Ce départ découle d'une révolution assez silencieuse qui a bouleversé l'ensemble des magistrats du palais de Justice, à la suite de la directive Anselmi. Une décision de ne plus renouveler les juges français détachés après trois années sur le Rocher. S'il est murmuré dans l'entourage judiciaire que la Principauté serait revenue, depuis, sur cette sentence, Paul Chaumont et sa collègue Virginie Zand auront toutefois essuyé les plâtres.
Dans son bureau de l'annexe du palais de Justice, cet Orléanais d'origine, âgé de 56 ans, était manifestement partagé entre la tristesse d'abandonner la terre monégasque et l'honneur d'accéder à sa nouvelle fonction.
"Je m'étais attaché à ce pays, hors norme et magnifique"
Toutefois son ambivalence n'entraînait aucun comportement ambigu.
"Cette nomination à la Cour de cassation est l'aboutissement de ma carrière. J'avais déjà exercé, à l'époque, dans cette juridiction suprême qui garantit l'interprétation uniforme de la loi. Cependant, quitter Monaco m'a plongé dans l'affliction. Je m'étais rapidement attaché à ce pays, hors norme et magnifique, où rien ne laisse indifférent…"
Sur le ton de la nostalgie, Paul Chaumont évoquait sa venue dans les rangs de la justice monégasque, en septembre 2015.
"J'avais intégré une équipe de magistrats expérimentés, polyvalents et d'horizons divers, sous l'autorité bienveillante de Brigitte Gambarini. Une femme très soucieuse de son indépendance et de son impartialité."
Tout à coup, au moment de partir, ses yeux se chagrinent d'avoir été poussé vers la sortie.
"Une première depuis quarante ans, raconte sans causticité cet homme qui a commencé sa carrière comme commissaire de police. Cette décision a été fondée sur des motifs qui ont évolué avec le temps et dont aucun n'est compréhensible. C'est regrettable! Car l'expérience offerte par la Principauté est valorisante. Il est presque impossible, en effet, pour des gens de robe de pratiquer un Droit étranger. Certes, les Droits monégasque et français sont cousins. Mais il faut tout de même deux bonnes années pour s'en imprégner entièrement. On est aussi surpris de voir des contentieux très variés, avec des implications internationales aux forts enjeux financiers…"
Un nouveau paysage de la profession en octobre prochain
Il y a bien d'autres raisons essentielles. Et le conseiller, sorti major de l'école de la magistrature, profite de l'occasion pour faire le point.
"En dehors du travail quotidien à la Cour d'appel, avec mes collègues, nous avons rédigé un Code civil annoté : le premier depuis la promulgation du Code en 1 880. Nous avons sélectionné 1 300 décisions afin d'apporter un éclairage bénéfique sur des articles de ce même Code. Il a été publié l'année dernière, puis distribué aux magistrats et avocats de la Principauté. C'est un outil de travail précieux qui a nécessité deux années de préparation. Nous avons également rédigé un Code pénal annoté. Mais il n'a pas encore été édité. Cela démontre bien la créativité et le dynamisme de cette équipe de magistrats. C'est regrettable de l'avoir démantelée, car d'autres projets auraient pu encore aboutir…"
Son successeur ? Paul Chaumont ne le connaît pas… Mais avec d'autres départs à la retraite annoncés, un nouveau paysage de la profession va se dessiner à l'occasion de la rentrée judiciaire, en octobre prochain !
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