En comparaissant menotté devant le tribunal correctionnel, le prévenu peine à cacher ses larmes. Il incline sa tête pour dissimuler ses sanglots qu'il retient pourtant en silence. Lundi, cet agent immobilier monégasque a dépassé un véhicule sur le boulevard des Moulins en franchissant la ligne continue. Il est interpellé par des policiers qui constatent des yeux brillants, une haleine avinée. L'automobiliste est dans un état éthylique très avancé et incapable de souffler dans l'appareil qu'on lui tend. Finalement, il est contrôlé avec un taux d'alcoolémie de 1,02 mg/l.
« Qu'aviez-vous bu ? » lui demande le président Michel Soriano. Dans le box, le quinquagénaire, surpris par l'énoncé des faits, égrène à voix basse : « Une bière et deux verres de rosé. Je me sentais en état de conduire… » Mi-dubitatif mi-courroucé, le magistrat se braque. « Je doute de la quantité. Avec un tel taux, cela me paraît difficile à croire. Vous avez dû oublier quelques verres au passage… Ça me fait bondir quand j'entends que vous vous sentiez de tenir un volant. Or, vous ne voyiez pas la ligne continue, vous n'arriviez pas à souffler… C'est insupportable. D'autant que vous aviez déjà été condamné pour un délit identique à huit jours de prison en 2007. Boire ce n'est pas interdit. En revanche, conduire après, oui ! »
"Je dois réduire ma consommation"
Quand le chapitre de la personnalité est abordé, l'homme reconnaît un problème avec l'alcool : « Je dois réduire ma consommation… »
S'ensuit un moment pénible. Une forte commotion frappe le détenu. Affaibli, honteux, ses larmes coulent à nouveau. Tout semble s'entrechoquer dans son esprit. Un aveu d'impuissance devant son addiction ? Fait-il son deuil de l'image de l'homme à laquelle il veut correspondre face à sa famille présente sur les bancs du prétoire ?
Le président compatit devant l'affliction du quinquagénaire et comprend sa douleur. « C'est pour vous ! Il faut prendre votre situation en main. Faites quelque chose ! On ne veut plus vous revoir devant la Justice… »
Plus détaché mais moraliste, le procureur général Jacques Dorémieux brandit le spectre de la dangerosité des alcooliques au volant et la série d'accidents qui ont endeuillé la Principauté dans les années antérieures. « Le ministère public a fait preuve d'une grande fermeté depuis. Avec un tel taux, le commun des mortels aurait du mal à conduire. Je ne vois pas autre chose pour l'intéressé que le passage par la case prison… » Il requiert un à deux mois ferme fractionnés, 5.000 € d'amende plus 35 € pour la contravention.
Après avoir assuré les juges de la capacité de son client à résister à l'alcool, Me Patrick Bérard, du barreau de Nice, clamera : « Comprenez son état. Cet homme a essayé à deux reprises de se soigner. Prenez en considération ses relations familiale et professionnelle. La peine prononcée doit s'assurer du bien des soins : un système de liberté surveillée… »
Le tribunal condamnera le prévenu à seize jours de prison, 5.000 € d'amende et 35 € pour la contravention.
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