"Cela fait quinze ans que l’on a tout essayé pour vous aider, divulgue le président Florestan Bellinzona. La première fois que vous passiez devant ce tribunal, vous aviez 12 ans. C’était devant moi. Avertissements, soins, aides, conseils, recommandations, mises en garde… Que n’a-t-on pas tenté pour vous assister, vous secourir… Quand on regarde votre casier judiciaire aujourd’hui, vous avez neuf condamnations pour stupéfiants, menaces de mort, outrages, violences, ivresse…"
L’enfer est pavé de bonnes intentions! La locution résume bien le bilan dressé à l’audience par le magistrat, désemparé face à un prévenu qui ne se raisonne plus après avoir bu. Combien de fois a-t-il insisté sur la contribution de la justice pour décoller cette étiquette négative qui colle à la peau de ce jeune homme? Malgré ces objurgations, le Monégasque de 25 ans, présent à la barre cette fois, ne semble pas mesurer la gravité de l’infraction reprochée le 24 mai 2022, au niveau de la place d’Armes.
"J’ai eu un gros trou noir"
Les policiers étaient appelés vers 23 heures pour secourir un blessé. Dans un premier temps il s’agissait d’une bousculade. Une personne chutait au sol et se cognait la tête contre un frigo du "Barbiss". Aux urgences du CHPG, le médecin faisait six points de sutures pour fermer la plaie de la victime, avec une ITT de trois jours. Était-ce un fait uniquement accidentel? Face aux conséquences, une plainte était déposée et l’enquête confirmait la responsabilité du prévenu. Il avait importuné cette autre personne au cours d’un anniversaire.
"Le plaignant vous avait pourtant demandé de le laisser tranquille, poursuit le président. Cela entraînait une difficulté relationnelle, au point de vous énerver et d’avoir un comportement inadapté.
- Je sais! Je l’ai violemment repoussé, reconnaît le jeune monégasque, et après j’ai eu un gros trou noir.
- Quand on lève la main sur quelqu’un, ce n’est pas involontaire."
La victime vient à la barre et ne comprend ni la réaction ni la décision de son agresseur. "Habituellement, c’est un gentil garçon que je connais. Mais il était ivre. Un témoin lui avait pourtant demandé de quitter les lieux quand la situation s’envenimait. Je demande la somme de 2.200 euros pour compenser financièrement mon arrêt de travail pendant une semaine."
Un regard sur le PV et le magistrat relève les témoignages des policiers. "Comme d’habitude, quand on vous a ramené à la Sûreté publique, vous avez été insultant. En permanence dans une défiance injustifiée, vous ne cessez d’outrepasser les règles de la convenance."
"Je ne comprends pas une peine aussi lourde"
Pourtant, ce trouble-fête, au sens le plus large de celui qui dérange, voudrait que le tribunal entende, comprenne qu’il a "tout entrepris pour éviter de retomber dans la délinquance, dans les infractions à répétition. L’alcool, J’ai tout arrêté.
- Et la cocaïne?", rétorque sans transition le président en énumérant les peines inscrites sur le casier judiciaire.
Le parquet remet le couvert sur les addictions à la boisson et aux stupéfiants, causes premières de tous les ennuis du prévenu. "Comme il n’arrive plus à se contrôler, il a poussé la victime sur la terrasse du bar. Le caractère volontaire ne fait aucune difficulté après l’absorption de plusieurs verres de rhum-Coca. Il faut comprendre la réaction du plaignant avec des blessures aussi graves. Il a entrepris des démarches. Mais c’est une prise de conscience qu’il doit privilégier pour enfin comprendre."
Le substitut Maxime Maillet demande de mettre un coup d’arrêt: "Six mois de prison ferme afin de protéger la Société." Sans avocat pour le défendre et agrippé à la barre, comme s’il allait vaciller, le fauteur de troubles est apparu sonné. "Je ne comprends pas une peine aussi lourde. Je consulte en permanence médecin et psychiatre pour m’en sortir. Je fais tout mon possible pour retrouver un emploi, reprendre mon travail…"
Inflexible, le tribunal a suivi les réquisitions du ministère public et octroyé la somme de 1.500 euros à la partie civile. Plus la sanction infligée le 14 février dernier.
commentaires