Nébuleuse histoire de chèque en blanc détourné : la comptable relaxée

Attention aux chèques signés "en blanc" dans les entreprises ! Un comptable peu scrupuleux pourrait le libeller à son profit. Une drôle d’histoire du genre a été évoquée au tribunal correctionnel de Monaco.

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JEAN-MARIE FIORUCCI Publié le 01/04/2019 à 10:30, mis à jour le 01/04/2019 à 09:39
(Photo Archive N.-M.)

En décembre 2016, la dirigeante d’une société part en congé en laissant un chèque « pré-signé » de 4 000 € en cas de dépenses exceptionnelles à régler.

La quinquagénaire, qui tient les comptes de la boîte, l’aurait encaissé sur son compte bancaire personnel. Mais aucun doute ne vient effleurer l’esprit de la patronne tellement la relation de confiance est établie avec son employée. Jusqu’au jour où cette dernière, une Française native de Bucarest, quitte l’entreprise en février 2017.

« Vous aviez encaissé le chèque, note le président Florestan Bellinzona. Comme il ne correspondait à rien, vous avez combiné la somme avec le bulletin de paye d’un employé pour faire la balance ! »

"Une prime exceptionnelle"

À la barre, la prévenue, sans aucun antécédent judiciaire, s’en défend.

« C’est une prime exceptionnelle que la patronne avait l’habitude de verser. D’ailleurs, en janvier 2017, j’avais reçu la somme de 2 400 euros de la main à la main plus le chèque. »

Le magistrat fait l’addition et s’étonne de ne pas voir figurer sur le bulletin de salaire le montant de 6 400 €.

« À cause des rémunérations occultes données à tout le personnel, affirme l’intéressée. Sur le document comptable, vous ne verrez jamais la mention de prime. »

Cependant, la partie civile ne donne aucun écho à ces allégations.

"Il n’y a pas le moindre repenti, tonne Me Thomas Brezzo, devant autant d’incohérences. On est baladé... En fait, c’est à la lumière d’un virement frauduleux qu’il y a eu licenciement. D’où la perte de confiance de son employeur et l’exclusion de la comptable. Sur le chéquier, le talon est vide ! À quoi correspond-il ? Après de longues recherches, il a été encaissé par cette dame. Notez les multiples versions dans ses déclarations. Aucune prime n’a été versée en janvier... Sa théorie du complot pour se venger ne tient pas..."

Pour dénoncer les faits dans leur matérialité, l’avocat dévoile la prime de licenciement de 38 000 € et le préjudice occasionné par les charges sociales versées. En finalité, une somme de 10 500 euros est réclamée. La différence de cultures entre le cyrillique et le français serait-elle la cause de cet imbroglio de chiffres pour le premier substitut Olivier Zamphiroff ? "Madame se pare de toutes les régularités fiscales. C’est le contraire avec manquements, défaillances, carences, transgressions... Je regrette que l’on n’ait pas entendu le commissaire aux comptes, son référent ! Il a fallu six mois pour que la société s’interroge sur ce chèque : c’est troublant ! Au bout du compte, on ressort trois bulletins de paye et aucun ne correspond. Quel intérêt d’encaisser un chèque quand on est certain d’être découvert ? J’ai un doute sur l’intentionnel. Ou vous ordonnez un complément d’information, ou bien je m’en remets à votre sagesse."

La défense va profiter de l’occasion. "On est dans le dysfonctionnement grave, assure Me Sarah Filippi. Rien n’est cohérent ni transparent. Tout est nébuleux. Ma cliente est un rouage. Pourquoi la prime n’est-elle pas notée ? Pourquoi la menace-t-on par rapport au fisc ? De l’autre côté, l’employeur n’est-il pas en fraude ? Ce dossier a été mené au préjudice de la prévenue. Le doute doit lui profiter, car aucun élément ne vous conduit en voie de condamnation." Le tribunal prononcera la relaxe.

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Monaco-Matin

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