniel et Joëlle continuent de les appeler leurs "bébés". Par affection, plus que par esprit de possession. "On les a gardés durant sept mois, ils étaient parfaitement bien avec nous, et on avait commencé à les former avec trois exercices de recherche."
Et l’ancien maître-chien militaire et son épouse de rappeler qu’ils ont jadis fait leurs preuves avec l’obtention d’un certificat d’aptitude provisoire durant six ans qui est devenu définitif en 2017. Et leur avait déjà permis d’élever à domicile trois loups successivement, Indiana, Utah puis Montana, formés à la recherche de personnes disparues selon le but de leur association Avaloup.
"On passe pour des délinquants"
"Devant le jury de la commission, lorsque j’avais dit que je serais content que Montana ne sauve ne serait-ce qu’une seule vie, j’avais été applaudi, souligne Daniel Hirsch. Six ans après, les choses ont bien changé: malgré notre activité honorable, on nous fait passer pour des délinquants."
Joëlle et Daniel ne comprennent toujours pas pourquoi ont leur a retiré leurs deux derniers, alors qu’eux mêmes étaient placés en garde à vue dans les locaux de la gendarmerie à Mouans-Sartoux.
Certes, deux contrôles de la DDPP (Direction Départementale de protection animale) s’étaient mal passés, l’administration leur reprochant "des manquements à la réglementation" et mettant en demeure les Hirsch de ne détenir qu’un seul et unique loup.
"Mais le deuxième nous a été confié parce que Montana est mort juste avant d’adopter un nouveau bébé!", se défend le couple, qui avait riposté en engageant une procédure devant le tribunal administratif.
"Lorsque les gendarmes nous ont convoqués le 23 janvier dernier, on pensait que c’était pour nous notifier quelque chose à ce sujet. Mais on s’est retrouvés en garde à vue dès notre arrivée, et on a dû aider les gendarmes à embarquer nos bébés dans des cages, afin qu’ils soient transportés ailleurs sans nous dire où. "
"On veut récupérer les deux, pas un"
Une perquisition a suivi au domicile des Hirsch, et "des armes de collection ont été brièvement saisies".
Mais en attendant un jugement pénal devant le tribunal correctionnel de Grasse où ils doivent comparaître pour détention illégale d’un animal sauvage, les Hirsch ont lancé une pétition sur Facebook ["Nos loups sauvent des vies"] qui aurait recueilli près de 25.000 signatures. De même, plusieurs voisins ont écrit des attestations pour témoigner de "loups toujours doux et affectueux, qui n’ont jamais posé de problème."
Le 28 janvier dernier, la municipalité mouansoise a même organisé une manif pour soutenir les Hirsch.
"Pendant douze ans, on a travaillé avec les gendarmes et la police pour faire des recherches et, d’un coup, nous voilà devenus malfrats, s’insurgent-ils. Demain, si on nous dit qu’on peut les récupérer [N.D.L.R.: Toundra et Alaska seraient placés dans un parc en Bretagne], on prend la voiture et on monte tout de suite. Mais on reprend bien les deux, on ne peut pas en sacrifier un! ".
Les voilà qui crient désormais aux loups. Par amour, plutôt que par crainte.
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